Le Mont du Marseillais à partir de Lascours


Cette rando PR13 issue du topoguide Les Bouches-du-Rhône à pied de la Fédération Française de Randonnée n’appartient pas à celles que je préfère mais conviendra sans doute aux amateurs d’environnement sauvage méditerranéen avec vues sur plusieurs chaînes de montagne : Sainte-Victoire en entier, les Alpes du Nord enneigées, Sainte-Baume. Je l’ai parcourue dans le sens inverse (balisage jaune).

Partie du petit parking du plateau sportif Christophe Pignol de Lascours (commune de Roquevaire), j’ai rapidement atteint l’église Saint-Jean. L’église Saint-Jean de Lascours, de style roman, fut construite en 1875 et bénie le 18 janvier 1876, remplaçant la chapelle Notre-Dame-de-Pitié fondée par Jean Négrel en novembre 1670. Je remarque la Croix de mission collée contre la façade, monument érigé pendant la tourmente révolutionnaire, en souvenir d’une mission de restauration de la pratique religieuse.

Une mission avait eu lieu à Lascours en 1785 et une croix avait été érigée en ce souvenir. Cette croix fut restaurée en 1895, lors des fêtes du cinquantenaire de l’érection de la paroisse en succursale. On y appliqua un superbe Christ en fonte.

http://Lascours.arthilde.com/?page_id=289

Mais l’histoire la plus énigmatique c’est bien celle de Marie-Dominique, une des trois cloches du clocher ; l’une a été fondue à Marseille, l’autre à Douai (Nord) et la troisième par les frères Farnier, d’abord fondeurs ambulants, de la fonderie de Robécourt et Vrécourt (Vosges). Ce ne serait pas curieux si l’inscription gravée ne laissait à penser qu’elle n’était pas destinée à Lascours mais à Poligny (Jura)… Lire la gravure ci-dessous. Cloches de Provence

Ego vox clamantis dirigite viam domini Je m’appelle Marie-Monique
Mr Bonnefoy chanoine honoraire curé de la paroisse de Poligny
J’ai eu pour parrain Mr Paul Sauvageot notaire à Poligny
Et pour marraine l’Association des mères chrétiennes de cette ville

Musée Robécourt
Continuer la lecture de Le Mont du Marseillais à partir de Lascours

Dans les pas d’Hendrick Sturm sur le plateau de l’Arbois


J’ai hésité à publier cet hommage à Hendrik Sturm, artiste marcheur à l’origine du GR2013 interurbain, qui vivait à Marseille depuis 1994. Etait-ce un parcours intéressant pour les lecteurs de randomania ? Pour ceux qui ne connaissent pas le plateau, assurément, car il révèle la réalité d’un paysage inter-urbain qui n’est pas toujours naturel, loin de là…
Alors que, inquiètes, Anne et moi cherchions à le contacter depuis des mois, nous avons appris par le journal d’investigation Marsactu qu’il était décédé le 15 août dernier. Le rencontrer à nouveau au travers de cette marche organisée par le bureau des guides du GR2013, était une évidence.

Pause commentée (par nos guides). Nous sommes une bonne cinquantaine au rendez-vous, nous réchauffant par un café sur l’esplanade de la gare encore sous les brumes grises du matin ; nous y retrouvons Gérard, et sa femme Marité qui est l’auteur de presque toutes les photos ; merci à elle. Morceaux choisis, pas forcément issus des discours de nos guides parfois longs ou trop conceptuels lorsqu’on attend dans le froid…

Originaire de Düsseldorf, après avoir mené de front une formation aux Beaux-Arts et une thèse en neurobiologie (thèse sur les signaux bioélectriques liés à la contraction du poignet chez l’homme), Hendrik Sturm enseignait à l’école des Beaux-Arts de Toulon.

Je ne marche pas comme le fou voyageur, je ne recherche pas l’épuisement, même si ça peut arriver. […] Dans mon cas, la marche est aussi une méthode d’étude. Je la pratique moins comme pratique spirituelle que comme outil de découverte, méthodologie d’enquête – lecture de traces. Hendrick Sturm

Bureau des guides du GR2013

Il a beaucoup cherché et trouvé de nombreuses traces, dont celle du camp de transit des forces américaines, la Delta Staging Area, installé à Calas, Saint-Victoret et Aix entre fin 1944 et début 1946. Nous allons en repérer quelques unes.

En partant de la gare TGV, nous avons commencé par le côté sombre de l’Arbois : les lieux de rencontres cachées, les déchets un peu partout.

Pause commentée. Arrêt chez Télédiffusion De France, opérateur d’infrastructure du secteur numérique et audiovisuel ; c’est dernière la grille, les barbelés, la vidéosurveillance d’aujourd’hui, que les pylônes des principaux émetteurs de radiodiffusion en modulation d’amplitude, sur les ondes moyennes, ont été installés avant la seconde guerre mondiale ; le gouvernement français décide, fin 1941, d’y ajouter deux centres ondes courtes en zone libre au Réal-Tort (textuellement ruisseau tordu), dont les travaux débutent l’année suivante.

Avant la ligne TGV, dans un champ de toiles d’araignée, l’une d’elle attire mon attention ; accrochée à la végétation avec une forme bizarre, un peu comme la coque d’un bateau surmontée d’une voile ; j’ai l’impression d’une araignée rare car c’est la première fois que je vois une toile de cette forme. Qui saurait me renseigner ?

Nous passons au-dessus de la ligne TGV, direction la Bastide Neuve, une vaste propriété agricole, qu’Anne connait bien : elle a échangé avec Hendrick ses documents de recherche. Pause commentée. Elle nous présente la maison à deux étages (construite avant 1668), le puits, le four, la grande bergerie pouvant accueillir plus de 500 moutons, les nombreux propriétaires en indivision qui finissent par vendre. Elle nous montre le tableau au fusain qui prouve qu’au début du XXe siècle, elle était toujours debout mais… le camp américain n’est pas loin.

En une journée, ils [les soldats américains] ont dévoré tout le raisin de nos vignes. […] Pour se chauffer, ils ont pris les poutres de la grande bergerie puis de la maison. C’est ainsi que les bâtiments se sont écroulés.

Chronique d’une bastide (auteur : bricor)

De là nous coupons la route de Tokyo qui traverse le camp américain du nord au sud sous une ligne à haute tension qui avait été prolongée pour les besoins du camp. On peut encore voir des dalles de béton, dont certaines supports des tentes des GI’s. Pause. L’équipe du bureau des Guides a extirpé d’un sac quelques reliques américaines : bouteilles, plaque d’identification (dog-tag). Puis le GR2013 utilise quelques raidillons avant de passer au pied du centre d’enfouissement des déchets de la ville, déchets qui parfois, s’échappant avec le vent, constellent le paysage.

Nous arrivons au niveau d’un vallon sans nom mais facilement reconnaissable à partir des photos d’époque ; il s’agit d’un théâtre en plein air, probablement le Leslie J. McNair Memorial Theatre, plus de 10000 places, des gradins de bois installés de chaque côté ; des ingénieurs du son avaient sélectionné ce vallon pour sa qualité accoustique. Un chien de chasse nous a précédés ; au loin, des chasseurs observent la longue file de randonneurs descendant avec précaution dans le vallon. Plus question de chasser pour l’instant…

Continuer la lecture de Dans les pas d’Hendrick Sturm sur le plateau de l’Arbois

Entre vert et bleu, à Calas


Cette randonnée était prévue le 1er avril pour la fête de la randonnée 2022, organisée par Randocabriès ; n’ayant pu y participer en raison de conditions météorologiques incompatibles avec mes problèmes d’allergie, sa présidente m’a fait parvenir le circuit par l’intermédiaire de Yvon R. ; à cause de la carte IGN un peu ancienne, j’ai cafouillé du côté de la nouvelle passerelle au-dessus de la voie rapide et des voies d’aménagement. Je me suis garée à Calas, avenue des romarins, près de la crèche et de l’école.

Le barquiéu, réservoir d’eau situé à l’origine dans le parc et le potager du château de Trebillanne (voir cadastre 1833 ci-contre), alimenté par une source, servait de réserve d’eau pour arroser les terres basses cultivées de « la plaine de Trebillane » ; un abreuvoir pour les animaux de trait et les moutons complétait le système d’irrigation encore visible sur la carte de 1950. Aujourd’hui le bassin vide a conservé ses platanes.

Louis Balthazar Dauphin de Trébillane achète la seigneurie en 1759 et la transmet à son fils Antoine Louis Dauphin de Trébillane ( 1780-1849) ; à la mort des fils, c’est sa fille Marie-Gabrielle Dauphin de TRÉBILLANE (1784-1859), mariée à Antoine Laurent Marie GARAVAQUE, qui devient propriétaire des domaines de Calas (le nom de Calas date de 1859) et de Trébillane ; sa petite fille Louise Claire GARAVAQUE a laissé à Calas le souvenir d’une femme généreuse et impliquée dans le hameau : En 1868/69 Louise construisit l’église, un presbytère auquel elle ajouta un jardin. Elle aménagea le cimetière et vendit des lots aux fermiers afin qu’ils puissent construire les maisons du village. Extrait de la carte archéologique, monumentale et artistique de Calas
En 1869, elle fait donation du domaine à trois arrière-cousins du côté de la demie-sœur de sa mère : Gaspard Gabriel, Edouard Auguste, et Arthur Xavier de Villeneuve-Esclapon, ce dernier enterré à Calas.

Pour rejoindre la colline, j’ai traversé le lotissement par la rue de la lavande puis des romarins jusqu’au rond-point sur l’avenue principale ; en face par la rue Picasso, un sentier rejoint la colline et circule au pied des maisons du ‘domaine de Calas‘. Si près des habitations et pourtant déjà dans la nature ! au loin, le Pilon du Roy.

Il faut attendre 1952 pour que commence une urbanisation rapide et importante du territoire liée à la déprise agricole et à la proximité de Marseille : […] sont construits, particulièrement sur des terres de la famille de Villeneuve-Esclapon de grands lotissements : Lac Bleu, l’Eclair, Le Petit Lac [ndlr : initialement logements sociaux], Chamfleury, le Domaine de Calas, les domaines du Réaltor, de l’Arbois, et plus récemment les Pradelles et le Clos de l’Auberge. […] La commune va alors négocier aux frais du promoteur, la construction d’une école, voisine des logements du Petit Lac, dont elle va prendre le nom.

Cabries.fr p 165 et facebook, la-commune-aux-deux-clochers

Dans les bois près du Domaine de Calas, traversé de petits sentiers, j’ai eu un peu de mal à trouver la sortie vers la D9 ; sans doute aurait-ce été plus facile de rejoindre l’avenue F. Mistral dès que possible puis prendre l’étroite impasse ci-contre. Avec le nouvel aménagement du carrefour, il faut passer sous la route en direction du lotissement du Réaltor.

La piste en direction de Saint-Amand est barrée et privée ; mais le tracé que l’animateur m’a envoyé y passe : je suppose donc qu’il a l’autorisation d’y faire traverser les randonneurs. Ce beau pavot somnifère (à opium) en bordure de champ est considéré comme une mauvaise herbe.

Le domaine de Saint-Amand est un ensemble rural (remises, granges) autour d’une bastide centrale qui appartenait autrefois à Balthazar Dauphin de Trébillane et que son héritière Louise Garavaque a vendu pour construire Calas.

Selon Martine Guionnet du club de randonnées, la chanteuse Barbara a séjourné à Calas ; Raymond Martin, feu maire de Cabriès, s’honorait de son séjour à Saint-Amant dans les années 1990 (Cabriès.fr fiche 57). En 1967, une séquence Au bois de Saint-Amand a été tournée au Château d’If. Mais ses biographes ne pensent pas que le bois qu’elle évoque soit situé ici…

La chanteuse Barbara a séjourné à Calas, au hameau de Saint-Pierre selon les sources, et y a écrit la chanson du Petit bois de Saint Amand, aujourd’hui de l’autre coté de la 4 voies.

Wikimonde

A droite le vallon du Grand Torrent et la tour d’Arbois, terroir de vignes, de prés, de labours et de serres. Un peu plus loin une décharge sauvage comme j’en rencontre souvent. Il reste encore un champ de coquelicots.

Continuer la lecture de Entre vert et bleu, à Calas