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** Circuit de Valmogne au départ d’Artignosc


Grand froid attendu aujourd’hui ; équipée de collants et de chaussettes de montagne, d’un double cache-nez, de gants, j’ai décidé de marcher quand même bien qu’étant encore un peu souffrante. Nous ne sommes que 9 au départ sur le parking près du pont qui traverse le Verdon qui sert de limite naturelle entre les Alpes-de-Haute-Provence et le Var.

Les basses-gorges du Verdon, plus larges, s’étirent du barrage de Quinson jusqu’à Esparron-du-Verdon. Ces deux gorges traversent des forêts au fort caractère méditerranéen qui leur donnent leur caractère paisible et sauvage. Données PACA les basses gorges

Mon album photos d’Artignosc
La page de Yves Provence, avec liens vers la trace, les photos

Nous longeons l’anse d’Artignosc qui n’existe que depuis la construction du barrage de Sainte-Croix ; nous le voyons bien en comparant la carte IGN de 1950 avec celle d’aujourd’hui. Il est un d’une série de petits lacs ponctuant les basses gorges (Montpezat, Saint-Laurent-du-Verdon, Quinson et Esparron).

Vaumugne 1 Lac, ginbi2

L’été, un espace de loisirs aménagé avec beaucoup d’ombre, a tout ce qu’il faut pour passer une bonne journée en famille mais l’eau est particulièrement froide parait-il.

Vaumugne 2 Piscine, ginbi2

Nous remontons les gorges formées de calcaires durs et blancs du Jurassique. Le premier belvédère aménagé nous donne une vue en enfilade sur les gorges vers le nord. Le niveau d’eau semble bien bas.

Vaumugne 3 Belvédère 1, ginbi2

Le second belvédère est un peu plus surélevé. Sur l’autre rive, le coteau Chiron où je vous ai déjà proposé une randonnée. Coteau Chiron dans les basses gorges du Verdon.

Vaumugne 4 Belvédère 2, ginbi2

Quant au 3è situé au débouché du mauvais vallon (mau Vallon), nous y accédons par un parcours un peu plus envahi par la végétation puis par des marches creusées dans la roche. Regardez en bas : ça devient impressionnant.

Vaumougne 5, Belvédère 3, ginbi2

Nous quittons maintenant les berges du Verdon pour une forêt désertée où se trouve la pierre aux trois blasons, limite des communes de Baudinard, Montpezat et Artignosc. Ce trifinium, point où aboutissent trois limites de propriétés, a été contesté par les seigneurs respectifs des communes. Chaque face blasonnée en relief est tournée vers le village qu’elle représente.
Histoire de Montpezat
Montpezat, D’argent à l’étoile à seize rais de gueules des Blacas. L’étoile de Moustiers, suspendue entre les deux rochers, serait une étoile à 16 rais suspendue par un Blacas à son retour de croisades. Lire L’étoile de Moustiers dans le blog randomania+. Généalogie de Blacas d’Aups

Baudinard, le lion des Sabran ; l’armorial officiel de Baudinard reprend également l’étoile à seize rais des Blacas, famille alliée. En effet, Beaucette de Blacas, avait épousé un Sabran en 1389. Généalogie Sabran-Baudinard

Artignosc, D’azur au chien barbet passant d’or et au chef cousu d’azur chargé de 3 besants d’or. Le barbet est un chien d’arrêt à longs poils, spécialisé dans la chasse au marais. Généalogie des de Thoron

En 1742, une transaction est établie entre les communautés de Baudinard, Artignosc et Montpezat ; en 1743 une lourde pierre de bornage est posée à cet endroit précis situé dans le val Valour, toponyme aujourd’hui disparu.

Vaumougne 6 Pierre aux trois blasons, ginbi2


Le sentier n’est pas toujours très clair ; au sortir du bois, le grand domaine de l’Arbitelle, sans doute vieux de plusieurs siècles, est fièrement posé sur sa butte. Nous cheminons entre bois et champs jusqu’à un panneau « Defend de Vaumeugne ». D’abord une faute au premier mot qui s’écrit défens ou défends quand, dans le français juridique de l’Ancien Régime, il désigne une terre ou un bois interdit au pâturage. Le toponyme qui suit, selon les documents consultés ou les périodes, s’écrit Valmunie, Valmogne, Valmougne, VaumougneVaumugne, Vaumagne, Vaumoyne1, mais jamais Vaumeugne ! Il y avait pourtant le choix…

Ce défends de Vaumagne avant la révolution était indivis entre la commune et le seigneur Jean de Sabran. A la révolution, le seigneur émigre et se voit confisquer ses biens que l’état – la commune de Baudinard – « s’approprie ». Mais en 1814, une loi prévoit la restitution des biens au émigrés. La commune s’estime propriétaire et un premier arrêté lui donne raison ; s’en suit un procès en appel intenté par le duc de Sabran et qui ne donnera qu’un droit d’usage à la commune. Recueil des lois et des arrêts en matière civile, criminelle, administrative et de droit public, L.-M. Devilleneuve, A.-A. Carette, Paris, 1838

Vaumougne 7 Vaumougne, ginbi2

L’environnement dégagé entre deux arbres, laisse apparaître deux montagnes enneigées au nord-est ; l’une des deux se reconnait facilement à sa bordure supérieure festonnée et son plateau légèrement incliné : c’est le Mourre de Chanier qui se rappelle à nous régulièrement lors de nos randonnées. A sa gauche le Chiran. Un bel alignement de lavandes ondule en suivant les courbes du sol.

Une maison de galets colorés typique de la région des basses-gorges précède le prieuré de Valmogne et son ancien puits. Nous le visitons discrètement de l’extérieur : ce monument ressemble plutôt à une forteresse : le mur de son enceinte, 3 m 50 de haut, est percé de meurtrières à l’Est et au Sud. La défense de l’abbaye se complétait par le fort du Vallon de Valmogne qui a subi des réparations en 1692 : où pouvait-il se trouver ? à la Veiroire [de veiriéu = voir ?] dominant à 590 m d’altitude ?

La pierre [à sacrifices] de Valmogne identique en tous points à celle de Barbabelle, est constituée par un bloc calcaire un peu moins massif, légèrement plus allongé et plus régulier ; dimensions: 1 m sur 0,58 et 0,52 d’épaisseur. Elle nous renvoie aux tribus salyennes.
Devant la façade actuelle du prieuré, abbaye à l’origine, a été trouvée une villa du 2è siècle, elle-même sur un habitat plus ancien. A quelques mètres à l’est de l’abside, une nécropole gallo-romaine. Le lieu a donc été habité sans interruption.

C’est donc vraisemblablement à la fin du Ve siècle ou au commencement du VIe, que quelques moines vinrent se fixer à  Baudinard et y fondèrent l’Abbaye de Valmogne, qui apparaîtra dans les Chartes en 990.
[…] Valmogne apparaît dans une 2è Charte du cartulaire de lerins, en 1096. […]
En 1113, toutes les donations d’Augier à Lérins sont confirmées par une Charte : N.-D. de Valmogne et St-Jacques de Baudinard y figurent.
Le 6  Mars 1256, l’Abbé de Lérins fait un échange avec les nonnains de Ste Catherine de Sorps : il donne à celle-ci les églises de Baudinard et de Valmogne et reçoit en échange le Prieuré d’Artignosc.
En 1612 l’évêque de Riez Charles de St-Sixt rachète et unit à la mense épiscopale, le domaine de Valmogne, ancien Monastère aliéné, possédé alors par des laïcs. D’après le manuscrit de Fredo Mathéron, histoire de Baudinard sur Verdon

Site officiel de Baudinard
Banque d’images Patrimages DRAC PACA : le prieuré de Valmogne, avant et après travaux, intérieur et extérieur

Vaumougne 8, Prieuré de Valmogne, ginbi2

Clodex est en grande et sérieuse discussion avec Mimie04 sur la différence entre farigoule et farigoulette [le thym] ; pour la plupart d’entre nous, c’est la même chose ; mais la langue provençale fait une subtile différence en fonction de la taille du thym : ferigoulo = le thym, ferigoulasso = grosse plante de thym, ferigouleto = petite plante de thym ! (D’après le dictionnaire du Félibrige) Donc farigoulette est un diminutif. Et pour parfumer ferigoula = aromatisé au thym, sans oublier la farigoule qui désigne la boisson.

Après cet aller-retour, nous reprenons notre boucle dans une forêt très différente de la forêt de chênes du défens. De hauts pins clairsemés puis quelques vestiges d’anciennes cabanes de charbonniers impossible à identifier comme telles sauf qu’elles sont proches du sol noirci. Une cabane de charbonnier généralement ne mesure que 3 m sur 2 environ, est légèrement enterrée, s’ouvre vers la charbonnière pour la surveillance ; la base est souvent en pierre sèche, de plan rectangulaire avec un toit à deux pentes. Celle-ci est de forme ronde : une spécificité du Var peut-être. De mémoire de charbonniers, D. Musset, Les Alpes de Lumière, 1996

Vaumougne 9, Les maisons des charbonniers, ginbi2

Nous terminons la boucle dans la forêt de Baudinard où quelques arbres curieux attirent notre attention, comme ce vieil arbre totalement recouvert de lichens (les lichens seraient sensibles à la pollution : s’il y en a c’est donc bon signe) ou les deux arbres entremêlés dont on ne distingue plus les troncs. Nous retrouvons les bords du Verdon et son ponton pour les pêcheurs. Le vent est presque totalement tombé.

Aux abords du pont, un troupeau de chèvres en liberté marchent sur la route et nous laissent le chemin.

En guise de récompense, la cache bonus ne résiste pas aux geocacheurs les plus mordus.

Vaumugne 10 bonus, ginbi2

Une randonnée variée, sauvage, facile, avec de beaux points de vue sur l’eau ou les montagnes, un monument historique peu connu, un circuit de 10 caches digne d’intérêt.

Image de l’itinéraire 10km900, 161m dénivelée (+270, -270), 3h déplacement seul (5h15 au total)

1Valmogne : à l’origine Vallis muniensis (la vallée protectrice ?) est devenu Valmogne.

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