Quand trois amateurs d’histoire se retrouvent pour une randonnée, devinez ce qu’ils vont voir ? une ligne de plus de 400m de long, représentée par une arête de poisson sur la carte IGN ; la légende : ‘levée de terre’.
Le programme que nous a préparé estoublon ne manque ni de surprise, ni d’intérêt. Il conjugue circuits à pied et en voiture sur une journée.
Départ de Céreste près de la chapelle ; nous passons sur le pont de la Baou ni roman ni romain (pas même situé sur la voie domitienne), bien que ce nom figure toujours sur les cartes IGN et les cartes postales ! le panneau d’information le confirme : il date du milieu du XVIIIè siècle. Un devis est établi par Georges Vallon, ingénieur de la Province, les travaux sont confiés par acte du 4 janvier 1740 à Pierre Terras, maçon de la ville de Reillanne (A.D. des A.-H.-P. C84).
La trace du vrai pont romain a d’abord été retrouvé sur papier, aux archives en 1989 puis confirmé sur le terrain le long de la RN100, à la faveur d’une crue d’orage. La 4ème campagne de sondage, en 2001, révèle que faute de rocher solide pour asseoir le pont, les constructeurs l’ont bâti sur un socle de pierres taillées de grand appareil à joints fins liées par des agrafes scellées au plomb. Son architecture est à ce jour unique dans le monde romain. par mesure de protection, ses vestiges sont maintenant recouverts. Voir photos des fouilles
Nous délaissons le GR4 peu après la ligne de chemin de fer. Nous continuons en direction du lieu-dit les Blaques1 (ne pas suivre Champet). Passage devant un vieux puits puis le long d’un grand champ tacheté de jaune annonçant le printemps. Un mur de pierres sèches grossièrement posées ; un tumulus de pierres et de terre : cabane écroulée, simple entassement de pierres pour qu’elles prennent moins de place ou… véritable témoignage de la civilisation des tumulus ?
Nous passons devant une cabane de pierre sèche à l’intérieur de laquelle un banc de pierre est aménagé. Son linteau n’est pas de pierre mais composé de trois grosses poutres de bois ; faute de grosses pierres aux formes régulières, de petites pierres plates comblent l’espace vide entre les blocs du chaînage d’angle de l’entrée.
Commence alors un cheminement compliqué à travers bois, contournant les arbres, passant sur les branches mortes, évitant les clôtures et tas de pierres, uniquement guidé par le GPS pointant sur la fameuse ‘levée de terre’. Nous arriverons finalement au milieu de celle-ci, au milieu d’un immense rempart de pierres encore entassées sur plusieurs centaines de mètres de long ; autrefois de 3 à 5m de haut, et 10 à 20m de large, c’est aujourd’hui un rempart écroulé dont on peut évaluer l’importance par le volume de pierres demeurant sur le site ou bien s’il est vu d’avion (photo de droite). Une construction humaine incroyable. Parcours cahotique sur le haut du rempart, observant avec curiosité des repères scellés (posés par les archéologues ?) et de vastes trous qui pourraient matérialiser l’emplacement d’anciennes tours. Pour défendre leur position, les tribus de l’époque construisirent un mur fortifié sur l’éperon rocheux à la sortie ouest de Céreste au lieu dit le Grand Clapier2. Nous sommes à l’oppidum3 protohistorique des Blaques (Vè siècle avant JC) contrôlant le confluent Calavon-Encrême et barrant l’éperon des Epinettes. Il fait face, sur la colline d’en face, à l’oppidum de la Vache d’or à Viens. « Montagneux dans sa majeure partie, sauvage et couvert d’une épaisse forêt de chênes propice aux embuscades, le pays des Albiques offrait en effet un grand nombre de sites perchés qui avaient été solidement fortifiés ». Histoire du Lubéron
Voir aussi le chapitre sur La vérité sur les gaulois – L’oppidum du peuple, Vincent Guichard, Le nouvel observateur, hors-série, M02802, juillet-août 2011, pp. 29-31
Dans le cas le plus fréquent, ils [les oppida] sont bordés sur deux ou trois côtés de falaises et seul le côté accessible est défendu par un ou plusieurs remparts de pierre sèches ; c’est le type de l’éperon barré. G. Barruol
Philippe BOISSINOT, Dominique PEYRIC, Une enceinte exceptionnelle du premier Âge du fer au nord du Lubéron : Le Grand Clapier à Céreste (Alpes-de-Haute-Provence), Toulouse : Archives d’Ecologie Préhistorique, 2009
Nous atteignons la pointe des Epinettes. Estoublon nous indique la tour de gué, l’ancienne ligne de chemin de fer Cavaillon-Volx et sa gare, l’emplacement d’un autre oppidum, le village de Viens, la via Domitia. Nous prenons notre pique-nique face à ce vaste paysage avec la fierté d’être les seuls à le contempler à cet instant.
Nous longeons la crête en marchant sur le rebord de la falaise ; en dessous de nous, de vastes grottes creusées par l’eau. Au bout du chemin qui aboutit dans une clairière, les ruines de la ferme de Bontemps s’étalent largement dans la plaine.
Puis nous entamons la descente sur une piste forestière dallée de marches calcaires naturelles. En bas de la pente, une bergerie récemment restaurée puis une cabane de pierre sèche… plutôt humide. Nous longeons un grand champ avant de rejoindre les Blaques et le chemin de l’aller. Un retour non préparé tout à l’intuition et au GPS.
Nous reprenons la voiture pour découvrir la tour d’Embarbe qui se trouve sur une propriété privée. Son donjon, de plan circulaire, la daterait du XIIIè, ou XIVè siècle : des archères maintenant bouchées, en sont la preuve. Elle est fissurée à deux endroits sur une bonne partie de sa hauteur. A l’intérieur, un escalier de bois en colimençon grimpe jusqu’à l’étage où devait se trouver le plancher. Que pouvait-elle bien surveiller de cet endroit qui n’est pas le plus élevé ?
Dans le quartier Saint-Sauveur, près de la tour d’Embarbo, ont été trouvés des tuiles, céramiques et substructions : il pourrait s’agir de vestiges d’une agglomération gallo-romaine correspondant à la station (controversée) de Catuiaca que les itinéraires situent entre Apta Julia et Alaunium. D’après Raymond Collier
… ce qui est en contradiction avec
…en contre-haut de la voie Domitienne et du relais de Catuïaca, juste au carrefour de la vallée du Calavon et de la piste rejoignant Vitrolles par le vallon des Roumis […], il [le site remarquable de la Tour d’Embarbe] fait face de surcroît aux deux formidables oppida de la Vache d’Or à Viens et des Blaques à Céreste. […] aucun témoin de l’époque romaine n’y a été retrouvé, et même le donjon médiéval, […] pose encore de sérieux problèmes de datation. Histoire du Lubéron
En route pour Courennes partagée en deux hameaux sur la commune de Saint-Martin de Castillon (84) traversée par la Via Domitia : les Basses Courennes et les Hautes Courennes. Une piste cabossée tout en virages mène directement au village sans être obligé de passer par le nord. Une courte balade à pied nous mène à la chapelle. Nous déambulons le long du cimetière, tout en échangeant nos impressions : « mais pourquoi les tombes ne portent-elles que le prénom du défunt ? ». Nous ne trouvons aucune réponse satisfaisante. Cependant, un monsieur assis sur le banc contre la chapelle, se propose de nous donner la réponse : « Ce sont les pensionnaires de la communauté de Berdine, que l’on ne connait que par leur prénom, leur identité d’avant n’ayant pas d’importance ». Et commence une belle histoire, celle d’une association venant en aide aux personnes en difficulté, que l’on guérit sans médicament, uniquement par le travail et l’intégration dans la communauté. Sont interdits : l’alcool, la drogue, la violence, les médicaments psychotropes, l’argent personnel à disposition. L’Association Berdine, située à la bergerie de Berdine, restaure et construit aux Courennes, sur ce plateau du Lubéron isolé et sauvage. Elle vit de la vente de légumes, bois, fromages de chèvre et pain.
À tous ceux-là est offerte une chance de reprendre un chemin par le travail, la vie communautaire, le contact humain, les soins assurés, etc. Et comme rien de solide ne peut se faire dans le désordre et l’anarchie, une règle de vie stricte est imposée. Extrait de J’ai dit oui à Berdine, M.A. Perrot
La chapelle de Courennes est fermée. Sur une plaque de marbre noir fixée sur le grand mur face au cimetière, sont marquées en lettres d’or ‘Thibirine – Berdine’ et une épitaphe à quelques frères disparus. Pour comprendre ce rapprochement lire Thibirine : les veilleurs de l’Atlas.
‘1873’ est gravée sur une grosse pierre du mur d’enceinte : date de restauration, sans doute. Quelques rares messes y sont parfois célébrées. La chapelle Notre Dame de Courennes sur le site chapelles en Provence.
Image de l’itinéraire chapelle de Courennes 900m A/R 30mn 6m dénivelée
Entre Alpes de Haute-Provence et Vaucluse, une randonnée inédite, réservée aux amateurs d’histoire locale et de jolis villages de pierres en Luberon. Plusieurs tracés possibles pour atteindre l’oppidum : à vous de trouver ! Merci à estoublon pour la préparation de ce circuit.
Geocacheurs, profitez d’être dans le village pour trouver la cache GC1MV8W Via Domitia #3 : Céreste, par Bob_13 et la cache GC2DY2C le tunnel de Céreste par estoublon.
Circuit oppidum des Blaques 8km450 2h40 déplacement (4h30 avec pique-nique) 219m dénivelée
1blaque : chênaie
2clapier : tas de pierres
3oppidum (du latin n. oppidum, pl. oppida : lieu élevé, fortification) : lieu élevé dont les défenses naturelles ont été renforcées par la main de l’homme au temps des Celtes. définition extraite du site techno-sciences
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bonjour
Il y a de cela 40 ans, Monsieur Cirugue, alors conservateur du museum d’Aix, m’avait indiqué l’emplacement de la découverte qu’il avait faite à CERESTE prés de Forcalquier.
Il s’agissait d’une dalle dans laquelle étaient des empreintes d’animaux genre dinosaures. On voyait très nettement le drame qui s’était produit il y avait des millions d’années. Sans doute poursuivie, la bête ayant dérapé, sa queue avait laissé son empreinte .
Je m’y étais rendu avec la carte d’état-major sur laquelle il m’avait tracé de sa main l’itinéraire mais je l’ai egarée, et lorsque récemment j’ai voulu y retourner, je ne me suis pas souvenu de l’endroit
Se pourrait-il que quelqu’un sache ?
Lors d’une randonnée à Céreste j’avais découvert cet immense tas de pierres sans savoir que cela avait été un rempart !