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Les garrigues de Gordes, au pays de la pierre sèche


Au départ de Saint-Pantaléon, Yves nous emmène sur la commune de Gordes que tout le monde connait pour son village de bories, ensemble de constructions anciennes en pierre sèche, c’est à dire sans liant. Mais aujourd’hui, ce sera une découverte plus secrète, avec tout autant de cabanes en pierre sèche, mais abandonnées le plus souvent sans être interdites d’accès.

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Nous partons de Saint-Pantaléon, la plus petite commune du Vaucluse, 216 habitants sur moins de 1 km2 ; c’est sans doute la raison pour laquelle l’application Google Photo a localisé par erreur son église à Gordes !
L’église romane de Saint-Pantaléon citée depuis le début du XIe siècle, nous attire par sa taille, sa forme singulière (triple absidiole saillante et voûtée) et ses tombes monolithes creusées dans le rocher qui se cachent à l’arrière du monument ; l’inscription funéraire dédiée à Lecto et creusée dans la pierre, pourrait faire remonter le lieu de culte au VIe siècle ou postérieurement. Les tombes rupestres datent du XIe ou du XIIe siècle, et plusieurs d’entre elles, ont la taille de jeunes enfants. En effet l’église Saint-Pantaléon ferait partie des « sanctuaires à répit », dans lesquels des enfants morts-nés reprendraient vie le temps de leur baptême. Eglise et rocher contigu sont classés par arrêté du 13 juin 1907. A l’intérieur un tableau du XVIe représente la décapitation de Saint-Pantaléon.

[Pantaléon de Nicomédie] était médecin à la cour de l’empereur Maximien, et fort apprécié pour ses connaissances et ses talents.
Converti au christianisme, il s’opposa aux prêtres d’Esculape, et soigna les malades au nom du Christ.
Malgré sa popularité auprès des populations, il fut dénoncé. Il échappa à 6 tentatives d’exécution, mais comme il refusait de renier sa foi, il fut torturé longuement et finit décapité.
[…] Il fut canonisé plus tard à Rome avec le nom italien de Pantaleone. Il fut alors déclaré patron des médecins. Pantaléon de Nicolmédie, selon wikipedia.

En route pour les garrigues de Gordes. Nous passons près de la barre rocheuse des Firmins dans laquelle une maison a été construite, partiellement dans la roche. Cachée derrière les arbres, une cabane de pierre sèche en forme de ruche d’abeille, forme symbole du parc du Luberon.

Un mur de soutènement gondole sous la pression de la terre qui gonfle. Une borne composée de pierres empilées devait situer l’entrée d’une maison aujourd’hui disparue : peut-être un des piliers du portail ?

Dans le clos de Denante, on trouve un vaste ensemble de constructions de pierre sèche. La famille Denante, originaire de Gordes, est éparpillée sur tout son territoire. Elle comptait aussi bien des personnes comme François de Nantes de la noblesse du Comtat venaissin que des cultivateurs. Sur plus de 12 ha, au début du XIXe, poussaient ici vergers et vignes, d’où l’abondance de cabanes servant de remises à outils ou d’abris. Il y en a tant que nous avons cru à un véritable hameau !
Un apié (pour abriter des ruches) dans un mur exposé au sud puis une ancienne bastide cossue (XVIIe ?) avec ses encadrements de portes et fenêtres en pierre de taille ; les fenêtres du 1er étage ont été bouchées sans doute à la révolution. On pénétrait dans la propriété par un portail qui annonçait déjà le standing du lieu. Mais où se trouvaient les cuves vinaires, compléments des cultures de vigne ? peut-être dans le sous-sol de cette vieille maison ?

Un puits, des banquettes de pierre pour les cultures, des enclos, d’immenses murs de pierre sèche couronnés de pierres verticales ou inclinées : elles servent à stabiliser la construction et, dans le cas d’une clôture, à empêcher les animaux de la franchir. Le chemin n’étant pas bordé donne l’impression que l’on marche dans un jardin privé mais il est bien public, même s’il est difficilement identifiable par endroit. Nous quittons le clos Denante par le nord pour retrouver le chemin classique bordé de murets de pierre sèche.

Curieuse, j’ai évidemment recherché sur internet l’origine de cette famille Denante, autrefois écrite De Nante ; j’ai alors découvert un fait divers qui a défrayé la chronique au XIXe, a inspiré une pièce de théâtre romancée à A. Belot et E. Daudet : La Vénus de Gordes, et même fait l’objet d’un feuilleton dans le Figaro en 1866. Emile Zola s’en serait inspiré également pour son personnage de Thérèse Raquin.
Objectivement documentée par les actes d’état civil des protagonistes, l’affaire criminelle de Gordes rapportée par F. Vergnault, est tout compte fait assez classique avec l’amant, le mari et la belle qui veut se débarrasser de son conjoint. La sentence est parue dans Le journal des débats politiques et littéraires du 1/1/1862 et dans plusieurs quotidiens dont le Courrier de la Drôme et de l’Ardèche le 8 mai 1862. (extrait ci-contre)
Dans les listes nominatives des premiers recensements de Gordes, j’ai pu retrouver trace de François Denante, fils d’Antoine habitant Font-Blanche, Théophile Auphan, et Fortunée Béridot de la Bastide Neuve.

Non loin d’un champ d’oliviers, une grande cabane dont la voûte en carène inversé est typique de la région de Gordes. [Cela] consiste à couvrir un espace rectangle par l’encorbellement des deux côtés opposés, format des arêtes aux quatre angles et se terminant en son faîte par une rangée de dalles. 25 balades sur les chemins de la pierre sèche, Florence Dominique, le Bec en l’Air, 2008

L’entrée qui mène aux champs d’oliviers est fièrement identifiée par une sculpture de pierre verticale dont l’une est trouée. Claude se repose sur le mur, le dos contre le mur d’une cabane. Tiens, une construction de pierre sèche circulaire au toit plat : une citerne peut-être.

Comme il fallait bien caser quelque part ces milliers de pierres pour pouvoir cultiver, on les rassemblait en clapier ; dans la cabane suivante, la plus longue de notre visite, on les a assemblées le long de la cabane, tel un large muret de pierre sèche. A l’intérieur une voûte de pierres plates, un banc de pierres et à l’extérieur, un escalier volant permettant d’atteindre le sommet du mur, en particulier pour les cultures en terrasse.

Demi-tour après la grande cabane de chez Silvestre. Là, une cabane est incrustée dans le mur d’enclos, tandis qu’un peu plus loin, une ouverture y est aménagée au niveau du sol me faisant penser à un garde-manger rustique plutôt qu’à un abri.

Au carrefour de 4 voies menant au hameau des Bouillons, au village par le chemin des Pointes, au col de Gordes et aux Roques, une ancienne croix de chemin en pierre, doublée sur ses bords d’une seconde croix en creux ; posée sur une colonne cylindrique surmontée de volutes bien travaillés, elle s’adosse à un mur de pierre sèche portant une marque de balisage orange.

Nous nous enfonçons dans une garrigue plus touffue ; un chèvrefeuille, un cactus ; puis une série de constructions de pierre sèche en plus ou moins bon état : une cabane sans tête, une autre avec porte de bois et cheminée et enfin un ensemble alliant élégamment la maison moderne accolée à sa cabane de pierre sèche trapue.

Le chemin de Chabert, typique de Gordes avec ses murets de pierre sèche couronnés, nous ramène en direction de Saint-Pantaléon ; bientôt le clocher de l’église émerge derrière le mur d’enceinte.

Près de l’église, nous savourons la pause sur le banc : il fait si chaud !

Gordes : notes d’histoire, Jean-Louis Morand, mairie de Gordes, 1987

Certains préféreront sans doute visiter le village des Bories (classé monument historique en 1977) qui rassemble en un seul endroit ses bergeries, ses fours à pain, cuves à vin, aires à battre le blé, ruelles, enclos et murs d’enceinte, qui témoignent de l’activité laborieuse d’innombrables générations. Gordes patrimoine.
D’autres, plus aventureux, plus près de la réalité d’aujourd’hui, sillonneront la garrigue en tous sens, sans chemin parfois, pour trouver de multiples exemples de ce type de construction. Cependant, il est probable que vous pénétrerez dans des propriétés privées même si cela n’est plus indiqué clairement. Soyez respectueux.

Image de l’itinéraire 9km800, 3h déplacement (5h au total), 115m dénivelée (+219, -219).

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2 réflexions au sujet de « Les garrigues de Gordes, au pays de la pierre sèche »

  1. Merci pour cette très belle randonnée !!!! Nous avons beaucoup apprécié ! C’est la première fois que nous faisions ce secteur de cette façon et c’est une réussite !

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