Sainte-Baume : de la grotte de Marie-Madeleine à la grotte aux Œufs


Voilà un lieu où l’on revient souvent au cours de sa vie : j’ai découvert d’abord la grotte de Marie-Madeleine quand j’étais enfant puis retrouvé en mai 2004 lors d’un séminaire professionnel ; en 2006 lorsque j’ai repris la marche (La Croix des Béguines) ; puis sillonné le massif de la Sainte-Baume avec Le Plan des Vaches et Roque-Forcade, Le vallon des cèdres sous la neige, Les sources pétrifiantes de l’Huveaune, Le circuit de la glace dans le Var,…

Aujourd’hui j’y reviens avec André, compagnon de randonnée plus sûr de lui que je ne le suis. C’est souvent rassurant, mais pas toujours…
Nous montons par le classique chemin du Canapé1 aménagé avec de larges marches en montée douce. Il débute à l’obélisque de pierre gravée par les Compagnons du Devoir (dont la patronne est Marie-Madeleine) en 2012. C’est vrai que cette forêt de hêtres pluri-centenaires est impressionnante avec ses hauts arbres et son sous-bois sombre d’ifs et de houx, protégée de toute coupe d’abord par un pape, puis les rois et le Parlement d’Aix. Vous constaterez que l’ONF qui gère la biodiversité, laisse souvent sur place les arbres tombés ou abattus.

Sur l’esplanade, en attendant la fin de la messe, nous regardons la Piéta, passons brièvement à la maison du pèlerin et lisons les informations mises à notre disposition. Un dépliant m’interroge plus que les autres : c’est le chemin de la Consolation (chemindeconsolation@meredemisericorde.org, 06.10.59.16.06), créé en 2015 pour accompagner la douleur des parents face à un enfant non-né, quelle qu’en soit la raison (Interruption Volontaire de Grossesse, Interruption médicale de grossesse, fausse couche, grossesse extra-utérine…)

Visite de la grotte de Marie-Madeleine ; l’eau limpide s’accumule dans deux bassins ; un mur d’ex-voto, le reliquaire est au sous-sol de la basilique ; l’affreuse description réaliste du site geo.fr, pas convaincu : Enchâssée dans un casque d’or, protégée par un globe de verre, la boîte crânienne est intacte. […] A vrai dire, on ne l’aurait même pas reconnue si le reliquaire n’était escorté d’un tube de cristal renfermant un hypothétique lambeau de chair dont la tradition affirme qu’il fut cette petite parcelle du front de la sainte touchée du bout des doigts par Jésus au matin de sa résurrection. 

André propose d’aller jusqu’à la grotte aux œufs ; à peine avons-nous passé la croix qui matérialise le début du sentier, qu’un groupe de randonneurs revient, découragé par les obstacles, considérant que le sentier n’est plus praticable ; si je me pose la question de poursuivre, André est persuadé que c’est faisable.

Quelques mètres plus loin, un balisage brun nous entraine au pied de la falaise, direction Pas de Cabre ; nous redescendons, tournicotons dans les broussailles et les blocs rocheux pour finalement rester sur le sentier du dessous ; totalement en sous-bois silencieux et dense, le sentier est parfois peu visible ; bientôt je repère une palotte marque verte sur la gauche, confirmant que nous sommes sur la bonne voie.

Photo de Syvie

Après 20 minutes de marche, se trouve sur la gauche un petit sentier mal indiqué qui mène, à flanc de falaise aux ruines d’un ermitage du XIVe siècle que m’a gentiment signalé Sylvie dans son commentaire. C’est là que s’est installé, pendant trois ans, le frère dominicain Dalmace Moner (+1341). Pour les coordonnées de l’ermitage lire Du pas de la Cabre au col du Saint-Pilon, selon le martyrologe Bienheureux Dalmace Moner.

Et là les obstacles commencent : branches trop basses pour la tête, passage en dévers sur la pente gauche du sentier, à genoux en-dessous des arbres au sol, parfois au-dessus, escalade sur des rochers avec les mains. Alors quand enfin le but est atteint, j’avoue que je suis rassurée d’être arrivée.

Nous ne sommes pas seuls ; un étranger assis près de son djembe fume, dégageant une discrète odeur de fumée ; nous prenons notre repas avant de mesurer le risque à descendre dans la grotte aux Œufs par les lèvres externes, car, c’est vrai, l’entrée fait penser à un sexe féminin ; avec la forte déclivité, sans corde de 20 m, sans lampe frontale, nous renonçons, mais vous verrez quelques photos sur le site provence-randos.eklablog

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Pain de munition, Citadelle : une demie journée pour deux oppida


Sur toutes les cartes IGN, à Pourrières, est repéré un sommet : le Pain de Munition (612 m), à l’est de la montagne Sainte-Victoire. L’origine latine Petra Munita se traduit par roche fortifiée… Avec la transmission orale, en 1878, le dictionnaire archéologique de la Gaule l’appelle ‘camp des subsistances’, évoquant ainsi un camp militaire et la ration de pain cuit rassis entre bis et blanc qu’on donne à chaque soldat depuis bien longtemps. Ce camp est traditionnellement associé au dernier camp romain établi par Marius avant d’arriver sur les positions de combat contre les Teutons et les Ambrons en 102 av. J.-C. Dans une longue démonstration, avec des arguments géographiques et militaires, les Actes du 88e Congrès national des sociétés savantes, Clermont-Ferrand 1963, Congrès national des sociétés savantes, Impr. nationale, Paris, 1965 tentent d’apporter la preuve que les romains s’y sont retranchés.

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Nous nous sommes garés près de la route D23, à l’entrée d’une piste qui nous mènera au sommet. Très vite sur la droite, dans les bois, d’énormes champignons attirent notre attention : grâce à André qui identifie un agaric, et à son pied qui ressemble à une peau de couleuvre, je pense qu’il s’agit d’un agaric couleuvré dont l’odeur de noix est caractéristique.

Le temps est couvert sur Sainte-Victoire. Le sentier part à l’assaut de la colline  par une marche de trois quarts d’heure dans un maquis de chênes. Le premier mur d’enceinte en pierre sèche, écroulé, est de belle largeur. En descendant, on peut repérer plus ou moins bien, deux autres enceintes : ces trois enceintes concentriques de forme ovale, c’est une configuration unique dans la région. Jusqu’au début du XXe les études n’en avaient recensé que deux. Bulletin de la Société languedocienne de géographie, Volumes 46 à 47, 1947
Selon les Annales de la Faculté des sciences de Marseille, Volumes 13 à 15, Faculté des sciences de Marseille, Imprimerie marseillaise, 1903 ce ne serait pas un simple établissement militaire mais un véritable lieu d’habitation permanente. Je n’ai trouvé aucune trace écrite de fouilles méthodiques : il faut se contenter des armes de métal et poteries romaines qu’on a trouvées en surface.

La vue est imprenable sur la route : un véritable point d’appui pour contrôler un axe de circulation et un carrefour de voies. Les Celto-Ligures avaient le sens stratégique. Var Provence-Info, Julien Peyrié

Habitat et société : actes des Rencontres 22, 23, 24 octobre 1998 : 8700 m2 au sol dont 1600 m2 aire intérieure, soit un oppidum de moins de 1 ha, postérieure à l’âge du Fer.
Dans le compte-rendu du Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistoriques, treizième session, Monaco, 1906, figure la coupe schématique d’un mur du Pain de Munition avec son fossé à gauche (?) ; je suppose que contre le mur était accumulée de la terre et étaient installées des traverses en bois assemblées par de longues tiges de fer.

Après avoir parcouru le sommet et profité d’un paysage à 360° côté Var et Bouches-du-Rhône, nous redescendons la piste rougeâtre jusqu’à la voiture. Un œil curieux dans une faille du karst laisse entrevoir un conduit creusé par l’eau, bien plus profond que ce que laissent supposer les apparences…

Direction La Citadelle à Vauvenargues.

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Carcès, les chutes du Caramy


Une route en rive droite, une piste en rive gauche : c’est cette dernière qu’emprunte le classique chemin de randonnée publié dans le topoguide Le Var à pied qui ne passe plus dans la zone résidentielle ‘le village du lac’ ; à chaque extrémité, un pont franchit la queue de retenue. Elizabeth et moi partons du centre du village ; Carcès me rappelle le récit de cruauté des guerres de religion.

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Le comte de Carcès, Jean de Pontevès, à la tête des catholiques combattait les Razats du maréchal de Retz qui s’appuyaient sur les seigneurs d’Oppède, d’Oraison et le baron d’Allemagne. Les deux camps ravagèrent la Provence, brûlant, violant et perpétrant d’autres cruautés. Une partie de la Provence prit les armes et, en peu de jours, soixante-six ‘carcistes’ périrent devant Cuers, quatre cents furent sabrés à Cabasse et autant trouvèrent la mort devant Lorgues. Toute la garnison du château de Trans fut passée au fil de l’épée et Carcès ne dut son salut qu’à l’arrivée, en Provence, de Catherine de Médicis.

Nous nous sommes garées en face de la maison de retraite ; entre le 29 et le 31 de rue Florentin Giraud, il y a une ruelle qui passe derrière la maison de retraite et longe un petit canal le long des jardins des propriétés privées. Quand nous retrouvons la route, c’est pour découvrir la chapelle Saint-Jaume du XIe siècle (Jacques) dont il ne reste que les murs massifs ; le chemin de Saint-Jacques de Compostelle GR653A y passe bien sûr.

La chapelle saint Jaume, Leloulou et Tem77

La seconde chapelle – Notre Dame de Carami – était entourée d’un cimetière pour les habitants ; pendant la révolution, douze familles l’achètent pour la préserver de la profonation. Elle appartient aujourd’hui à la commune. Quelques photos

Chapelle Notre Dame du Carami, Papounet83

Nous descendons maintenant la route qui mène aux bords du lac, en passant devant un mur exposé au soleil : il s’agit d’un apié (XVIIe) – mur à abeilles en pierre sèche dans lequel des niches étaient destinées à recevoir des ruches.

Une flèche orange rustique au sol, indique la direction des chutes du Caramy. Plus on s’enfonce dans les bois et plus on capte le bruit de l’eau ; le sentier s’éloigne, se rapproche de l’eau jusqu’au chutes du Caramy qui dégringole en plusieurs cascades bien difficiles à photographier derrière les arbres. Nous longeons toujours le canal jusqu’à une martelière derrière laquelle quelques pêcheurs sont installés sur les bords du Caramy. Nous en verrons peu au bord du lac, surtout en cette saison. Que pêche-t-on dans le lac Sainte-Suzanne, seule activité autorisée ?

[2008] L’absence de juvéniles [perches] de 1 et 2 étés laisse présager comme pour le gardon des problèmes de survie […] en lien notamment avec les niveaux d’eau de la retenue.
En ce qui concerne le sandre, […], aucun alevin de l’année n’a été capturé et la population est dominée par les individus âgés de plus de 2 étés. Au vu des résultats de l’échantillonnage, le peuplement piscicole de la retenue de Carcès témoigne du mauvais état général du plan d’eau. Le peuplement est déséquilibré et nettement dominé par la brème bordelière, le poisson-chat et le gardon dans une moindre mesure. Suivi des plans d’eau des bassins RhôneMéditerranée et Corse en application de la Directive Cadre sur l’Eau : lac de Carcès

En vue du barrage de Carcès destiné à alimenter en eau la ville de Toulon, je repère les vannes clapets (26,5 m de longueur chacune) avec d’énormes vérins hydrauliques (merci Zabeth d’avoir trouvé le nom !) destinées à l’évacuation des crues. Derrière, une autre vanne permet de vider complètement le barrage.

Le barrage du lac, Papounet83

Le barrage de Carcès est un ouvrage rectiligne en terre, de 14 mètres de hauteur pour 160 mètres de longueur en crête, construit en 1933-1934 […] dès la construction (1933-1934), apparition de tassements du remblai ayant nécessité de modifier le profil amont du barrage ; […] Crue du 25 mars 1956 : 320 m3/s, la plus forte connue depuis 1907 […]. Erosion de la berge rive droite, au débouché de l’évacuateur, conduisant à renforcer les gabions de protection et à réaliser un épi en béton ; […] ; Mai 1993 : visite d’inspection des vannes-toit de l’évacuateur. Constat d’une importante corrosion des structures métalliques ; de juillet 1995 à octobre 1995 : travaux de renforcement définitif de la galerie de vidange de fond. Barrage de Carcès sur le Caramy, CEMAGREF

Des algues filamenteuses blanchâtres prolifèrent sur les berges entraînant l’eutrophisation de l’eau – son appauvrissement en oxygène – et donc la mort des espèces. Elles ne sont pas dangereuses pour l’homme et d’ailleurs ne sentent pas mauvais. Diagnostic de plan d’eau : Comprendre l’apparition des proliférations algales – Application au lac de Carces (83), Dufrèneix S., Dechesne M., Rapport d’étude VERI, 59p., 2010. En été, le marnage1 est important.
Un autre risque c’est la jussied’origine sud américaine – aux belles fleurs jaunes, qui n’altère pas la qualité de l’eau, mais déséquilibre l’écosystème. A Carcès comme dans les Landes, la Vendée, le Poitou… on a opté pour un arrachage manuel, le seul vraiment efficace. Les plans arrachés sont incinérés. Nettoyage du lac de Carcès, FR3-Régions : la jussie qui prolifère dans le lac de Carcès

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