Au pays de la lavande : balade nature adaptable à souhait


IMG_2826.JPGA partir de Valensole  voilà une balade familiale tranquille, une balade nature adaptable à souhait  en durée : il y a suffisamment de chemins sur le plateau pour prendre un raccourci et s’adapter au temps dont on dispose ; on peut y circuler en poussette sur une grande partie du parcours. Selon le guide Balades en Provence, CEEP – en partenariat avec parc national de Port Cros, Fondation Nicolas Hulot, IGN, Dakota Editions, 2005, mai et juin, début ou fin de journée seraient les périodes d’observation idéale. Je l’ai choisie pour me remettre doucement à la marche suite à une déchirure musculaire après 4 semaines d’immobilité : elle est facile, pratiquement tout le temps sur terrain plat (à part une montée et une descente dans les galets qui roulent !). Très exposé au vent, le plateau est assez désagrable les jours de mistral : aujourd’hui 19 octobre, le coupe-vent est indispensable et j’aurais apprécié une paire de gants.

Selon ce livre, les oiseaux sont nombreux pour qui vient à la bonne période : mésanges, pinsons, rossignol en mai, pic vert, loriot ; au delà de la Blache la fauvette, le tarier pâtre, le bruant zizi ; dans les étendues agricoles, l’outarde canepetière (=cane qui pète), le lièvre et la caille ; en allant vers la ferme des Sivans, le bruant proyer et ortolan ; en allant vers la ferme St-Andrieux, la huppe qui installe son nid dans les amandiers creux, les alouettes des champs. « Tout au long du parcours, il vous faudra lever les yeux pour chercher les espèces de rapaces : milan noir, faucon crécerelle, circaète Jean-le-Blanc, aigle royal, busard cendré ». Tous ces oiseaux sont décrits à la fin du livre.

IMG_2822.JPGIMG_2820.JPGNotre première rencontre sera celle d’un troupeau de moutons côté ubac de Notre-Dame. Les chiens, longtemps avant, ont averti les bergers de notre présence. De jeunes brebis d’un mois sautillent autour des adultes comme de jeunes enfants. La remontée sur le plateau par le sentier de galets me surprend toujours à l’intérieur des terres : la Durance les a amenés des Alpes il y a 10 millions d’années et les a déposés en une couche épaisse de plusieurs centaines de mètres.

IMG_2828.JPGIMG_2823.JPGSur le plateau de Valensole, d’immenses champs ont été récemment labourés au pied des montagnes. C’est là que le lavandin en juillet nous offre son parfum et sa couleur caractéristique des cartes postales. Dans la ruine de la Colle de Lèves, serait-ce un oratoire construit dans le mur (mur construit avec des galets bien sûr !) ? Certains sommets des montagnes des Alpes  sont déjà enneigés.

IMG_2833.JPGNous passons devant un champ de lavandin aux rangées bien alignées mais d’une couleur un peu terne en cette saison. Car il n’y a pas de lavande sur le plateau mais cet hybride de deux types de lavandes, qui colore le pays en bleu à la belle saison. Quelques ruches ont été déposées au plus près pour permettre aux abeilles de fabriquer le miel local. Parc naturel régional du Verdon. Près du stade, nous goûtons une noix ; la trouvant bonne, nous en ramassons quelques unes de plus.

Itinéraire court 5.5km 97m dénivelée, 1h10. Itinéraire du livre 10.550km, 83m dénivelée, 2h10 (+ le temps des observations de la nature)
Autres balades depuis Valensole, site de la commune
IMG_2838.JPGEn route pour la fête de l’amande à « Oraison, une ville à la campagne ». Voilà un slogan justifié : tous les parkings sont pleins, le restaurant mettra 1h30 pour nous servir le premier plat… mais c’était du frais. Le cassoir du XIXème siècle est en fonctionnement depuis ce matin ; la machine ronronne avec le bruit d’une mécanique bien huilée, les amandes tombent dans le sac et l’écorce est rejetée de l’autre côté tandis que les rouleaux successifs font leur travail d’écrasement et de tri. Les produits vendus sur le marché ne sont pas que des produits à base d’amande tels calissons et nougats : on y trouve le safran, l’épeautre, l’huile d’olive, les fromages, la charcuterie corse, les apéritifs, les biscuits bio, le chocolat, etc. Vous ne me croirez pas mais j’ai réussi à résister à tous les bons produits de notre terroir.

Le programme de la fête de l’amande sur le blog Arsnova

Amandiers, Amandes et cassoirs en Haute-Provence, Claude Martel, Alpes De Lumière, n°116. Site de l’association Alpes de Lumière

Du charnier de Signes à la grotte du Vieux Mounoï, deux lieux chargés d’histoire


IMG_0133.jpgC‘est d’abord par l’Association de Sauvegarde, d’Etude et de Recherche pour le patrimoine culturel et naturel (ASER Centre Var) et son président Philippe Hameau – spécialiste de la préhistoire – que j’ai entendu parler de la grotte du Vieux-Mounoï  fouillée de 1989 à 1993 sur l’adret de la Sainte-Baume. Après l’avoir retrouvée dans le guide des sites préhistoriques Provence-Alpes-Côte d’Azur, F. Boyer, Mémoires millénaires, 2006, j’ai encore eu plus de détermination à la découvrir. Lors de notre première visite, nous avions questionné quelques habitants de Signes pour savoir s’ils savaient comment la trouver. Tous la connaissaient mais personne n’arrivait à nous expliquer où elle se trouvait. Aucune indication sur place et de nombreux chemins où le risque de se perdre n’est pas nul. Il aura fallu deux essais pour la trouver. Elle est retombée dans l’oubli après des années de surfréquentation qui avaient interrompu les fouilles.

Site sur la commune de Signes, histoire, cartes postales anciennes, actualités,…

IMG_0468.JPGMais d’abord un peu de marche ! Le départ sur la départementale D2 n’est pas difficile à trouver : il se fait au niveau du circuit du Castellet, près du monument qui annonce la nécropole nationale de Signes ou charnier de Signes (c’est cette horrible dénomination qui m’a poussée à rechercher les faits), assez bien signalé. La piste forestière fait de larges virages avant d’arriver sur une aire fermée dans laquelle une quarantaine de tombes de marbre portent les noms et surnoms de jeunes soldats abattus par les allemands en 1944. IMG_0474.JPGUn gamin passe sous l’autel en marchant sur le coffret renfermant les ossements des fusillés (coffret déposé là à la demande de Gaston Defferre, alors maire de Marseille) tandis qu’une adolescente fait part de son étonnement à son père qui lui explique l’évènement : « ah bon ? y’a eu la guerre dans notre pays ? ». Pour moi qui étais enseignante il n’y a pas si longtemps, je pense que l’éducation nationale n’a peut-être pas suffisamment joué son rôle…

IMG_0470.JPGIls veulent sauver de l’oubli le charnier de Signes dans le Var, la Provence, 26 août 2008 (extrait ci-dessous). De tous les patronymes cités à la suite de cet article, je connais celui de Louis Martin Bret qui a donné son nom à un collège de Manosque.

  • 1944. IMG_0469.JPGLes actions des Résistants qui attendent depuis des mois le débarquement des forces alliées se multiplient. Un officier français aurait trahi les 38 martyrs du Charnier de Signes, tous issus du Mouvement uni de la résistance, pour quelques milliers d’anciens francs. Incarcérés aux Baumettes, ils furent interrogés et torturés.
  • Le 18 juillet 1944, un jeune garçon, Joseph Call, dont les parents travaillent dans la forêt, aperçoit un car déposer 29 prisonniers encadrés par les Allemands. IMG_0471.JPGUn bûcheron de Cuges, Maurice Percivalle, passant aussi par là, entend au loin La Marseillaise. Il voit les hommes creuser leurs propres tombes. Le 12 août, neuf autres résistants furent fusillés sur le même site. Mais pourquoi ont-ils été emmenés dans ce vallon ?
  • Raymond Aubrac, alors commissaire de la République de la région – premier signataire de la pétition pour la réhabilitation de la Nécropole de Signes – a fait exhumer les corps. « Certains portaient des marques de strangulation, signes de tortures antérieures  ; des corps ont été recouverts de chaux vive. D’autres ont été enterrés vivants« . Les familles ont dû reconnaître les corps mutilés au Pharo où ils furent transportés avant d’être inhumés à Saint-Pierre au cours d’un hommage républicain ; cinq d’entre eux n’ont jamais été identifiés.

IMG_0423.JPGIMG_1373.JPGPlus nous poursuivons le vallon des Martyrs, plus les chemins se multiplient  sans indication hormis ce panneau tombé à terre et qui confirme que nous sommes sur le lieu-dit du Vieux Mounoï.

IMG_0422.JPGIMG_0109.jpgLe Vieux-Mounoï est le lieu-dit d’une ancienne bergerie et son puits, peut-être Mounoï est-il le nom provençal d’une famille ‘Mounier’. Si vous les trouvez vous saurez que vous êtes sur la bonne voie. Le second indice significatif est l’abri de chasseur à la verticale de la ruine. Quand j’ai enfin découvert la grotte bien cachée derrière la végétation, je peux vous assurer que ce fut une réelle émotion, comme un secret  que des initiés auraient accepté de partager avec moi. Il s’agit d’un aven dont une partie de la voûte s’est effondrée.

Elle a servi de bergerie depuis le néolithique (6000 ans avant J.C.) et de décor au film Manon des Sources en 1986, là où Manon découvre la source qui alimente le village des Bastides Blanches.

IMG_0115.jpgNous observons tous les recoins de cette très vaste grotte. Deux petites lucarnes de lumière s’infiltrent au dessus de nos têtes. Elle a trois niveaux. Côté droit, des arbres tordus de chaque côté de l’éboulis, se sont accrochés à la paroi rocheuse.

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Côté gauche, nous pouvons accéder par un étroit goulet glissant non sans risque, à une salle souterraine. L’intrépide Actarus83, qui a sans doute des notions de spéléogie, l’a visitée pour nous ; la méduse au plafond n’est-elle pas remarquable ? Jean-Jacques Oller a eu la gentillesse de mettre à ma disposition quelques photos de cette grotte souterraine, ou sous forme d’animation :

Au milieu une grande salle avec des aménagements de pierres : c’est là que la scène de Pagnol a été tournée. Voir le reportage fait par Tazbahn pour retrouver les lieux du film sur le site panoramas de cinéma.

IMG_0434.JPGIMG_0440.JPGIMG_0441.JPGIMG_0460.JPG

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La bergerie des pierres écrites, Abriès


Fête départementale de la randonnée dans les Hautes-Alpes, 2e jour. Toutes les photos du 21 juin 2009
IMG_1716r_1.JPGVenant de Ristolas, apparait le chemin de croix d’Abriès menant à une chapelle consacrée à Notre Dame des Sept Douleurs.

Il a été érigé dans les années 1830 ; la niche de chacune des quatorze stations est ornée d’une plaque de métal gravée et peinte, représentant une des étapes du chemin de croix.

Abriès, selon wikipedia

Nous partons du Roux d’Abriès pour la bergerie des pierres écrites. Je devine qu’elles doivent être nombreuses pour avoir donné leur nom à cette bergerie. Il est probable que ce sont des bergers partis en transhumance dans les alpages qui ont gravé ces pierres. cette tradition [La maitrise de l’écriture] a ancré au sein de cette société un climat culturel assez inhabituel et bien éloigné des clichés qui décrivent les communautés montagnardes comme retardées et peu cultivées

img_1718.jpgimg_1723.jpgLes animateurs nous présentent le Bric1 Bouchet (2997m) d’où descend le torrent qui fait si souvent des ravages. Nos animateurs ont improvisé un circuit de secours car une partie du GR est impraticable. Les passages à gué nécessitent quelque attention sur des pierres parfois instables.

img_1724.jpgimg_1751-150x150.jpgimg_1756.jpgimg_1758-299x300.jpg

Pulsatille blanche, centaurée de montagne, trolle d’Europe, sainfoin montagnard

Le trolle d’Europe (3ème photo à partir de la gauche) ressemble à un gros bouton d’or aux fleurs fermées, ce qui empêche les abeilles et gros insectes d’assurer la pollinisation. Celle-ci est donc réalisée par une petite espèce de mouche, c’est le principe de mutualisme (extrait du site Florealpes)

 

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La température décroit de 0°55 pour 100m ; quand nous arrivons à la bergerie, après avoir marché dans des prairies humides et des ornières profondes, beaucoup de randonneurs se couvrent. Le chalet de bois (altitude : 2130m), construit avec des troncs d’arbre empilés, est surélevé. De la neige fondue coule du toit ; par endroit il y a encore des plaques de neige au sol. Un enclos près des pierres écrites permet d’isoler les bêtes malades.

Qui sont ces personnes qui ont gravé leurs initiales sur les pierres ? sans doute des bergers qui pratiquaient la transhumance inverse entre le Queyras et le Piémont italien. D’autres personnes ont signé leur passage plus récemment. La technique est déjà celle du burin et du marteau, même si probablement le burin n’était qu’un clou et le marteau qu’une pierre.

[…] très forte mobilité de la population d’Abriès, de ses éleveurs qui ont longtemps pratiqué la transhumance inverse et entretenu pendant des siècles des relations avec les habitants des vallées piémontaises et qui étaient rompus aux finesses des transactions commerciales. Il suffisait d’une mauvaise récolte et d’une évolution brutale des marchés pour qu’une partie de la population s’en aille pendant quelque temps du village et cherche ailleurs des revenus honorables. Bulletin de la Société d’études des Hautes-Alpes, Abbé Paul Guillaume, Gap, 27e année, troisième série, n° 26

 

img_1727.jpgW.P.M. 1784 : cette gravure date d’un peu avant la révolution française. L’écusson du Dauphiné est symbolisé par 2 dauphins et la  royauté par une fleur de lys. Le W signifie ‘vive’ (on le retrouve sur beaucoup de pierres dans le village même d’Abriès) d’où vive P.M. Une gravure au texte similaire mais datant de 1808, existe dans « la rue des écritures » du village d’Abriès. Je n’ai pas trouvé qui pouvait être ce P.M.

Le Dauphiné est une ancienne province française, qui correspond aux départements de l’Isère, de la Drôme et des Hautes-Alpes. Le blason du Dauphiné ne comportait à la base que le dauphin de Méditerranée. La fleur de lys n’a été ajoutée qu’après annexion par la France. […]

De 1343 à 1789, le Queyras sera l’un des cinq escartons de la fameuse république des Escartons. « Les communes autonomes se réunissaient en fonction des circonstances. C’est l’assemblée des chefs de famille du hameau dont chacun est nommé tour à tour procureur pour un an, qui définit et assure les services et travaux utiles à tous : déneigement, entretien des chemins et canaux d’irrigation, garde du bétail, gestion de la forêt, aide aux nécessiteux, assurance mutuelle, etc. et qui en répartit les frais et le travail entre tous les feux du hameau. La démocratie avant l’heure ! Extrait du guide bleu PACA, Hachette, 1989

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