Une randonnée qui commence mal. Mon GPS voiture, que j’utilise pour la première fois en saisie directe des coordonnées, m’amène sur la D80, sur un parking où j’ai rendez-vous mais qui n’existe pas ! Je sors l’extrait de carte IGN que j’ai imprimé, restreint à mon parcours pédestre, il ne comporte pas le numéro des routes ; le bouquet, c’est que le téléphone portable ne capte rien à cet endroit du massif de la Sainte-Baume et je ne peux donc prévenir que je suis perdue. Je roule plusieurs kilomètres dans des virages en épingle à cheveux avant de trouver un espace où passent les ondes. Je laisse un message sur le répondeur : à l’autre bout de la ligne, c’est la même galère. Finalement, c’est avec une heure de retard que nous commencerons la randonnée depuis Nans-les-Pins. La leçon à tirer ? toujours prévoir une solution de secours en cas de défaillance des technologies nouvelles…
La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie
Des couleurs à faire pâlir de jalousie les habitants des lagons : du turquoise, du vert dans les sous-bois sombres des sources de l’Huveaune, voilà qui est étonnant. Le flash se déclenche sans arrêt et même en réglage manuel à 800ASA, les photos sont sombres. Sur plusieurs centaines de mètres en remontant vers la source de l’Huveaune,
des vasques remplies d’eau s’étagent en pente douce. L’eau a déposé des couches de calcaire blanc superposées (travertin) ; ce sont des bactéries qui ont accéléré la réaction chimique de précipitation du carbonate de calcium. Si vous revenez les voir en avril, les colonies auront grandi. Nous croisons didrip qui vient de trouver la cache Les sources pétrifiantes, actarus83/Cryx Thypex ; il nous montre la photo qu’il vient de prendre et qui nous évitera de chercher aussi longtemps que lui. Solidarité entre geocacheurs.
« Près de sa source, l’Huveaune est caractérisé par la présence de gours souvent à sec et parfois remplis d’eau. Dans ce cours d’eau, on observe des feuilles, des morceaux de bois et des racines tapissés de calcaire plus ou moins consolidé ; les blocs qui occupent le lit du cours d’eau sont recouverts de calcaire blanc de type travertin1. On observe des couches superposées, enduites d’un tapis gélatineux vert de cyanobactéries2. » (extrait du site lithothèque – 83 – sources de l’Huveaune, académie d’Aix-Marseille)
Pour résumer, actarus83 écrit : « Vous voilà arrivé au niveau des gours3 pétrifiants de l’Huveaune. Ces vasques résultent de la précipitation du calcaire (CaCO3) présent en très forte concentration dans les eaux de l’Huveaune. Des algues favorisent cette précipitation et donnent de belles touches de bleu ou de vert, sur un fond rosé. » et d’ajouter dans un autre échange « ce sont ces mêmes algues qui colorent les falaises du Verdon en noir (on dirait de grandes bandes de mazout) ».
»
« La présence de cyanobactéries dans les eaux de baignade constitue un sujet d’intérêt nouveau de sécurité sanitaire ». Relevé page 17 du rapport du ministère de la santé sur la qualité des eaux de baignade. Sont-ce les mêmes bactéries que celles des sources de l’Huveaune ?
Nous traversons la rivière en marchant sur les bords des gours qui, à notre grande surprise, ne sont pas glissants. De toutes façons, quelques centimètres d’eau seulement ne nous font pas peur. Dans le vallon de la Castelette, des témoignages du passage de l’eau rappelle que l’Huveaune prend sa source au dessus de nous, dans la grotte de Castelette, à 590 m d’altitude. Nous y montons par un sentier raide balisé de vert.
Une grotte à deux entrées, dont une donnant sur un vallon rocheux et humide parcouru (autrefois ?) par la rivière ; une grande salle qui a servi récemment de salle à manger ; l’exploration à la lampe de poche nous conduit au fond de la grotte où un petit lac souterrain se cache sous la voûte. Des sculptures, pas encore affinées par l’eau, témoignent du long travail des gouttes suintantes au cours des siècles. La grotte de la Castelette, actarus83/Cryx Thypex
Retour par un circuit que j’ai préparé sans connaitre la nature du terrain : une belle montée qui nous amènera sur un vaste plateau (les Béguines) face à la grotte de Marie-Madeleine et à la chapelle du Saint-Pilon. La façade de la Sainte-Baume nous apparait dans sa totalité. Tiens, la D80, celle où je m’étais perdue ce matin… Un petit morceau de GR sillonne la garrigue et passe entre de nombreux avens : restons donc sur le sentier balisé ! beaucoup de panneaux indicateurs mais pas une fleur de lys qui repèrerait le chemin des Roys, celui là même qui, dans l’autre sens, mène à la célèbre grotte de Marie-Madeleine (qui ne serait qu’à 30mn de là, selon les panneaux). « Louis XIII ne dédaigna pas de venir se prosterner à Saint-Maximin. On vit même, un seul jour, cinq rois rassemblés : Philippe de Valois (France), Alphonse IV (Aragon), Hugues IV (Chypre), Jean de Luxembourg (Bohême) et Robert (Sicile) ». L’oratoire Miette (Origine du nom Miette : 1851, Lambert, gardien laïc de la grotte, ainsi que sa sœur sont assassinés par un repris de justice ; sa nièce échappe à l’assassin en se cachant derrière l’oratoire qui porte désormais son nom : Miette), monument historique très ancien (1516), gravé de plusieurs symboles religieux, a été restauré ; son pilier est énorme pour un oratoire. Nous en verrons encore deux autres (piliers) mais sans aucune statue. Le sentier, très empierré, rend la marche pénible. J’espère qu’à l’époque où les rois se rendaient à la grotte, les cantonniers entretenaient mieux les chemins qu’aujourd’hui !
Pour rejoindre la basilique et la grotte, le chemin des Rois a été aménagé à la fin du XIVème siècle lors de l’installation des Dominicains au Couvent Royal de Saint-Maximin et à l’hôtellerie de la Sainte-Baume. Jusqu’à la construction en 1897 de la départementale 80, ce chemin fut le seul accès au plateau du Plan-d’Aups depuis Nans. Des 7 oratoires d’origine, il n’en reste que 4. Ils ont été érigés en 1516 par l’Archevêque d’Arles [ndlr : Monseigneur Jean Ferrier]. Le premier s’intitule «Sainte Marie Magdeleine à Béthanie» (il est surnommé l’oratoire de Miette). Le second, au carrefour des Trois-Chênes, s’intitule «Sainte Marie Magdeleine au Calvaire». Le troisième, «Sainte Marie Magdeleine au Saint Sépulcre», est au carrefour des chemins de la grotte, du Saint Pilon et de l’Hostellerie. Le dernier, juste avant le col du Saint-Pilon se nomme «Sainte Marie Magdeleine dans le jardin du Saint Sépulcre». Extrait du site Pays de la Provence Verte
Les sources de l’Huveaune par le sentier des Roys, site saute-collines
Mon itinéraire 8km, 3h, 433m dénivelée
1Travertin (ou tuf calcaire) : Le travertin est une roche sédimentaire calcaire blanche existant sous forme de micro cristaux dans l’Huveaune. Pendant l’antiquité, le travertin a été beaucoup utilisé pour la construction de bâtiments, comme le Colisée. Voir Le travertin du Yellowstone : une question de microbes
2Les cyanobactéries sont une sous-classe de bactéries. Elles étaient autrefois appelées « algues bleues » mais ne sont pas biologiquement des algues. Les cyanobactéries peuvent transformer l’énergie lumineuse en énergie chimique. Elles sont apparues il y a environ 3,8 milliards d’années et font partie des espèces qui sont à l’origine de l’expansion de la vie sur terre.
Pour en savoir plus :
Celles de l’Huveaune « ont la capacité de piéger le CO2 pour produire de l’oxygène par photosynthèse ». Ces sources se forment par déséquilibre de la réaction chimique suivante :
(Cryx Thypex, étudiant en… CHARME – Chimie Analytique et Réactionnelle et Modélisation en Environnement – que je remercie pour sa validaton scientifique)
Conditions de formation des travertins de l’Huveaune (Vallon de la Castelette, Sainte-Baume, Var, France), Mémoire de Master, Sciences de l’environnement et de la Terre, spécialité CHARME, carole boullanger, Université de Provence, 59 p., 2006
3Gour : trou plein d’eau
©copyright randomania.fr
J’ai découvert par hasard votre site suite à ma visite pour la grotte de la Sainte baume et je suis monté voir la chapelle du Pilon du roi à 87 ans. Que c’est beau.
Oui ma Provence est belle et l’huveaune splendide, je suis né à la Bouilladisse pays de Provence, des Collines de Marcel PAGNOL.
Depuis plusieurs décennies, la tradition s’est créée que des randonneurs se baignent en toute simplicité et en tenue naturiste dans les poches de l’Huveaune. Pourquoi s’encombreraient-ils d’un artificiel maillot de bain dans cette maginfique nature semi-sauvage ?
Leur présence se manifeste souvent au son : quand on entend des hurlements ! L’eau est en général à 10-12 degrés, même en été.
Si on se perd avec un GPS…
Je suis ravie d’avoir visité votre site, de belles photos, je suis randonneuse aussi et j’aimerai faire les sources de l’Huveaune. De Marseille peut-on les faire par le vallon de la Castellette à la Ste-Baume je n’arrive pas à trouver le parcours. Encore bravo pour le site.
[ndlr : imprimer l’image de mon itinéraire. Il faut juste ajouter la petite partie sur le GR9 à partir de Nazareth]
Certainement l’une des plus belles balades à faire dans le Var.
J’y suis retourné encore cet après midi, il y avait moins d’eau mais celle-ci était plus « bleue » (plus grande concentration en cyanobactéries et autres algues je pense).
Philippe COSENTINO
(alias actarus83)
Bonsoir
Que d’aventure et je vois que les GPS ont des problèmes ! Le nôtre dit de tourner à droite pour la gauche alors si le passager n’est pas très attentif… on a des soucis de direction. Vos balades sont toujours aussi intéressantes. Amitiés.