La calanque de l’Escu… et vue sur la sortie des égoûts de Marseille


img_0011.jpgimg_0014.jpgDépart du  col de Sormiou à 9h précises ; nous sommes tous emmitouflés avec gants, bonnet et écharpe et pourtant deux irréductibles forumeurs marseillais se distinguent : l’un en T-shirt, l’autre en short. Ce sont stoko et titidegun.
Nous commençons par longer l’extrémité ouest de la crête de Sormiou sur une arête étroite ; au loin, au bas du vallon du pignet, le baou Trouca, laisse filtrer un rayon de IMG_0013.jpgsoleil. Plus près de nous, un autre rocher troué n’a pas de nom : et si on le baptisait « la fenêtre du Pignet » ? Stoko, spécialiste des plantes des calanques, nous parle de plein de plantes mais je n’en ai retenu que deux ! faudra que je révise lors d’une prochaine randonnée.

  • Quercus coccifera : « au début du XIXème siècle, vingt tonnes de cochenilles du chêne kermès étaient ramassées chaque année dans tout le département pour fabriquer le «rouge» des teinturiers (couleur vermillon). Les tans – écorces pulvérisées – les plus recherchés par les tanneries proviennent essentiellement du kermès et du chêne yeuse. L’écorce de pin était aussi utilisée dans ce but par les pêcheurs sur les filets ». Extrait du site du GIP des calanques.
  • Le genévrier cade, lui, servait à fournir l’huile de cade utilisée en dermatologie humaine et animale (pour plus de précision voir la note sur l’arche d’alliance dans le Var). « Le bois de cade brûlé passait aussi pour être un excellent désinfectant, il a pu ainsi être utilisé, sans effet néanmoins, lors de la grande peste de 1720 à Marseille, où de grands feux avaient été ainsi allumés en ville pour l’enfumer, sur les conseils désastreux d’un médecin ». (Stoko)

IMG_0026.jpgDans la descente, l’odeur d’égoût monte aux narines. Au loin la calanque de Cortiou vomit un flot de couleur brune qui détonne au milieu de l’eau si bleue. C’est la sortie des eaux usées du grand émissaire de Marseille. Un sentier de pêcheurs à peine visible y mène : c’est sûr, les pêcheurs ramenaient du poisson de cette calanque. Avait-il le même goût qu’un poisson pêché au large ?…

L’état sanitaire de Marseille était déplorable au début du XIXème siècle. Après deux épidémies de choléra en 1834 puis 1884 ; 1899, mise en service du grand émissaire de Marseille pour les eaux usées et eaux pluviales ; le Vieux Port cesse d’être le dépotoir de toutes les eaux usées. De 1973 à 1976, ce sont les travaux du second émissaire.

Cortiou la promenade la plus TRASH

Le projet qui veut expédier nos égoûts loin de Marseille, La Provence, 21 janvier 2008
La plus grande station d’épuration souterraine au monde fonctionne à Marseille, MSN Actualités, la chaîne Verte, 21 février 2008
La station d’épuration Géolide (180 millions d’euros) peut traiter beaucoup plus efficacement les eaux usées de 1,6 million d’habitants.

img_0037.jpgimg_0049.jpgLa descente n’est pas facile ; raide, elle s’apparente parfois à de l’escalade. Plus nous avançons, plus le paysage devient sauvage. Le large et sauvage cirque des Walkyries nous domine. Stoko nous signale qu’y vit le molosse de Cestoni de 50cm d’envergure (dis Stoko, tu n’exagerais pas un peu ? 40cm serait déjà bien grand).

molosse_cestoni_museum_bourges.jpgLe molosse de Cestoni (Tadarida, Teniotis), la plus grande chauve-souris d’Europe, espèce protégée, est présente dans le cirque des Walkyries (pas étonnant, ici, elle a peu de chances d’être dérangée…). Depuis 1980, 9 sites d’observation ont été repérés dans les Bouches-du-Rhône (source : Faune de Provence, Conservatoire d’Etudes des Ecosystèmes de Provence, 1997). J’ai mis côte à côte deux doubles décimètres pour imaginer ce que ça ferait si elle m’arrivait de face : je crois que je ne serais pas rassurée du tout… Le molosse de Cestoni, fiche du parc national du Mercantour

img_0051.jpgLe long du sentier, le premier de cordée repère un nid de chenilles processionnaires ; le téléphone arabe fonctionne bien et se transmet jusqu’au dernier ; tout le monde pourra faire une photo. Elles causent de très importants dégâts en broutant les aiguilles sur les arbres, qui s’en trouvent fortement affaiblis. N’y touchez pas : ces chenilles sont urticantes.

IMG_0102.jpgimg_0034.jpgAprès le col de Cortiou, nous délaissons le pas inférieur de la Melette pour se rapprocher de l’anse de la Melette et son ilot ; au loin d’île de Riou aux formes découpées si caractéristiques, était autrefois reliée au rivage. Elle l’est toujours mais la mer a envahi le plateau des chèvres depuis des milliers d’années. C’est au large de cette île qu’a été retrouvé l’avion de Saint-Exupéry (vous trouverez un lien vers cette découverte dans la note sur la calanque de Marseilleveyre).

Quelques photos du coin sur Marseille forum
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Les pigeonniers de Limans


IMG_0703b.JPGLimans : cela surprend de découvrir autant de pigeonniers(16) dans un si petit village (73 maisons en 1698, 534 habitants en 1851, 345 en 2006 ; 14 habitants au km2), et en plus en bon état. La plupart datent des XVIème et XVIIème siècles et comportent des corniches à gorge soigneusement taillées. Les chambres des pigeons sont tapissées d’alvéoles superposées, les boulins, où pondent les oiseaux. Les plus pauvres sont en osier ou en bois ; dans les constructions les plus soignées, ils sont en terre cuite ou plâtre. C’est Joseph Palamède de Forbin qui était seigneur de Limans, comme il l’était de Janson, Villelaure ou Mane. « Pour les pigeonniers d’époque féodale, l’on peut lire le rang du seigneur en fonction de la forme de la girouette ».

Le plus remarquable est celui du Curé-Martin, à quatre niveaux superposés sur quinze mètres de haut, avec le deuxième étage accessible par un escalier externe (date 1553 sur le porche), le troisième par un escalier à vis intérieur, et le dernier par une échelle. Pays de Lure, Forcalquier, Manosque Et de Giono, P. Ollivier-Elliott, edisud, 2000

Les pigeonniers provençaux, Claude Mesnil avec un plan de Limans et les points de visite

C’est sur la page de l’Histoire de Limans, site bassesalpes.fr, que j’ai appris comment était rémunéré l’ instituteur par les parents au XVIII °s. « l’on faisait une distinction entre les enfants debout (3 sous) et ceux qui pouvaient s’assoir (5 sous) ».

Conseillés par l’office du tourisme de Forcalquier, nous choisissons le ’18 : tour des Ybourgues’ (image de l’itinéraire des pigeonniers), 8km (et non 5) de 3h00 avec les arrêts (et non 2) avec une belle dénivelée de presque 300m (pas si facile), et que j’aurais plutôt appeler « La boucle des pigeonniers ».

La météo aujourd’hui à cet endroit
Avec la température ressentie

Histoire :

IMG_0187.jpgSelon les coutumes féodales, il fallait être seigneur d’un fief et exploitant d’un domaine pour avoir droit de colombier, les pigeonniers « sur pied » ou indépendants des autres constructions étant l’apanage des grands fiefs. En haute Provence au contraire, ils étaient exclus des privilèges seigneuriaux depuis les lettres patentes de 1685 : « on tient que si le seigneur n’est point fondé en droit ou possession de prohiber à ses habitans de construire des colombiers de toute espèce, que dans le pays on appelle colombiers à pié ou à cheval, […], les habitans peuvent en faire construire sans son consentement, pourvu que ces colombiers n’ayent ni crénaux ni meurtrieres, qui sont des marques de noblesse. » (Encyclopédie Diderot, 1ère édition, Tome III). En 1736 pourtant, l’économe de l’Ordre Saint-Jean de Jérusalem essaya de faire détruire le pigeonnier de M. Eymar à Lardiers mais il ne réussit pas (Département des Bouches du Rhône : Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790 série Crédigé par M. BlancardP.Dupont, 1865-1892). Avec le nouveau code rural en 1791, il est autorisé de tirer le pigeon durant les périodes de moisson. Au XVIIème siècle on estimait le nombre des colombiers en France à 42 000.

Construction :

  • Toujours à côté des champ de céréales
  • Corniches, murs lisses afin de prévenir l’intrusion de prédateurs (rats, belettes…)
  • En Provence, l’orientation au sud et les murs surélevés au niveau du toit protègent les oiseaux du mistral
  • Plan circulaire pour les structures intérieures du pigeonnier, forme la plus rationnelle pour l’exploitation qui demande une visite régulière des nids, le nettoyage, le prélevement des pigeonneaux ou des œufs
  • A l’intérieur, trémies à grains et abreuvoirs ; sol dallé pour recueillir la fiente

Le plus grand pigeonnier du monde, Palomar de la Breña (7770 boulins), Espagne

IMG_0688.JPGIMG_0194.jpgLa balade commence fort : depuis le village, une montée continue pratiquement sur la moitié du parcours, mène au point culminant  de la randonnée à 816m. Au loin les eaux du barrage de la Laye (1959 à 1974) miroitent au soleil. Les vaches sont sorties pour la première fois dans les prés. Au lieu dit Tècle, je ne peux qu’admirer la grande bergerie en pièrre sèche (ou étable ?), aux pierres admirablement alignées sur les plans vertical et horizontal. Un travail de pro pour un bâtiment aussi grand.

Utilité du pigeonnier :

  • Engrais : Les déjections des pigeons appelées colombine, riches en azote et en acide phosphorique, servaient d’engrais, et à la production de salpêtre pour faire de la poudre à fusil.
  • Nourriture : « Ainsi un pigeonnier de cinq cents nids pouvait donner 160 pigeonneaux par semaine. C’est aussi une viande disponible toute l’année, les pigeons pouvant être facilement nourris avec du grain lorsque les conditions atmosphériques empêchent leur alimentation dans les champs. C’est une viande facilement conservable et transportable sous forme de pigeons vivants, dans des cages en l’absence de système frigorifique. Les pigeons sont vendus vivants au marché, tués et consommés au fur et à mesure des besoins » . Source : histoire des pigeonniers, de P. Cousin
  • Mèdecine : Pour garder que les cheveux tombent, de la fiente de Colombe desséché fera merveille”. Pierre de Bourgarel, Seigneur du Colombier à Vachères vers 1650, dans « Remèdes tant pour les bêtes que pour les gens, de feu mon père que Dieu absolve » ; Celse recommande le foie de pigeon, récent et cru, mangé pendant longtemps, contre l’ictère . Source : mini eco musée des pigeonniers de Haute-Provence

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IMG_0692.JPGLes premiers arbres en fleurs et les première fleurs de printemps sont enfin sorties de terre (crocus). A travers les sous-bois, nous cherchons le balisage jaune ; il nous faut passer sous la cloture électrifiée d’un propriétaire.

IMG_0695.JPGIMG_0697.JPGAprès une raide descente jusqu’au hameau d’Ybourgues, nous cherchons les pigeonniers. Ce qui frappe, c’est la qualité des constructions de pierre, leur caractère authentique, leur restauration dans l’esprit du passé, sans ajout de ciment ou matériau moderne. La ferme fortifiée classée monument historique, a été soigneusement remaniée : citerne couverte, ruines d’un four, resserre à outils, cuisine. Le pigeonnier proprement dit se gagne par un escalier construit dans l’épaisseur même du mur. En haut de cette tour, des archères laissent supposer que le bâtiment a pu avoir un rôle défensif. Un mixte entre manoir rural et maison forte. Les fondations remonteraient au XIIIème siècle, selon le site Belvédair  qui a depuis supprimé l’article.

IMG_0696.JPGAprès un petit rafraichissement près de la fontaine du hameau, nous rejoignons le GR6 qui nous ramènera au village par un sentier plus facile qui longent les prés. Après la cache d’estoublon les pigeonniers de Limans, la petite visite de la tour de guêt à côté de la calade qui servait d’aire de battage, nous repartons pour Ongles et le village abandonné de Vière.

Cette surface plane recouverte d’une calade servait à faire sortir le grain de l’épi. En Provence, ce procédé consistait à faire piétiner les gerbes par des juments, chevaux, boeufs,… Elle se trouve dans un endroit dégagé et exposé au vent dominant pour faciliter la ventilation du grain.

IMG_0703.JPGLimans c’est aussi :

  • Radio Zinzine, radio autogérée, libre, créée en 1981, sans aucune publicité, 24h/24 et 365 jours par an, dont le principal studio est à Limans.
  • le lieu d’implantation de la première communauté Longo Maï

La chapelle Saint-Quinis


img_0379r.jpgimg_0381r.jpgNuageux avec quelques ondées avait dit la météo pour la Provence Verte. Nous décidons de nous lancer sur la barre de St-Quinis dont le point culminant est quand même à 635m d’altitude. Le GPS nous emmène sur le chemin de Saragan ; arrêt brusque et étonnement face au gué sur l’Issole. Le panneau annonçant un danger imminent est implanté à 10m du danger au lieu des 100 à 200 m réglementaires hors agglomération ; debouche_sur_quai_ou_berge.jpgon ne voit plus le gué. Le chemin de Saragan est impraticable. Nous passerons finalement la rivière par le pont dans le village de Sainte-Anastasie sur Issole pour rejoindre la piste des Ribas.

La météo aujourd’hui à cet endroit
Avec la température ressentie

Un diaporama avec de grandes et belles photos de la randonnée, site de randonnées par andraph (un grand merci pour le retour d’informations)

Le sentier passe le long du champ d’atterrissage des parapentes désespérément vide ; le sentier est balisé de jaune : on voit bien les marques ; en haut de la barre rocheuse, quelques chaises vides attendent les spectateurs qui regardent s’élancer habituellement les parapentes. Nous longeons la crête vers l’est, guettant le moment où il faudra obliquer sur la droite. Dès que nous pénétrons en forêt, nous escaladons des rochers moussus et glissants ; enjamber, contourner, sauter, glisser, éviter les obstacles à chaque instant, cela devient dangereux car la pluie n’a pas cessé ; par moment nous regrettons d’être partis. Ce qui devait être des points de vue spectaculaires sur les vignes et les falaises se transforme bientôt en voile humide qui ternit les couleurs de la nature déjà si tristes en hiver.

img_0384r.jpgimg_0387r.jpgEn pleine forêt, plus nous avançons, plus nous cherchons le balisage !  nous nous demandons si nous n’avons pas perdu la trace jaune que baragatti nous invite à ne jamais perdre de vue. img_0393r.jpgIMG_0394r_1.JPGLa végétation est dense et nous devons parfois nous frayer un chemin parmi les ronces et branches basses. Seule l’intuition nous aide à ne pas nous perdre car il n’y a aucune trace de passage visible. Les rochers sont moussus, certains complètement verts.

Au vu de la clairière qui surgit à travers les arbres, nous savons que nous approchons de la chapelle Saint-Quinis, le but de notre promenade. Ce sont les chats qui nous accueillent en recherchant des caresses, puis la chapelle elle-même, simplement fermée par un crochet de fer. Intérieur surprenant mais accueillant. Des dizaines d’ex-voto témoignent de la reconnaissance des croyants à Saint-Quinis, saint dont je n’ai jamais entendu parler mais bien connu dans la région (il s’agit du patron des village de Gonfaron et la Motte). De grands tableaux peints, un bénitier en forme de coquillage posé sur trépied, une statue du saint, quelques livres de prière, sont autant d’invitations au recueillement. C’est si rare de trouver une chapelle rurale ouverte ! Quelques randonneurs ont pu se réchauffer dans l’ermitage à côté où séjourne le père François.

img_0398r.jpgimg_0395r.jpgimg_0400r.jpgimg_0403r.jpg

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