** Circuit des Orris à la Roquebrussanne


C‘est à l’occasion de l’assemblée générale 2010 de l’ASER que nous avons pu nous rendre au lieu-dit les Orris à la Roquebrussanne, commnune autrefois composée de deux seigneuries, celle de la Roque, – partagée entre Bertrand Icard, Guillaume de Gardion – et celle de Brussan. Ce dernier, seigneur du château, donna son nom à la totalité du fief. En 1793, pendant la période révolutionnaire, Roque-Brussanne deviendra Roque-Libre.

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IMG_0441.jpgAvec les caches placées par papounet83 et Elia’s, nous décidons d’improviser un circuit, en utilisant la possibilité offerte par le GPS de recalculer un itinéraire sur route à partir d’un point de départ (le petit parking sur le chemin des Baumes) et d’un point d’arrivée (la cache la plus proche). Ce sera donc Inspiration GC1YJMM d’Elia’s, chapelle édifiée au XIIIè siècle au sommet d’une colline, accessible par un sentier grossièrement caladé et balisé de sept oratoires. De hauts murs de IMG_6540.JPGsoutènement en pierre sèche annonce notre arrivée sur l’esplanade. IMG_0447.jpgLe cadre de la chapelle Notre-Dame est véritablement enchanteur. Nous sommes face à Sainte-Marie, autrefois paroisse du lieu. Sur la façade à gauche, un grand Saint Etienne, oeuvre du sculpteur Portanier, à droite, un tout aussi grand Saint Bruno, œuvre du chartreux Don Alphonse. L’incursion du duc de Savoie et du prince Eugène en 1707 frappa les habitants et les habitations : le village fut saccagé et incendié. Un amphithéâtre en pierres sèches aménagé par un ermite au XVIIIè siècle, a été construit avec les pierres récupérées du château.

L’abandon du village perché peut être ici précisément daté. En 1340, l’archevêque d’Aix en tournée pastorale autorise les habitants à déplacer la paroisse dans la vallée, à l’emplacement du village actuel. Notre dame d’Inspiration, site de la commune de la Roquebrussanne

IMG_6553.JPGIMG_0511.jpgLa seconde cache sera GC1Q6WH le vallon d’Orris de papounet83 ; le GPS nous conduit près de la cache par la carraire du Pas de la Nible, mais ce n’est pas le bon chemin. Nous rebroussons chemin et prenons celui juste au dessus. La zone est composée de roches dolomitiques que l’érosion a sculpté en étranges silhouettes. L’étude complémentaire sur l’environnement réalisée pour déterminer le tracé de la ligne LGV reconnait qu’il sera difficile d’éviter le passage dans ce micro-paysage…

IMG_6557.JPGL’improvisation n’a pas que du bon : la fameuse cheminée tant citée par l’ensemble des geocacheurs, se trouve dans le sens déconseillé, celui de la descente. Nous décidons de l’observer d’en haut avant de décider si nous prendrons la variante (en revenant sur nos pas jusqu’au Pas de la Nible puis direction ouest sur l’ET4). Nous passons sous une arche (balisage brunâtre ou vert) avant de découvrir la cheminée, étroit passage entre deux barres rocheuses.

IMG_0482.jpgIMG_0493.jpgVue d’en haut, elle nous impressionne (balisage verdâtre). Ti’Mars… l’observe longuement, tente une première approche par la droite avant de décider que c’est par la gauche qu’elle est le plus facile. Le passage est haut, étroit et raide : il faut poser les coudes à plat de chaque côté puis jouer des pointes de pieds pour descendre ce premier obstacle, sans les sacs à dos. Passé ! mais bientôt un second passage pose problème : mon pied gauche se coince, mon sac à dos me gêne. Je le passe. Le troisième passage nécessite de descendre en se retournant. Le reste du parcours moins technique requiert cependant quelque attention. L’arrivée sur la source des Orris GC1Q6VM de papounet83 sera notre récompense.

Ce terme d’Orris1 n’existait pas du temps de la première carte de Cassini en 1779. Il apparaît par contre sur le cadastre napoléonien vers 1831. Les orris désignaient au XVIIIè un nom commun et non un nom propre. C’est l’usage oral qui a sans doute transformé ce nom en nom propre. La preuve par M. Béraud, notaire, qui écrit en 1722 au moment où la peste atteint la Roque-Brussanne :

pour moi j’avais gagné les orris avec le cousin Nicolas Bosc, mareschal2 à qui cette terre appartient, et nous fûmes assez heureux d’être exents de cette maladie [la peste]. Il y avait des barrières aux extrémités du terroir […] où on allait prendre en payant tout ce qui est nécessaire pour la vie.

IMG_0501.jpgIMG_0496.jpgPar analogie avec ce terme employé également dans le massif du Canigou, au XVIIIè siècle, cela désigne le terrain de dépaissance3 du bétail. Selon le témoignage d’anciens du pays, « ce sont des bâtiments érigés en des lieux voués à la culture des céréales il y a encore 150 ans ; ils servaient […] de magasins provisoires pour les grains et, après la venue des troupeaux sur les pacages estivaux, d’abris pour les bergers et les agneaux, d’entrepôt pour le lait et de cave à fromages ». Terminologie Roussillon

Le site des Orris, base communale

Le site des Orris, mairie de la Roquebrussanne

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La boucle de Blachère à la Motte du Caire par la gypière


IMG_5817.jpgUn week-end de solitude comme j’aime à en faire de temps à autre. J’ai réservé à la Motte du Caire une modeste chambre d’hôtes – la maison des hôtes – où l’accueil est simple et cordial. Arrivée tard dans la matinée, je pars aussitôt pour la boucle de Blachère annoncée avec une seule étoile en difficulté. Elle le fut plus que je ne le pensais : j’aurais dû la faire dans l’autre sens en commençant immédiatement par la montée quand j’étais encore en forme.

IMG_5821.jpgJe longe tranquillement le large terrain de vol à voile. Beaucoup de personnes viennent jusqu’ici pour frôler la montagne ou voler avec les oiseaux. Le chemin est long mais plat, longeant les cultures de pommiers recouverts d’un filet qui les protègent de la grêle, puis traversant un sous-bois. Je remonte ensuite sur la route, en longeant le Sasse, ce torrent parfois impétueux. Au panneau, je tourne à gauche sur le sentier rejoignant la gypière où se trouve un four à plâtre encore en bon état. Je m’assois sur le rebord près de la meule qui servait au broyage, et je prends mon pique-nique.
IMG_5835.jpgLe minerai de gypse, très répandu en Haute-Provence, est une roche plutôt tendre relativement aisée à extraire, que l’on «cuit» afin de la déshydrater presque complètement avant de la broyer ou de la moudre plus ou moins finement.

Four à plâtreIMG_5828.jpgIMG_5833.jpg

le four à plâtre : meule, axe de la meule, four

Le travail de fabrication du plâtre comporte trois étapes longtemps maîtrisées par les mêmes personnes :

  • L’extraction du gypse ou pierre à plâtre a lieu en général en carrière à ciel ouvert, à Clamensane par exemple ; le travail se faisait au pic, à la pioche et à la masse principalement, avec un transport au panier jusqu’au four, en général à proximité. Plusieurs communes géraient elles-mêmes de façon communautaire leurs carrières ouvertes aux habitants pour leur besoins personnels. La Motte-du-Caire instaure en 1900 une taxe visant uniquement les commerçants.
  • La cuisson : «les faiseurs de plâtre» empilent des blocs de gypse de plus en plus petits en formant une ou plusieurs arches dans une simple cavité circulaire, une «culée». Un feu de bois est allumé sous les arches pour une cuisson de plusieurs jours dans ce four vertical, à 100-150 degrés environ. La cuisson selon ce procédé n’était donc pas homogène […].
  • Le broyage : le gypse «cuit» est trié pour séparer au besoin les morceaux particulièrement «incuits» et les «surcuits». La fournée est mélangée pour homogénéiser l’ensemble. Puis le plâtre est réduit en poudre. Plusieurs systèmes coexistent jusqu’au XXè siècle : le battage à bras à la masse de bois à long manche souple, le broyage au rouleau de pierre sur l’aire à battre les céréales, à la meule dans un moulin artisanal. Ces moulins circulaires étaient souvent actionnés par des animaux. Le plâtre est ensuite (ou simultanément dans les moulins) tamisé plus ou moins finement.
    Transporté en vrac, en charrette, le plâtre pouvait être stocké ainsi dans un coin de grange, vendu cru par charge ou cuit par fournée. Il était alors mesuré jusqu’à la Révolution en «émine» (environ 33 litres) ou en «panai», valant une demi-émine. Après cette époque, il était conditionné en sacs de toile et mesuré en boisseaux (unité valant un décalitre), avant l’apparition des papiers composites contemporains pour un conditionnement de 40 kg.

Extrait de Deco-verone.com. Voir aussi le métier de gypier

IMG_5839.jpgIMG_5837-225x300.jpgJe me remets en route ; je m’égare dans les terres noires et rate l’étroit sentier qui s’enfonce dans la forêt domaniale du Grand Vallon. A partir de là, la montée sera continue et rude, surtout au moment de la digestion. Les moustiques m’attaquent férocement : je suis obligée de m’arrêter et m’asperger de l’anti-moustique que j’avais acheté pour mon voyage en Egypte. Parvenue en haut, les montées et descentes alternent continuellement sans jamais passer par le point culminant de la Blachère.

IMG_5847.jpgIMG_5843.jpgParvenue enfin sur le plateau du grand Abian (1131m d’alitude), le décor change : une large piste forestière bordée de pins, de vastes prairies, une ferme en ruine encore en activité au XXè siècle,  finalement un lieu qui invite à la détente. Je cherche un peu le sentier qui redescend sur le village. Pas très agréable, caillouteux, il serpente en sous-bois. Quelques arbres abattus en travers du chemin témoignent de la dernière violente tempête.

IMG_5849.jpgD’en haut, se laisse admirer le tableau composé de champs colorés au pied de la montagne. La descente me semblera longue. J’arriverai au gite pour le repas au cours duquel je serai initiée à la théorie du vol à voile et incitée à monter au sommet des Monges, ce que je ferai le lendemain (voir le sommet des Monges à partir d’Esparron la Bâtie).

Finalement un circuit plus difficile qu’annoncé à ne pas faire seul (aucune rencontre en chemin, impossible d’utiliser le téléphone portable). Le four à plâtre vaut le déplacement : on peut s’approcher en voiture.

Image de l’itinéraire 14km200 4h dépl. (5h au total) +877m -822m 480m dénivelée

De Céreste à Monjustin par les crêtes et la plaine


Après deux semaines sans bouger à cause de la pénurie d’essence dans les pompes, je reprends la marche vers un petit village que j’ai découvert il y a quelques années (voir Montjustin, village fortifié autrefois, village d’artistes aujourd’hui). Mais cette fois, je pars de Céreste où j’espère voir les fouilles du pont romain, premiers vestiges de la pile fortuitement mise au jour par une crue du torrent de l’Aiguebelle au cours de l’hiver 1998/1999. IMG_6340.JPGNous passons devant la chapelle Notre-Dame de Piété ; au-dessus de la niche de la façade, une coquille Saint-Jacques rappelle sans doute que nous sommes sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle à Rome.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Direction du vent et température ressentie

Le GR4/GR9 est bien balisé rouge-blanc. IMG_6344.JPG IMG_6346.JPGQuelque peu envahi par la végétation, il longe d’abord les villas, traverse des sous-bois puis s’élève sur les crêtes. Au sud, près de la route, quelques fermes isolées près de l’Aiguebelle au pied des collines. Nous marchons sur le socle calcaire et la marche est un peu moins agréable. Nous ne découvrirons les premières maisons de Montjustin qu’à la dernière minute.

IMG_0017.jpgIMG_6354.JPGLa commune de Montjustin, commune du parc naturel régional du Luberon, ne compte que 53 habitants (recensement 2006) ; presque toutes les maisons sont fermées en cette fin d’octobre. Juste après l’entrée du village, signalée par un panneau sens interdit où les chiens doivent être tenus en laisse, un puits qui a conservé sa vieille manivelle fixée sur une roue qui permettait de remonter l’eau sans effort. Après le premier virage, un escalier de pierre nous invite à monter dans la forteresse protégée par une tour ronde et un long mur d’enceinte restauré, sans doute le château de Luzerne. Les rues étroites tournent et retournent, découvrant de nouvelles maisons de pierres. IMG_6362.JPGRien de IMG_0022.jpgmoderne :  le village est resté authentique. Nous nous posons souvent la question de la violation de la propriété privée : aucun portail, aucune interdiction, nous circulons dans les jardins ou sur les places fleuries, sans distinguer ce qui est public de ce qui est privé, découvrant là une fontaine, un cadran solaire ou une statue bi-céphale.

Jean Ailhaud, né le 6 janvier 1675 à Lourmarin, […] acquit alors de la maison de Brancas les domaines importants de Castellet, de Vitrolles et de Montjustin et fut pourvu en 1745 de la charge anoblissante de secrétaire du Roi. […] Il en eut deux fils, Jean Gaspard, qui continua la descendance, et Louis, qui fut évêque de Carpentras. Jean Gaspard Ailhaud, Sgr de Castellet, de Vitrolles et de Montjustin, embrassa comme son père la profession de médecin. Ses deux fils, Jean Gaspard et Louis Théophile Gaspard, furent les auteurs de deux rameaux. L’auteur du second rameau, Louis-Théophile-Gaspard Ailhaud de Luzerne, né en 1756, épousa Mlle Mercier, dont il eut deux fils. Extrait du site de Gilles Dubois

Eglise en 2010IMG_0026.jpgJe retrouve l’église Notre Dame des Neiges à l’emplacement du village primitif, qui a quelque peu changé. Datant de la fin du XVIè, elle est contemporaine de la reconstruction du village qui avait été démolie en 1589 par le duc de la Valette parce que ses habitants avaient osé lui refusé le passage. On aperçoit encore un chevet à 5 pans, une partie de la nef. Je n’ai pas trouvé la pierre romaine réemployée dans l’édifice (voir site de la DRAC) mais il est difficile de contourner le monument et impossible d’entrer dans l’édifice par les escaliers. Histoire de Montjustin d’après Raymond Collier, dans la Haute Provence monumentale et artistique, Digne, 1986

IMG_0029.jpgPar un escalier le long du bâtiment affecté aux toilettes (bien entretenues !), nous atteignons la mairie qui a posé sur sa façade l’affiche des deux otages français en Afghanistan. Nous nous rendons au cimetière en suivant le sentier (PR jaune : Céreste par la plaine) où deux artistes célèbres ont été enterrés. Nous contemplons les crêtes du Luberon, la plaine de Reillanne et d’Apt, le Ventoux au lointain.

IMG_6370.JPGA peine visible sous les frondaisons, le cimetière éloigné du village, semble abandonné. Nous ne voyons aucune croix, aucun monument de marbre. La tombe du célèbre photographe Henri Cartier-Bresson, est simplement plantée de pieds de lavandes et massif de bruyère, avec un jeune olivier protecteur à son pied. Un contraste saisissant avec la célébrité de l’homme. http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Cartier-Bresson

« En fin de compte, la photo en soi ne m´intéresse absolument pas. La seule chose que je veux, c´est retenir une fraction de seconde de réalité ». Pour Cartier-Bresson, l’image naît d’un instant, sous l’œil attentif du photographe qui déclenche spontanément. Légende vivante de la photographie, il témoigne de l’histoire d’un siècle au travers d’images prises sur le vif, instinctives et parfois prémonitoires. l’Express

Centenaire de la naissance de H. Cartier-Bresson Fondation HCB

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