Martigues, entre terre et mer, côté golfe de Fos


Le sentier des douaniers à l’est de Martigues (Le sentier des douaniers de cap Couronne à Carry le Rouet), je l’ai parcouru ; mais côté golf de Fos, l’amie qui m’accompagne et moi-même, nous ne le connaissons pas. Je prépare donc un circuit qui passe dans le vallon de Cavalas (à noter, passant par la crête : boucle des vestiges militaires à Cavalas), traverse l’intérieur des terres puis longe la côte ouest.

Départ au pied de la centrale thermique de Ponteau (Lavéra, Cycle Combiné Gaz) et ses hautes cheminées colorées de rouge et blanc en haut, et bleu clair à la base : impossible de les rater, c’est un bon point de repère ! Chacune mesure 140 m de hauteur (celle de Gardanne : 297 m). Désormais inutiles depuis le passage au gaz, les quatre cheminées en béton armé seront-elles démolies ou gardées comme témoignages du passé ?

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La certification ISO 14001 vise à améliorer régulièrement les performances environnementales de la centrale. Cette norme internationale atteste l’existence et l’efficacité des démarches environnementales en vigueur.[…] Depuis 2012, les émissions de CO2 ont baissé de 54 %, contribuant ainsi à l’amélioration du bilan carbone global du groupe [ndlr : qu’en est-il à Martigues ?]. En 2018, plus de 90 % des déchets ont été valorisés. [Le cycle Combiné Gaz] a cédé au Conservatoire Régional des Espaces Naturels la partie la plus riche du vallon des Renaïres et protège le biotope sur une surface de 11 hectares, par la mise en place d’un arrêté préfectoral.[…] Sur le CCG de Martigues, la mise en sécurité de l’ancienne centrale fioul est achevée. Dossier de presse de la centrale Martigues-Ponteau

Sur le parking, les premiers amateurs de bateau s’activent ; nous suivons la route vers l’est qui traverse un lotissement, passe sous la ligne de chemin de fer de la Côte Bleue puis monte par le vallon de Cavalas, à découvert ; il fait chaud sur ce sentier caillouteux. Sur la crête, je repère les deux grands pylônes à haute tension, puis la rampe permettant autrefois de monter du matériel jusqu’à la batterie de Cavalas grâce à un treuil.

Nous passons devant l’ancien moulin puis descendons vers la carrière des Auffans, exploitée au cours de la seconde moitié du XIXe siècle puis de 1950 à 2003 pour la restauration de monuments historiques. De là, le fameux PDT (Poste de Direction de Tir) spécial se reconnaît bien si on l’a visité sur place. Nous trouvons une pierre pour pique-niquer sous les arbres.

Après une courte traversée en sous-bois, nous retrouvons la route qui passe au dessus de la ligne de chemin de fer. Ses décorations métalliques en forme de pomme de pin sur acanthes sont typiques du XIXe et se retrouvent sur d’autres ponts route de la ligne, ou sur les rampes d’escalier extérieures.

Un petit bout de route vers le lieu-dit les Soubrats puis nous entrons dans la garrigue qui porte les traces d’arbustes incendiés parmi des fleurs jaunes et roses. Non loin d’Arnette, une vieille ruine de maison puis des vestiges de la batterie de terre allemande d’Arnette.

Les Allemands y installèrent en 1944, à proximité de l’ancien sémaphore d’Arnette,  une batterie de trois canons de 17 cm K18 L50. Avec Cavalas, elle commandait la baie de Marseille et le golfe de Fos. Selon le forum sudwall

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Boucle des vestiges militaires à Cavalas, Martigues


Sur une idée d’André, nous découvrons le site militaire de Cavallas à Martigues ; bien que n’ayant pas de connaissance dans le domaine militaire et son vocabulaire technique, je reconnais que ce site complexe et vaste m’a impressionnée : beaucoup de vestiges militaires allemands de la Kriegsmarine répartis le long de la crête entre le vallon de Cavalas et celui de la Brègue, avec vue sur la Méditerranée au sud et le port de Lavéra à l’ouest. Nous avons stationné sur le chemin qui mène à la déchetterie, le long de la route de la Couronne.

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L’office de tourisme de Martigues propose une boucle de randonnée des vestiges militaires balisée de bleu que le quotidien La Marseillaise décrit ainsi :

Plusieurs centaines de fortifications, bunkers, blockhaus, casemates, murs,… ont été construits par l’armée allemande pour bâtir, dès l’occupation de la zone libre, le 11 novembre 1942, une réplique du mur de l’Atlantique [südwall] sur toute la façade méditerranéenne française. Ce dispositif de défense côtière, réponse au débarquement allié en Afrique du Nord, n’a pas empêché celui de Provence, le 15 août 1944. La Marseillaise, 21 juillet 2019

Un peu d’histoire résumée essentiellement en rassemblant quelques informations du document de Frédéric Saffroy, Mission d’identification et d’historique des vestiges militaires de la zone littorale : historique de la défense des côtes (1888-1945) à Martigues, Ville de Martigues, 2007. Cette étude avait été commandée par Paul Lombard, maire de Martigues de 1969 à 2009 dont nous venons d’apprendre la mort le 7 juin 2020.

  • Juin 1940 : bombardement de Marseille ; l’Italie déclare la guerre à la France ; les Allemands entrent dans Paris ; Pétain demande l’armistice. De Gaulle s’envole pour Londres.
  • Novembre 1942 : prise de contrôle de la côte méditerranéenne par les allemands ; désarmement de l’Armée française d’armistice ; à ce moment là, Cavalas possède 5 canons 21 cm 39/40.
  • Février 1943-avril 1944 : la région de Martigues appartient au secteur occupé par la 338e division d’infanterie, créée en urgence, commandée par Josef Folttmann  puis  en janvier 1944 par le général René de l’Homme de Courbière1. Sur la carte d’occupation de la côte en août 1944, on voit qu’elle est déployée essentiellement sous la ligne de chemin fer, c’est à dire sur des positions françaises réutilisées. Le régiment de grenadiers 758 de cette division installe son PC à la Couronne. Les unités statiques sont dotées de pièces de toutes origines et calibres variés. Le dispositif s’étoffe au fur et à mesure de l’avancement de la progression alliée.
  • Jusqu’en septembre 1943, le haut commandement de la Wehrmacht pense qu’il n’y a pas de danger immédiat.
  • A partir de fin 1943, réquisition de main-d’oeuvre dans la commune de Martigues pour la construction de plateformes d’artillerie, soutes à munitions, tobrouks, etc.
  • Février et mai 1944 : visites d’inspection du général Erwin Rommel, chargé par Hitler de la défense des côtes.
  • Juillet 1944 : au 25 juillet 1944, 3 officiers dont le Kommandeur, l’Oberleutnant, 35 sous-officiers et 213 marins arment la batterie
  • Août 1944 : la 338e division envoie un de ses régiments au nord, d’autres sur Arles.
  • 17 août : ordre de retraite des armées allemandes ; 20 août : la 338e passe le Rhône. Martigues est libérée le 21.

Nous montons sur la crête par une large boucle vers le sud passant non loin de l’ancien moulin de Jérôme Verland meunier en 1830. De chaque côté du chemin, des installations militaires. Au  loin, d’imposants porte-containers sortent ou entrent dans le golf de Fos.

Flak2

La position est très fortement défendue par une bonne densité de flak2 visant à réduire l’efficacité des opérations aériennes hostiles. Au sol, on utilise des canons de différentes tailles installées dans des cuves ; un accès par des marches peut mener aux soutes et abris souterrains. Le forum sudwall Martigues Cavalas, en donne une description technique dontdeux pièces hippomobiles assurant la défense rapprochée du site.
Les Batteries côtières en France Volume 2, A. CHAZETTE, Ed. Histoire Et Fortifications, 2004

Par exemple, le Flak 38 d’un calibre de 20 mm, peut tirer 180 à 220 coups par min.

Poste d’observation

Beaucoup de vestiges sont incomplets, souvent camouflés sous les pierres blanches locales. Le poste d’observation MG à créneaux abritait sans doute une mitrailleuse.

Abris

Intrigués par un escalier qui descend dans une tranchée côté sud, nous découvrons un abri à double entrée, avec ses soutes à munitions. Au départ de la cuve à canon, une longue tranchée relie l’abri à la plateforme taillée dans la roche à flanc de falaise en contrebas du plateau au nord. On voit la tranchée sur la carte aérienne de l’IGN mais on ne peut accéder à cet abri qu’à partir de la piste du vallon de Cavalas en contre-bas d’où l’ont voit bien également la pente du monte-charge.

Trous d’hommes

Les nombreux trous d’hommes sont des positions de défense. Attention de ne pas tomber dedans ! Il en existe plusieurs sortes, plus ou moins sophistiqués : du simple trou creusé dans le sol au trou bétonné rectangulaire et recouvert par une chape en béton en passant par un trou protégé par une petite muraille en pierre ou plus grand pour une arme automatique.

André aimerait retrouver la villa qui camouflait le poste de direction de tir situé en avant des canons (Schneider ?) et qui commandait leurs feux. Nous la cherchons du côté de l’antenne et la trouvons sans mal à côté d’une tour qui pourrait être un faux puits…

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** Sur le thème du patrimoine et de l’eau à Saint-Chamas


Saint-Chamas : connaissez-vous un saint du calendrier qui porte ce nom ? Sûrement non ! Selon J.-M. Cassagne et M. Korsak, Dictionnaire étymologique des noms de lieux des Bouches-du-Rhône, J.-M. Desbois Editeur, 2017, ce serait une corruption de l’occitan Sanch Amant, comprise phonétiquement comme san Chamant puis Saint-Chamas. Sanctus Amantius, devenu moine, est venu vivre ici dans une grotte ; il est devenu évêque de Nice en 381. Le castrum Sancti Amanti est cité dans une charte de 1035.

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Avec Marie et Majo, nous partons du port sous un magnifique ciel bleu. Je suis agréablement surprise du décor : l’idée que je me fais de l’étang de Berre n’était pas aussi positive. Je les emmène d’abord au lavoir des contagieux qu’André m’a fait connaitre il y a quelques mois. Belle construction de pierre du XVIIe avec toit de lauzes au bord de l’étang dans lequel les habitants malades de la peste, du choléra,… étaient tenus d’y laver leur linge qu’on faisait sécher sur l’herbe. On dirait l’architecture d’une chapelle. A côté, un polygone de tir permettait à la poudrerie royale de faire des essais d’explosion à la poudre d’où son autre nom de ‘lavoir du polygone’. Occupé aujourd’hui par un sportif qui s’échauffe je n’ai pas osé faire les photos de l’intérieur mais j’ai celle de ma visite précédente.

Un peu de ville jusqu’à la route pour rejoindre le pont romain ou pont Flavien du 1er siècle après J.-C. ; financé par Donnius Flavus, il est construit en une seule arche traversant la Touloubre ; sous les arcs jumeaux en pierre blanche de Calissanne passe la voie romaine secondaire Marseille-Arles par le nord de l’étang et qui rejoignait la voie aurélienne au nœud routier de Saint-Gabriel ; elle est fortement dégradée en son centre par le passage des chariots et le manque d’entretien : au XVIIIe, il ne restait plus que 40 cm avant d’atteindre le vide sous la voûte. Un consul de la ville nommé Surian, a ordonné des travaux de restauration d’où son surnom local de pont Surian.
En haut de chaque pilastre, un lion dont un seul est d’origine, celui, féroce, qui roule sous sa patte une tête d’animal ou d’homme (selon la Carte archéologique de la Gaule 13/1 p. 282). Un phallus censé protéger l’ouvrage des crues et des maléfices est gravé sur une pierre, comme au pont du Gard, aux arènes de Nîmes ou sur le pont du Buès (04), comme dans de nombreuses autres civilisations.

L’usage de placer des Phallus à l’extérieur des édifices publics, afin de les préserver de maléfices, est constaté par plusieurs monuments existants. On en voyait sur les bâtiments publics des anciens. […] Le Phallus énorme en marbre blanc trouvé à Aix-en-Provence, et qu’on voit près des eaux thermales de cette ville, est orné de guirlandes, et semble être un ex-voto. Le culte du phallus chez les anciens et les modernes, J.-A. Dulaure, Arbre d’Or, Genève, avril 2007

Le phalllus du pont Flavien à Saint-Chamas, J.-P. Cassely, guide conférencier

Longer la rivière ombragée est un enchantement ; nous traversons la rivière sur une passerelle de bois qui nous amène dans une zone de canes puis de cactus. Quand nous sommes à découvert c’est pour passer sous le viaduc SNCF Saint-Léger mis en service en 1848 : 49 arches en plein cintre qui s’enchevêtrent formant des ogives et la passerelle de service en dessous, à mi-hauteur. Juste après être passées sous le pont, deux chemins : le plus à droite débouche au nord du pont de la Roquette après un passage étroit spectaculaire (photo de droite MissfujiSabine Cohen – club RSD Martigues).

Le plus à gauche, facile, après un petit aller-retour, nous amène au sud du pont de la Roquette, un pont routier de pierres maçonné qu’on pourrait croire moyenâgeux (en dos d’âne avec avant-bec) mais reconstruit au milieu du XVIIIe. Une carte postale ancienne montre un troupeau de moutons en train de s’abreuver dans la Touloubre près de ce pont.

Deuxième détour à la chapelle Saint-Léger située à côté de la voie ferrée et d’une canalisation d’eau qui s’écoule en cascade. Saint Léger, patron actuel de la paroisse, a pris la succession de Saint Aman lors de la construction de l’église actuelle, sans doute en mémoire du prieuré Saint-Léger. Il ne reste que la chapelle, lieu de pèlerinage où les notables se faisaient ensevelir. Au rez-de-chaussée, le portail central a été bouché sur une façade bien fissurée : les vibrations du passage des trains n’a pas dû l’arranger ; à l’étage trois petites ouvertures en arcade ; le clocheton n’a plus de cloche. Combien de temps restera-t-elle debout ?…

Le passage Saint-Léger longe le canal de Miramas ; après la vue élégante sur ce long viaduc, la randonnée continue parmi les oliviers, sur un bon chemin de terre bordé de murs de pierre sèche. A mi-distance du chemin des restanques, nous trouvons une pinède en bordure de route pour déjeuner.

Au bout de ce chemin, nous découvrons un lotissement neuf ; je pressens que le tracé préparé a changé ; après une rude montée, en effet, il est désormais  dans une propriété privée ; sagement, nous allons traverser le lotissement d’est en ouest sans chercher d’autres possibilités : chemin d’Embarben, chemin de la glacière jusqu’au pont supportant le canal du guéby.

Selon le dictionnaire cité plus haut, Embarben a la même origine que La Barben ; personnellement, j’ai d’abord pensé au consul romain Domitius Aenobarbus qui a laissé son nom à la tour d’Embarbe à Céreste (04), près de laquelle passe la voie Domitienne dont il est l’instigateur. En l’an 122 av. J.-C., il est élu consul. Trois années plus tôt, les Romains, appelés à l’aide par leurs alliés Marseillais contre les Salyens, commencent des campagnes militaires dans les territoires de Gaule méridionale : Domitius Ahenobarbus prend le commandement de cette guerre. Peut-être la trace de son passage a-t-elle perduré ici jusqu’à nos jours ?…

Entre le canal et la voie ferrée, dans le jardin d’une propriété, une haute cheminée d’usine étonne et… détonne un peu dans ce milieu urbanisé. La proximité de la Poudrerie et d’une source d’eau induirait-elle une production d’électricité pour celle-ci ? Située sur le sentier du patrimoine, ne mériterait-elle pas un panneau d’information ? Un grand merci à Pascal Petit, historien de l’Inventaire des Réseaux Spéciaux et Particuliers de la Poudrerie – qui m’apporte la réponse et cite ses sources :

Il s’agirait de celle construite en 1881 pour la première usine électrique (voir plan de 1909) ; la seconde usine datant de 1924. La force hydraulique issue du canal fournissait l’énergie. Une machine à vapeur prenait la relève en cas de pénurie d’eau, de maintenance,… d’où la cheminée. Un article paru dans le Génie Civil du 20/10/1906 confirme la présence d’une usine électrique hydraulique et à vapeur à St-Chamas fournissant des tensions continue (500 volts) et alternative (2000 volts/60 hertz). Un autre article avait déjà été publié dans la même revue le Génie civil du15/10/1882 . Il s’agit de la première centrale électrique en France, utilisée pour l’éclairage d’une usine.

Des lignes de chemin de fer quadrillaient la Poudrerie vers les ateliers et dépôts de munition. Inventaire des réseaux spéciaux et particuliers de la poudrerie (carte extraite de ce document). Certaines ont été transformées en voies vertes ou sont devenues de simples chemins.

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