--- Saisie d'un commentaire en bas de page ---

Bayons, le chemin de fer de la Combe


Cette année, j’ai renoncé à ma semaine de rando liberté à cause de ma chute de juin ; il s’agit de tester ma hanche droite. Je n’ai trouvé qu’un séjour de deux nuits à la maison des hôtes de la Motte du Caire que je connais bien ; j’aime la simplicité, l’accueil, le prix. Autour du repas du soir, l’ambiance conviviale est assurée par les pilotes de vol à voile qui ont toujours de nombreuses anecdotes à raconter. Ce qui peut être gênant pour certains, c’est que, selon votre opérateur de téléphonie, vous n’aurez quasiment jamais de réseau ; ce fut mon cas avec Bouygues.

Petit passage à l’office du tourisme du tourisme pour trouver une petite randonnée : une charmante dame me remet une fiche imprimée : le chemin de fer de la Combe au départ de Bayons. Le titre est déjà prometteur. Pour rejoindre Bayons, petit village des hautes terres de Provence, il faut emprunter des petites routes de montagne, étroites, sinueuses et peu fréquentées, parfois jonchées de cailloux et de petites pierres tombées suite aux dernières pluies. Le balisage jaune est bien fait : par deux fois j’ai eu un doute facilement levé avec la carte.

Eglise de BayonsLe clocher élancé de l'égliseDépart du parking de l’église de Bayons, près de la fontaine où trône un tilleul tricentenaire planté à la révolution française. J’entre dans l’église romane Notre-Dame de Bethléem (classée M.H. dès 1891) par un portail plutôt gothique du XIVè, célèbre pour son retable du début du XVIIIè : trois compartiments de toile peinte dont la centrale figure l’adoration des mages (classement 1936). Le retableIl semblerait qu’il soit l’oeuvre d’ateliers régionaux. Avec son  clocher élancé et sa façade bicolore, on reconnait déjà l’art roman alpin. Son plan serait identique à celui de l’église de Seyne : tandis que l’architecte construisait celle de Seyne, son fils construisait celle de Bayons… Autrefois rattachée au diocèse d’Embrun, Bayons avait deux paroisses : celle de Bayons et celle du hameau de la Combe comptant 206 habitants en 1861 selon l’abbé Féraud. Une école y a même fonctionné jusqu’en 1910.

la stèle dédiée aux morts de la barbarie allemande Démarrage bien tranquille sur la route qui traverse le village  ; je passe devant l’imposante stèle et sa croix de Lorraine en hommage à ceux qui sont morts durant la seconde guerre mondiale, en particulier les 26 et 27 juillet 1944.

Le 26 juillet 1944, tôt le matin, les forces allemandes cantonnées à Sisteron, progressent vers Bayons, passent la clue sans encombre. Une autre colonne allemande est déjà en place à Frayssinie et Astoin. Ils arrosent méthodiquement tout le secteur de la bergerie centrale de Tramaloup où l’état-major du maquis s’est installé fin juin 1944. Ceux qui venaient d’être libérés de la citadelle de Sisteron sont massacrés sur place. Les résistants se replient vers Seyne et la Cassine.
On dénombre 24 victimes : 9 maquisards, 10 anciens détenus à la citadelle, les trois frères Pustel de la ferme des Roches [ndlr : à droite sur le parcours] et un inconnu. On ne saura jamais la cause du massacre : poste de garde inefficace ou trahison ? D’après les chemins de la Liberté sur les pas des résistants de Haute-Provence, ADRI/AMRID, Editions Gallimard, 2004

Paysage dénudéAu croisement avec la D1, le GR6 du Tour des Monges prend la relève. je passe le gué sur la Sasse (masculin ou féminin ? parfois écrit le Sasse sur les cartes), près d’un ancien pont métallique sur la Clastre. La piste croise d’abord l’accès à la ferme des Roches, désormais barré, puis rejoint la ferme ruinée située dans le vallon de l’Adret. Ses pentes dénudées, exposées au soleil et au vent, contrasteront avec la piste du retour.

Mur de soutènement de l'ancienne voie ferréeUn imposant mur de soutènement, en partie écroulée, est bien visible : c’est celui du chemin de fer à vapeur de la Combe (1920). Le bois exploité pour la construction (étayage galerie de mines, poteaux télégraphiques, traverses de chemin de fer,…), était descendu par câble téléphérique jusqu’à la Basse-Combe, quelques kilomètres à l’est. A partir de là, pour le descendre jusqu’au sud du village, une voie de chemin de fer avait été aménagée en 1925. Ce dur labeur était réalisé par des bûcherons ou charbonniers immigrés piémontais. C’est le seul vestige que je trouverai sur place. Sur la carte aérienne de 1948, je chercherai en vain la trace de la saignée qui fut pourtant nécessaire pour définir le tracé de la voie.

Un arbre bien largela Grande GautièreAprès la pause pique-nique face à la Grande Gautière occupée par des masses de gypse (le gypse sert à fabriquer le plâtre), je continue le GR6 jusqu’au gué sur la Sasse ;  si j’avais continué, j’aurais  rejoint les hameaux de Basse-Combe puis Haute-Combe qu’empruntaient les anciens pour rejoindre Selonnet ou se rendre à la foire de Seyne.

le véhicule abandonné dans les terres noiresAbreuvoirsPiste en forêtAprès un passage dans les terres noires, passage annoncé par un vieux véhicule abandonné, le sentier s’affaisse ou semble se dissoudre dans la poussière ;  petit à petit, il pénètre dans un sous-bois de plus en plus rafraîchissant ; plusieurs abreuvoirs se succèdent sur le bord de la piste, les vieilles baignoires faisant souvent l’affaire.

Arbre écroulé sur le torrentRocher écroulé dans le torrentDemi-tour après le gué pour descendre par la piste de la Grande Cabane (attention, balisage jaune équivoque incitant à continuer à droite). A plusieurs endroits, les abords de la tumultueuse Sasse se sont écroulés, laissant en contre-bas de grosses pierres, mettant à nu les racines des arbres et constituant donc un danger pour la stabilité du sentier ; quelques arbres sont tombés en travers de la rivière. J’imagine donc facilement la catastrophe de 1492 : une coulée de boue dévasta les terres, détruisit les maisons et causa de nombreuses victimes. En 1867, une tempête emporta le pont de la Sasse. L’O.N.F. lutte contre ces débordements torrentiels dus à l’érosion et au déboisement des pentes par des travaux de reboisement et restauration des terrains.

Ainsi le désastre de Bayons, le 24 juillet 1942, où le Mardaric emporta blés, vignes, bois . . . formant une vague de 15 à 16 mètres de haut qui écrasa le village de Bayons. Extrait d’un document de F Combe

Géologie des MouresGéologie contrastée au pied des Moures : dans la dernière partie de l’ère tertiaire, l’ensemble plissé, déplacé est enfoui sous la nappe de Digne ; au dessus des couches de teinte rouge des sédiments, on peut voir des calcaires clairs, des gypses et le corps principal de la nappe de Digne composé de calcaires et marnes sombres. Massif des Monges à pied, à VTT, à cheval, à raquettes à neige, ADRI, les Alpes de Lumière, SIVU Barles, FFRP, 1997
Géologie de Bayons sur le site geol-alp

Retour au gué sur la SasseTranquillement, je longe le torrent jusqu’au niveau du gué à partir duquel le retour est identique à l’aller. La chaleur renvoyée par la chaussée est pesante pour les jambes ; je me rafraîchirai donc  à la grande fontaine (eau non contrôlée) et ferai une pause sur le banc tout proche.

Celui qui aime enrichir ses balades de patrimoine local sera déçu ; l’amateur de géologie ne le sera pas, le vacancier tranquille appréciera les sentiers peu fréquentés de cette partie de la Haute-Provence où il fait beau l’été. Cette balade facile est en tous cas assez contrastée pour que l’on ne s’ennuie pas.

chemin fer combe_trace_panoImage de l’itinéraire 11km700, 3h déplacement (3h45 au total avec les arrêts), 201m dénivelée (+220, -220 environ)

©copyright randomania.fr

Partager sur FacebookPartager par mail

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *