De la tour de la Keyrié à la fontaine des tuiles


Temps incertain, nuageux et venteux ; je ne partirai pas loin ; et pourquoi pas le circuit que m’avait signalé ma fille ? une boucle sur le plateau de la Keyrié passant par la Fontaine des tuiles. Le chemin de la Fontaine des tuiles conduisait autrefois à Vauvenargues, Jouques et Rians.
Je me gare le long de la route, près du centre équestre des Pinchinats où à 9h30 la fête bat déjà son plein (Il est sans doute possible de se garer à l’intérieur du centre équestre quand il est ouvert). Cette fraîche vallée où l’eau coule abondamment a été traversée par le canal romain de la Traconnade venant de Jouques ; quelques vestiges subsistent dans certaines propriétés privées. Cinq moulins à farine y avaient été construits.

Banquette de pierreL'entrée du chemin noirIl va me falloir monter jusque sur le plateau en longeant de belles propriétés et beaux domaines de l’époque faste du village des Pinchinats. Le panneau à l’entrée du chemin noir en dit long ! Il y a même une banquette de pierre aménagée à mi-hauteur de la côte ! route étroite, fréquentée tout de même par les riverains qui descendent vers le centre ville.

Depuis l’arrêté n° 63/98 du 20 octobre 1998, durant toute l’année, à l’exception des véhicules autorisés, la circulation sur le plateau de la Keyrié et notamment sur les pistes DFCI de 1ère catégorie CO 103 et CO 102 est interdite à tout véhicule à moteur. Vous circulerez donc parmi les VTT et les coureurs à pied mais pas avec les quads ou les véhicules 4×4.

Tour de la KeyriéLa tour de la KeyriéJe retrouve la tour de la Keyrié rafistolée à la base depuis ma dernière visite en 2007 (lire tour de César, du prévôt ou de la Keyrié ?) ; on ne peut plus y accéder par l’escalier  métallique ; sur le côté gauche de la piste, à intervalles réguliers, des panneaux signalent la propriété privée « La Tour », du nom de A. M. de la Tour-Keyrié, auteur d’un album de gravures sur le vieil Aix et  d’un livre intéressant pour les amateurs d’histoire locale : Promenade d’un étranger à Aix description des principaux monuments, objets d’art, églises, fontaines, musée, institutions libres et de l’État, etc., précédée de l’histoire civile et religieuse, Aix, 1896 ou Excursions aux environs d’Aix, Makaire, 1890

LavogneLa piste forestière traverse le plateau sans permettre aucune vue sur la Sainte-Victoire ou sur la chaîne de la Trévaresse : il y a bien trop d’arbres qui cachent la vue. Un panneau informe les randonneurs au sujet des jours de battues aux sangliers dans cette zone. Quand je tourne à gauche vers la Fontaine des tuiles, un long, très long grillage isole les marcheurs du domaine de chasse de Saint-Marc Jaumegarde : sanglier dans le domaine de chasse (photo Coralie)dans ce domaine, vous êtes certain de tuer du gibier (sangliers, cerfs, félins… parait-il) puisqu’il ne peut fuir ! Dans ce cas particulier des propriétés clôturées, la chasse en espace clos hermétique est possible toute l’année et tous les jours. Vous y verrez parfois un sanglier s’approcher du grillage (Photo Coralie de mademoisailescoco).
Domaine de chasse de Saint-Marc J.

Pourquoi ce nom de Jaumegarde ? réponse dans le blog de geneprovence

cadastre 1830 fontaine tuiles

Il faut une quarantaine de minutes pour rejoindre la Fontaine des tuiles. Sur le cadastre napoléonien, c’est dans un provençal non académique que figure ce nom que A.M. de la Tour-Keyrié écrit Fouen dei Teoule. Dans son livre, il raconte que M. Signoret, qui habite non loin de la fouen dei Teoule, utilise sa salive pour guérir les tâches des yeux !

Au XVIIIe siècle, La « Font des Teules » était une ferme avec une source, un puits et un grand verger d’amandiers. L’eau étant rare et précieuse, les propriétaires récupéraient l’eau du toit vers des bassins d’où le nom de « fontaine des tuiles ».
La maison « noble » a été construite vers 1820, de l’autre côté du chemin, en face de la ferme. L’accès se faisait par une belle allée de cèdres. Elle comprend des dépendances, un chenil et un espace pour la basse-cour. Selon l’Echo des Pinchinats du 26 juin 2021

Abri modulaireA l’approche de la Fontaine des tuiles, un espace modulaire jaune est posé sur le sol, à gauche de la piste ; on ne voit que lui ! Mais à quoi sert-il ? par la fenêtre, je peux apercevoir un petit espace cuisine et une table. Peut-être à l’usage de ceux qui exploitent le bois pour la trituration1 puisqu’un projet existait dans ce sens ?
ArbousesUn arbousier lourdement chargé de fruits, a perdu presque tous ceux qui étaient mûrs : ils feront le régal des rongeurs et des renards. J’en trouve quelques uns que je m’empresse de manger : la peau granuleuse contraste avec la chair tendre un peu fade.

Le fruit de l’arbre aux fraises (Arbutus unedo), n’a rien à voir avec la gariguette ou la mara des bois. Il met un an pour arriver à maturité, se mange cru à maturité ; sa peau granuleuse hérissée de tubercules pyramidaux devient rouge orangé quand il est mûr en octobre-novembre. On peut le consommer en confiture, en jus ou en liqueur. les arbouses proposées en sirop dans les restaurants chinois ne viennent pas du même arbre, mais d’une plate orientale.
L’arbousier était un arbre sacré chez les romains qui en déposaient un rameau sur les cercueils en signe de protection. Il parait que l’arbousier résiste bien aux feux. D’après A la rencontre de l’arbre aux fraises, N. Tordjman, P. Robin, Passion rando le magazine de la FFRandonnée, n°33, octobre-novembre-décembre 2014

Maison à la Fontaine des TuilesBorne et crochetPeu de choses dans le quartier de la Fontaine des tuiles : cette grosse maison (dont le nom ne serait pas dû à une ancienne tuilerie mais à l’eau récupérée à partir de la toiture), des bornes à l’entrée du chemin avec un crochet (pour quel usage ?) mais pas de font (Font désigne l’eau qui jaillit, fontaine, source, voir commentaire de UndeBauugnes), qui se trouve à l’intérieur de la propriété nommée Fontaine des Tuiles.

Je redescends maintenant vers les Pinchinats par une route fortement dégradée et étroite. Sur le côté droit, quelques vignes. Un air de campagne aixoise que l’on a du mal à imaginer si près de la ville.

Au niveau de la route des Pinchinats, une série de belles bastides ont été construites, rivalisant par leur taille ou leurs jardins : le château de la Gaude (petit détour sur la droite au carrefour avec la route des Pinchinats), de la Mignarde. L’allée du château de la Mignarde est si grande que je ne peux apercevoir le château ; dommage ! il appartenait autrefois à M. Rigaud, maire d’Aix.

L'allée du château de la Mignarde Jardin à la française du XVIIIe siècle dessiné par Nicolas Ledoux. Belle statuaire et miroir d’eau. Résidence d’été de Pauline Bonaparte. Le parc, peuplé de statues, enveloppe de verdure la bastide qu’un fils de pâtissier aixois, Jean-Sauveur Mignard, entrepreneur de l’architecte Ledoux, fit profondément remanier et somptueusement décorer en 1775. Chacune des pièces de réception a ses particularités : salle à manger aux murs tendus de papier peint représentant la culture du riz en Chine, deux salons aux fines gypseries, boudoir à coupole, grand salon ordonné par des pilastres plaqués et par deux colonnes encadrant une vaste radassière. Extrait des bastides d’Aix

Je passe devant le domaine de Tournon du nom de son premier propriétaire Pierre Tournon en 1662 ; son fils en a hérité, l’a légué à deux écuyers d’Aix qui l’ont revendu à  Louis Hubert.

Eglise des PinchinatsEn 1861, est posée la première pierre de l’église des Pinchinats ; la bénédiction le jour de la Sainte-Anne a lieu un an plus tard. Monseigneur Chalandon baptise la cloche « Claire » en 1863. De chaque côté du portail de l’église, une statue de Notre Dame des Champs et une croix de mission.

Stèle de la baronne de VitrollesLa stèle que je découvre est surprenante : même ceux qui habitent dans le coin ne la connaissent pas. Le baron Régis de Vitrolles, chef de bureau au ministère des affaires étrangères, a épousé Renée Chénon de Léché en 1920 à Paris. C’est une ancienne famille du Berry. Blessée mortellement le 19 octobre 1948 à Aix-en-Provence, sa femme a sa stèle sur la route des Pinchinats. Elle a été renversée par un jeune cycliste de 16 ans, ouvrier agricole. Merci à M. H. qui en explique les circonstances dans un commentaire à la suite de cet article (Les Dernières dépêches, 21/10/1948).

Naissance le 01/09/1889, à Le Subdray (18), CHENON DE LECHE Renée Anne Marie-Jeanne ; Père : CHENON DE LECHE Léopold Joseph, Mère : HARANGUIER DE QUINCEROT (D’) Marie Lucie ; décédée à Aix en Provence le 31/10/1948

Le Figaro, 10 juin 1920 : Aujourd’hui sera béni en la basilique Sainte-Clotilde le mariage du baron Régis de Vitrolles, consul de France, chef de bureau au ministère des affaires étrangères, chevalier de la Légion d’honneur, avec Mlle Renée de Léché. Information obtenue sur le forum geneprovence

La balade se termine chez mademoisailescoco qui ne cuisine que des légumes frais et des desserts aussi bons que beaux.

C’est une balade familiale sur des pistes forestières un peu ennuyeuses et sur des routes étroites sans trottoir. La route des Pinchinats est incontestablement dangereuse pour les piétons. Pour ceux qui souhaiteraient uniquement parcourir le plateau, la solution est de déposer une voiture à chaque extrémité (une à l’entrée du chemin de la Tour de Keyrié et l’autre dans le quartier de la Fontaine des tuiles).

fontaine des tuiles_trace_trk_panoImage de l’itinéraire 10km100, 166m dénivelée (+208, -208m), 2h30 déplacement (2h45 à 3h au total)

1trituration : opération de broyage par friction, combinant un mouvement de frottement et une forte pression (préparation de la pâte à papier par exemple)

Première marche populaire du patrimoine : Mallemort


Un concept nouveau que Majo et moi avions envie de tester ; organisé par la l’office du tourisme de Mallemort et la ffsp (fédération française des sports populaires) le parcours sans difficulté, est balisé avec des rubans rouges et blancs et des barrières métalliques ; pas de stress : nous disposons d’un numéro de téléphone, d’un carnet de route, d’une petite assurance (1.80€) et sur le parcours, de deux points de ravitaillement avec étape culturelle ludique. Les groupes partent au fur et à mesure, parfois se rejoignent, parfois s’étirent. C’est la liberté encadrée.

Donjon de l'ancien châteauMajo et la journalisteInscrites en 88è et 89è position, nous partons en milieu de peloton ; une petite grimpette nous mène vers l’ancien château de Mallemort, du XIIè siècle autrefois propriété des évêques de Marseille. Détruit et remplacé peu à peu par les habitations, il ne subsiste que le donjon. Rapidement, par un petit sentier humide entre deux rangées de maisons, nous rejoignons le pont sur le canal EDF. l'étang des pêcheursNous longeons alors le canal, accompagnées par une journaliste qui teste la marche pour son reportage. Sur le côté droit, la roubine des Vernégaux alimentée par les eaux de la Durance, fait le bonheur des promeneurs et des amateurs de pêche tout comme la vaste retenue d’eau gérée par une association de pêcheurs.

Barrage de MallemortPeu après le barrage, nous trouvons le premier point de ravitaillement : gâteaux, eau fraîche, photo de groupe et quizz sur les oiseaux de la Durance qu’il faut identifier : pour le cormoran dont c’est la zone d’hivernage, et le héron, pas de problème mais pour les oiseaux migrateurs comme le guêpier c’est plus difficile. Saviez-vous que les pattes de la buse ne sont pas de la même couleur que celles de l’aigle ?

Oiseaux sur la DuranceNous contournons le barrage de Mallemort et faisons face à l’observatoire de Mallemort le long de la Durance. Pas de castors en vue, ce n’est pas l’heure. La fiche qui nous a été remise nous informe :

En avril ou mai naissent 2 à 4 castors en moyenne ; toute la famille s’occupe d’eux (parents, les grands frères et sœurs). Chaque génération respecte l’autorité de la précédente ; au troisième printemps, ils partent fonder une famille à leur tour.

Fleurs sauvagesCulture hors sol de fraisesAprès 1km500 sur ce sympathique chemin, la route est goudronnée jusqu’au second point de ravitaillement ; là, nous nous désaltérons, nous mangeons un morceau avant d’aller discuter avec le jeune Cyprien qui nous parle de la culture hors-sol de ses fraises. Les plants sont enfermés dans un sac suspendu et percé de trous ; ils sont déposés sur un substrat tout déjà préparé auquel on ajoute de l’engrais. La route après le second ravitaillementle LuberonLes fraises poussent et retombent sur le côté du sac : pas besoin de se mettre au sol pour les ramasser. Arrosage automatique contrôlé par un ordinateur : quand on est peu nombreux dans l’exploitation, c’est une solution indispensable. Par contre leur prix de revient est sensiblement plus élevé qu’avec une culture en pleine terre mais avec ce système sous abri, il serait possible de récolter des fraises en automne. Nous reviendrons les goûter en octobre chez Cyprien chezcyprien@gmail.com, chemin belle plaine à Mallemort.

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Le château de Saint-Estève-Janson par la digue


Journées du patrimoine 2014. A la lecture du livret sur le thème des jardins du patrimoine, je vois qu’est signalé le château de Saint-Estève-Janson, celui pour lequel je me pose tant de questions. La seule réponse que je dois accepter c’est que cette haute construction est probablement une cheminée monumentale. Lire le premier article : le château de Saint-Estève-Janson.

L'étang derrière la digueJe passe à la mairie pour prendre quelques informations mais rien n’est affiché ; je me rends donc directement au château, pensant trouver sur place un archéologue ou un historien chargé de faire visiter les lieux. Je pars donc du chemin du canal dans la réserve volontaire du haras de Saint-Estève-Janson, passe devant deux pêcheurs, entends les oiseaux sans vraiment les voir.
le rocher de JansonJe rejoins d’abord le pied du rocher de Janson, où était autrefois accroché le bateau qui traversait la Durance jusqu’à Cadenet.
cassini st estève duranceA l’époque du bac, la rivière Durance ne faisait qu’un seul lit, il n’y avait pas de rapides et le rocher permettait d’y accrocher le bac ; depuis le moyen-âge, par intermittence, cet endroit était utilisé ; en 1647 le bateau y était à nouveau déplacé et s’y trouvait encore en 1674. Le rapport d’inspection de 1697 précise que pendant 35 ans le bateau se trouvait soit au rocher de Janson soit vers le chemin du Puy.

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