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A la découverte du diamant noir


enclave_pape_vaucluse.gifQuelle est cette bizarrerie ? Nous venons d’entrer dans le département de la Drôme du sud vers le nord quand nous nous retrouvons de façon inattendue dans le Vaucluse ! Le canton de Valréas est entièrement enclavé dans la Drôme et partout les publicités nous rappellent que nous sommes dans l’enclave des papes !

Un peu d’histoire pour comprendre. Le 7 août 1316, le deuxième Pape d’Avignon Jean XXII est nommé : c’est un homme chétif, malingre et souffreteux. C’est par une cure assidue des vins de Valréas, dit-on, qu’il se serait assuré guérison et longue vie (il est mort à 89 ans…). Pour être certain de disposer en permanence de son élixir de santé, il achète, dès le 27 septembre 1317, les droits seigneuriaux de la cité de Valréas à laquelle il ajoute bientôt les communes de Visan, Grillon et Richerenches. L’Enclave des Papes est née. Elle est délimitée par des bornes papales que l’on peut encore voir à certains endroits. Randonnée des bornes papales à Valréas (format pdf)

Une petite bande de terrain appartenant au Dauphiné sépare le Comtat Venaissin de la Région de Valréas. Le Pape s’efforce donc de la racheter mais le Roi de France s’y oppose, inquiet de l’avancée du Saint-Siège dans le Midi. Toute communication entre les deux possessions pontificales est donc impossible, sans franchir le territoire français.

L’église hérite des biens des templiers : Richerenches, Visan en 1344, puis Grillon en 1451 complétent cette propriété des papes d’Avignon. Valréas devient une ville commerciale et juridique renommée et prospère.

Le rattachement à la France ne se fait qu’après la Révolution en 1791 lors de l’annexion des biens de l’Eglise. Les habitants de l’Enclave des Papes revendiquent leur identité lors de la constitution du département du Vaucluse : ils veulent rester provençaux ! aucun gouvernement n’a osé modifier son statut d’Enclave ! on comprend mieux pourquoi les descendants des vignerons guérisseurs de Jean XXII tiennent tant à ajouter l’appellation « enclave des papes » à leur vin des Côtes-du-Rhône. Résumé de l’histoire à partir du site Tourisme en Provence une histoire qui rejoint la légende, et du site de la commune de Richerenches

Extrait de Ventoux magazine, 19 novembre 2009, Guerre des appellations : les vignerons de l’Enclave des Papes déboutés :

Il ne peut pas y avoir de vin portant l’appellation « Enclave des Papes » mais seulement celle de « Châteauneuf-du-Pape »…. C’est la conséquence du jugement qui vient d’être rendu la cour d’appel de Nîmes et qui considère que le terme de « Pape » doit être réservé aux seuls vignerons de Châteauneuf-du-Pape, portant ainsi un rude coup à leurs collègues de l’Enclave.
« Cela peut entraîner une confusion avec Châteauneuf-du-Pape », avaient tranché les magistrats donnant ainsi raison aux vignerons de l’illustre vignoble qui, par l’intermédiaire de deux de leurs syndicats, avaient porté plainte pour « usurpation de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) Châteauneuf-du-Pape », de « publicité mensongère » et de « commercialisation de vins sous une présentation de nature à créer une confusion ».
Le vin de table Vieux Papes en 1961 et le côtes-du-rhône Le Chemin des Papes en 2005 ont obtenu devant la justice le droit de conserver leur nom. Autant dire que c’est bien un schisme qui divise aujourd’hui les vignerons de Châteauneuf-du-Pape et ceux de l’Enclave des Papes.

La météo aujourd’hui à cet endroit
Avec la température ressentie

L’arrivée à Valréas, en suivant le GPS, nous amène par le gué sur la Coronne bien loin d’être à sec. A moitié rassurés, nous le passons. A peine arrivés, nous sommes accueillis par notre hôte qui est déjà sur le pas de sa porte. Rapidement, il entre en conversation. Nous attendons le deuxième couple qui, comme nous, va passer un « week-end truffes passion » avec René et sa femme.

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Début de la découverte : le (fameux) marché aux truffes international de Richerenches que j’ai vu plusieurs fois à la télévision en janvier ; mais là, ce n’est pas du cinéma, mais du vrai. Les courtiers ont sagement aligné leur véhicule de chaque côté de la rue, le coffre arrière ouvert cachant la balance, les truffes et les boîtes de billets de banque, de beaux billets verts que je n’ai jamais eu occasion de tenir en main.  Beaucoup de monde, des touristes, des vendeurs de truffes, des acheteurs mais pas de brouhaha, des chuchotements, des coups d’oeil entendus ; on se connait, on se comprend. René fait d’abord le tour du marché pour estimer le cours du jour. Il n’a qu’un petit sac de truffes mais ce sont de belles truffes, grosses et bien noires. L’odeur si caractéristique prend aux narines. Nous serons bientôt capables de reconnaitre à l’odeur la Tuber Mélanosporum de la brumale qu’il vaut mieux manger presque crue. En parcourant l’autre allée réservée à la vente aux particuliers, on détecte les vendeurs peu scrupuleux, ceux qui vendent trop cher des truffes trop petites, ou gelées tout en faisant une publicité tapageuse. Les cours des professionnels varieront autour de 500€ le kg. Les truffes partiront le jour même vers Paris ou les grands retaurants. Acheteurs ou vendeurs, mieux vaut qu’ils soient bien escortés en quittant les lieux.

« Tuber Melanosporum. La truffe appartient à la famille des ascomycètes. C’est avant tout un champignon vivant sous terre. […] il a besoin d’un arbre hôtes et saprophyte car il se nourrit de matières organiques de végétaux en décomposition. La naissance de la truffe est avant tout une symbiose avec l’arbre hôte. Une fructification d’un mycélium se développant au contact de l’arbre. Les arbres hôtes qui lui sont indispensables sont dans notre région les chênes verts (yeuse, kermès) et chênes blancs (pubescent ou pédonculé) ». Informations extraites du site truffes.org sur la truffe et son cycle de reproduction. Un commerce autour des plants truffiers est d’ailleurs florissant ; et comme il faut 10 ans pour qu’il produise, il est probable que les réclamations ne seront guère possibles…

IMG_0040.jpgPour le repas aux truffes, René arrive dans la tenue de la confrérie du diamant noir qui défend et promeut la truffe Tuber Mélanosporum, la truffe du Périgord. Il a de la classe. Intronisé au grade de Chevalier, chaque confrère est promu après cinq ans de fidélité au grade de dignitaire, après dix ans de fidélité au grade de vénérable. La tenue de fête des confrères se compose d’une grande cape noire doublée de gris, d’un chapeau noir en feutre modèle « mistral » et d’une médaille en étain, supportée par un ruban de moire jaune-or barré d’un cordonnet noir. Seule une distinction permet de reconnaître les Dignitaires (barrette sur le ruban), les Vénérables (feuille de chêne en étain sur la cape), des Chevaliers.

IMG_0072.jpgLe midi même c’est le repas aux truffes. Autant René est bavard et expansif, autant Suzanne, notre cuisinière – fait preuve de sobriété et discrètion. Elle a progressivement introduit la truffe dans ses mets : d’abord de manière subtile, toasts au beurre truffé, courge (c’est ce que j’ai le moins aimé : la courge n’a pas bénéficié de l’arôme de la truffe), champignons de Paris hachés qui n’ont plus rien de communs, truffes en chausson, puis dans des cardons, du fromage de camembert fondu, une purée de pommes de terre et céleri et finalement dans la fameuse omelette aux truffes où le goût prononcé devient une évidence sans choquer (Recette de l’omelette aux truffes). C’est un régal pour les papilles.
L’après-midi, après la visite impromptue d’un artiste qui construit des meubles en carton, du musée de la soie, et de quelques caves de Côtes-du-Rhône, nous rentrons au gite passer une excellente soirée aux discussions variées et animées, pas forcément autour de la truffe. Nos hôtes s’intéressent à tout.

IMG_0048.jpgIMG_0060.jpgLe lendemain, c’est la démonstration de cavage avec un chien dressé spécialement à la recherche de truffes. Le mistral souffle très fort après une journée particulièrement pluvieuse. Le sol est détrempé et Lola a bien du mal à positionner sa truffe (?) sur la truffe : elle ne se trompera qu’une fois et en mangera une autre. René met dans la poche droite la truffe marquée, et dans la poche gauche les récompenses qu’il donnera à sa chienne chaque fois qu’elle trouvera le précieux champignon. En une demie-heure, malgré les conditions météo défavorables, il ramassera 200g de truffes que nous nous empresserons d’acheter. La matinée se terminera par la visite de la volière, l’ancienne bergerie et des gros engins pour les vendanges.

Le cavage avec René (vidéo au format mpeg 6Mo environ, soyez patient) : picouloun à la main, le caveur cherche la rabasse

Pour les amateurs de curiosités, il ne faut pas rater la messe des truffes de la Saint Antoine, dans l’église de Richerenches. « La particularité de cet office ? Ceux qui le peuvent donnent une truffe en lieu et place de la traditionnelle monnaie ! C’est alors que les membres de la confrérie du Diamant Noir et de la Gastronomie sortent de l’église, en costume d’apparat, et se dirigent vers l’hôtel de ville où les truffes recueillies pendant la messe sont vendues aux enchères avant que l’apéritif ne soit offert. » Cette année, la récolte n’a pas été très grosse, effet de la crise sans doute. Extrait du dauphiné libéré du 16 janvier 2009

Dossier gastronomie 2010 dont la truffe noire

Un week end authentique qui nous a permis d’apprendre, comprendre et partager de grands moments avec un passionné de la truffe ; même s’il est un incomparable commerçant, je lui pardonne volontiers tant il est honnête, passionné et attentif au bien-être de ses pensionnaires. Pas de randonnée mais un excellent week-end découverte.

Site la Grand’Grange de René et Suzanne

18 circuits pédestres dans l’enclave des papes (Visan, Grillon, Valréas, Richerenches)
Le chateau de Suze la Rousse, PAPY84 (geocaching)

©copyright randomania.fr

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Une réflexion sur « A la découverte du diamant noir »

  1. nous n’étions pas allés si loin pour voir le marché aux truffes et celui d’Aups ressemble à la description que vous avez fait de celui de Richerenches

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