** Patrimoine manosquin : les mines d’eau de la Thomassine


Jour de grand vent ; je cherche donc un lieu de randonnée à l’abri du mistral : j’ai choisi Manosque et la Thomassine1, que je connais pour avoir animé une journée  geocaching avec le Parc naturel régional du Luberon lors de la journée des  fruits et saveurs d’autrefois le 03/12/2017 ; mais ce jour là, je n’avais pas eu le temps de découvrir les lieux.

Le chemin de la Thomassine est long et étroit, attention au croisement de véhicules ; la maison de la biodiversité est toujours fermée (elle réouvrira le 17 juin) un bout de temps après le déconfinement ; je me gare donc sur un petit espace avant la barrière DFCI. Sur  le chemin qui mène à la maison, on entend déjà le bruit de l’eau qui ne manque pas.

Cachée dans la végétation à gauche, peu après avoir passé la barrière, c’est d’abord une drôle de tour à section carrée qui m’interroge : serait-ce le siphon permettant de passer sur l’autre rive du ravin de Joannis ? (point 17 décrit dans le topoguide Les Balcons de Manosque, en vente au siège de l’association Comité du Patrimoine Manosquin (CPM) ou à l’office du tourisme).

Courte variante : dans le virage en épingle, au pont de bois, pénétrez dans la végétation luxuriante, qui reçoit le trop-plein de la mine d’eau juste au-dessus. La prêle s’y sent bien !
Puis revenez en arrière pour un court parcours fléché qui invite à découvrir la patrimoine des mines d’eau. C’est cette partie qu’il faut suivre si vous manquez de temps. Cette manière ancienne de récupérer l’eau souterraine a été redécouverte par plusieurs études récentes, et fera l’objet d’une prochaine édition des Alpes de Lumière. J’ai vu celle de la Rouguière à Riez (04) et en ai découvert d’autres au travers de photos (lire le travail d’inventaire de Lucas Martin et Vincent Meyer, chercheurs qui m’ont aimablement apporté leur aide dans la rédaction de plusieurs articles) ou vidéo (La Gaude).

Pour qu’il y ait une mine d’eau (ou galerie drainante, ou toun en provençal), l’eau qui s’infiltre dans le sous-sol doit être piégée entre une couche géologique imperméable et une autre perméable, avec une pente des terrains qui favorisent l’écoulement. La technique consiste à creuser à flanc de coteau une galerie horizontale permettant la sortie de l’eau grâce à la seule gravité. Pour acheminer l’eau jusqu’au point de stockage, des ponts-aqueducs et conduites sont construites. Pour améliorer la productivité, les ramifications avaient pour fonction de multiplier les zones d’infiltration pour capter et drainer des sources de faible débit dans un environnement proche de la surface. Des regards d’entretien sont prévus pour la construction puis l’entretien.
Pour les conserver longtemps en l’état, les parois sont consolidées, surtout en terrain instable ; les mines doivent être entretenues : les racines des arbres abîment les mines, les concrétions ou les particules en suspension peuvent les boucher.

Le sentier longe un champ d’oliviers puis oblique sur la droite ; sur la gauche, mais disparue aujourd’hui, avait été bâtie la ferme de Chateau-Briant alimentée au XVIIe par une mine d’eau sur le ravin des Tours, eau acheminée par des tuyaux de fonte fin XIXe ; elle coule encore abondamment à même le sol ; de couleur légèrement rougeâtre, elle contient peut-être une forte teneur en fer, à moins que ce ne soit dû à sa nature légèrement sulfureuse. Sa porte étant ouverte, je peux voir comment la galerie a été creusée.

[2/40 luberon] La mine de Château-Briant, pedago. Informations historiques et géologiques dans la fiche.

Ce site [la Thomassine] compte trois mines d’eau :
– La Thomassine dont le premier captage pour alimenter la ville remonte à 1554 appelée alors source des Maurels ou Maureaux ou Moreaux, augmenté d’une deuxième branche en 1770 et reprise en 1928,
– Château Briant,[…]
– Saint Antoine au XXe siècle, 1928.
L’eau de La Thomassine fut dirigée vers la ville par un caniveau semblable à celui de la source de Gaude en passant par le « Pas de Laugier ». Un petit jalon appaumé borde encore son passage. […] Elle se raccordait à l’eau de Gaude avant Le Soubeyran [la porte du Soubeyran]. CPM

 

Le sentier continue en montant légèrement jusqu’au puits de la mine de Thomassine. Comme pour les aqueducs romains, des puits d’aération puis d’entretien sont construits le long du chemin de l’eau.

Variante mine d’eau de la Thomassine : rejoindre la piste balisée par la droite, contourner la clairière où sont installées quelques ruches : l’association des apiculteurs amateurs y maintient l’apiculture familiale, informe et forme le public.
Avant le parking visiteurs de la Maison de la biodiversité, côté gauche, vous apercevrez la rigole par où s’écoule l’eau de la mine : la mine de la Thomassine, datée du premier captage 1517 et de ses deux branches, est juste en-dessous, dans la propriété. Itinéraire et photos sur Wikiloc par Chris04220. Non loin de là, l’aqueduc de Joannis fera l’objet d’une prochaine visite, et l’article thématique sera complété.

Revenez jusqu’au puits ; par la gauche cette fois, le sentier va grimper progressivement sur la colline, dans la garrigue, ponctuée parfois de petits poteaux de bois fléchés de vert. En contre-bas, dans le ravin des Tours, je me demande à quelle construction appartiennent ces grosses pierres éparpillées. Un peu plus haut, dans une clairière, une citerne enterrée et un abreuvoir alimentés par une source.

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Du vieux village d’Ongles à la chapelle Notre Dame


Majo avait si peur d’arriver en retard, que nous sommes parties tôt et arrivées les premières sur le mini parking près du pont sur la D951. Le froid est mordant. Pendant que le groupe s’équipe, nous cherchons la première cache.

Début sentier de St BARTHELEMY-VIERE d’ONGLES, tatibanon

En route pour le village de Vière1, emplacement initial d’Ongles2 que j’ai visité pour la première fois en 2006 avec l’association Alpes de Lumière ; à l’époque la mise en valeur n’était qu’à l’état de projet : Village médiévial abandonné de Vière ; les travaux seront faits 10 ans plus tard…

Mon album photos, les photos de Yves Provence

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Chemin classique dans un sous-bois de chênes et qui, lentement, mène au vieux village de Vière. Nous longeons un rempart de pierre sèche complètement écroulé vers la fin ce qui rend le chemin propice aux torsions de la cheville.
Nous passons à côté de ce qui ressemble à une haute tour mais qui serait plutôt une maison à deux étages si je me réfère au plan du cadastre népoléonien ; juste en face, un abri de pierre sèche est intégré dans le mur.

Enfin nous arrivons sur le site de l’église saint-Barthélémy dont les dimensions m’ont toujours surprise. Elle fut église paroissiale : l’arc de décharge brisé à double rouleau, le départ de voûte en bon appareil, permettent de penser qu’il y avait un transept et trois chapelles latérales. La chambre des cloches est rajoutée au sommet de la tour au XIIIe ; au XIVe ou XVe s’ajoute la chapelle latérale sud-est ; au XVIIe celle du sud-ouest.  En 1844, nous dit Raymond Collier, ancien archiviste à Digne,  elle était encore debout  ; rien n’a été démoli, rien n’a été reconstruit, juste consolidé par quelques tirants métalliques noyés dans la maçonnerie et que l’on ne voit pas.

Un ensemble complet de photos par Jean-Pierre sur facebook

Nous arrivons par l’esplanade qui n’est autre que l’ancien cimetière dont le mur a été reconstruit : quelques tombes subsistent encore (Olympe Laugier épouse Turin, par exemple). Le bassin monolithe qui nous étonne, ce sont les fonds baptismaux qui se trouvaient dans la chapelle du XVIIe. Pas de trace du vieux château qui se trouvait au sommet à côté de l’église ; pendant que les photographes immortalisent l’instant, que Daniel escalade le reste d’une voûte effondrée, les geocacheurs cherchent.

Eglise St Barthelemy-VIERE, tatibanon

Le site de Vière connait son apogée au XIIIe siècle grâce à l’extension de la ville, au développement économique et au renforcement des ouvrages défensifs. […] Le démantèlement du village est un choc majeur dans l’histoire du vieil Ongles.
Au XVIIe et au XVIIIe siècle, le village s’est recomposé […]. Cependant, le XIXe siècle est marqué par l’abandon définitif de l’habitat. Selon la Fondation du Patrimoine

De là haut, le nouveau village apparaît en entier dans la plaine. Sa traversée réserve plein de surprises : un lavoir de 1898 dont l’emplacement a été offert à la commune par la famille Rouchon ; des décors de jardins pittoresques ; des personnages peints sur des volets bleus. L’église actuelle occupe la place du vestibule et de l’escalier du château construit par Jacques de Lignon. Le sonneur de cloches a été foudroyé en juin 1892 parce qu’il avait voulu sonner les cloches un jour d’orage : peut-être croyait-il pouvoir écarter la foudre comme on le pensait au XVIIe ? L’Écho rochelais 6 juillet 1892. Non repéré par le groupe, dans le château, un musée inattendu :

La Maison d’Histoire et de Mémoire d’Ongles (MHeMO) évoque l’histoire des harkis, ces militaires autochtones d’Algérie qui servaient comme supplétifs aux côtés des français de 1957 à 1962 ; elles  [ces unités] seront chargées de compléter la sécurité territoriale et de participer aux opérations locales au niveau des secteurs ; ces unités porteront la dénomination de Harkas. Site harkis Dordogne
Originaires de Palestro (aujourd’hui Lakhdaria), en Kabylie, ces déracinés avaient été amenés là par leur officier, le lieutenant Yvan Durand, responsable d’une section administrative spécialisée (SAS) en Algérie. Refusant de les abandonner, le militaire avait démissionné et organisé leur évacuation vers la France. La Croix, 25/12/2016
MOUMEN Abderahmen, Ils arrivent demain : Ongles, village d’accueil des familles d’anciens harkis (1962-1971), Ongles, Archives Départementales des Alpes de Haute-Provence, 2008. Document des archives à télécharger

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Les tulipes de la Brillanne, la glacière et Notre Dame des Anges à Lurs


La rando que nous devions faire en groupe a été annulée ; le temps est à la pluie et même à l’orage. Mais les tulipes ne peuvent plus attendre : Yves et Brigitte m’ont prévenue qu’une bonne partie a déjà été coupée ; je décide d’y aller quand même assez tôt pour avoir une chance d’échapper au mauvais temps.
Album photos

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Je me gare à la Brillanne sur le parking de Carrefour Market près du chemin de Pissais1 que je vais emprunter pour éviter la route. Au canal de Manosque que je traverse, je longe la berge boueuse et rapidement les chaussures sont lourdes à soulever ; heureusement je n’ai que 260 m à parcourir.

Au loin, les voitures sont garées n’importe comment le long de la route ; le spectacle des tulipes se trouve dans le champ qui la borde sous la forme d’un étroit tapis coloré sur fond de montagnes enneigées.

En effet les tulipes ont été coupées et les pétales jonchent le sol entre deux rangées. Mais le spectacle coloré est quand même là, même si des rangées entières ne sont plus que feuilles.

Ce n’est pas la fleur qui est cultivée mais le bulbe venu de Hollande ; au départ de 9 à 10 cm de circonférence, on les fait grossir jusqu’à 11 ou 12 cm. 11 ha de surface sont réservés aux bulbes hollandais, 2 pour la côte d’Azur et 3 pour production locale en serre.
Pour que la plante se concentre dans le renforcement et l’accroissement du bulbe, il faut la couper. Les bulbes sont mis à sécher et envoyés en Hollande.
Produire ici permet d’étaler la période de floraison : en France on peut faire des fleurs en décembre ou janvier, en Hollande janvier ou février.
Celles vendues aux grandes surfaces et sur les marchés sont vendues 25 centimes l’unité et poussent sous serre ; celles dans les champs ne lui appartiennent pas.
Luc Boissière est désormais le seul à produire des tulipes (10 dans les années passées) ; les hollandais produisent depuis peu des tulipes sous plastique pour contrôler la floraison ; ils importent de Nouvelle Zélande et Tasmanie avec un décalage de 6 mois dans la floraison. D’après La Provence, Alpes, 9 avril 2019

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