La colline Saint-Jacques, Cavaillon


Seconde visite 18 ans après la première – La colline Saint-Jacques (septembre 2007) – sans jouer au geocaching, depuis un autre parking (celui du sentier promenade de Saint-Jacques), donc avec un oeil entièrement tourné sur ce qu’il y a à découvrir. J’ai donc décidé d’écrire un second article.

Nous partons en direction des baumes parmi lesquelles La Grande Baume dont la large entrée mène dans les profondeurs de la grotte ; je n’y ai pas trouvé mention d’une fouille attestant que nos ancêtres y vivaient dès la fin du néolithique ; c’est sans doute pour cela que le panneau mentionne La colline semble avoir été utilisée par nos ancêtres dès la fin du néolithique. Cependant, c’est probable puisqu’en 1935, tout proche, au pied du versant ouest de la colline Saint-Jacques (autrefois Cavéu), un matériel céramique souvent abondant, a été mis au jour s’échelonnant depuis le Premier Age du Fer jusqu’au Ile s. ap. J.-C. Oenochoes à anses torsadées de la Base vallée du rhône : une production tournée vauclusienne d’époque augustéenne, Philippe BORGARD, Dominique CARRU, SFECAG, Actes du Congrès d’Orange, 1988

Des aménagements (murets de pierre, citerne, alcôve) témoignent de leur réutilisation à l’époque moderne.

Après avoir contourné les grottes, nous atteignons les carrières utilisées de l’Antiquité au Moyen-âge ; pour trouver des traces d’outils et de mode d’extraction, il faut grimper au dessus du sentier : des empreintes négatives d’extraction, des traces d’escoude. La roche est découpée longitudinalement par rapport à sa strate de sédimentation en fonction du sens dans lequel elle sera posée dans la construction, puis taillée sur le lieu de construction.

Petite hésitation sous le pylône à haute tension ; André opte pour la droite, mais c’est finalement à gauche sous le pylône ; quelques marches puis André me présente le pistachier-térébinthe aux baies rouges qui changent de couleur (blancs, roses, rouges puis bruns à maturité), aux feuilles caduques, qu’il perd donc chaque année. Un arbre de la garrigue plein de ressources puisqu’on utilise ses baies, sa résine et son bois.

L’essence de térébenthine lui emprunte son nom car elle était, à l’origine, fabriquée avec sa résine distillée. On l’emploie dans les peintures, vernis, cirages, produits pharmaceutiques… […] On peut les manger mais leur saveur est aigrelette. On les utilise plutôt pour produire une huile comestible. […] Son bois, excellent pour le chauffage, est aussi utilisé par les ébénistes pour réaliser de magnifiques ornementationsARBRE

En cette année Cezanne, je pense à un pistachier célèbre, celui de la cour de Château Noir (Le Tholonet), peint en 1900.

Paul Cezanne, Pistachio Tree at Château Noir, France (Artist’s nationality), 1895–1905, medium : Watercolor with graphite on cream wove paper, laid down on tan wove paper, 54.2 × 43.3 cm (21 3/8 × 17 1/16 in.), Mr. and Mrs. Martin A. Ryerson Collection, Reference Number,1937.1030

Ramené de Constantinople en 1834 et planté dans la cour du Château Noir, il a, vers 1850, servi à greffer avec succès de nombreux pistachiers térébinthes de la propriété. Un greffon a été implanté au Conservatoire des pistachiers de Provence, à La Ciotat. Un autre est parti pour le Jardin des Plantes à côté d’un célèbre pistachier mâle planté vers 1700. D’après Les fruitiers rares, article de 2003 par Françoise LABOREL et Lionel TREBIE.

Le laurier-tin à côté est toxique pour humains, chiens et chats, mais sa capacité d’absorption notamment des métaux lourds en fait un indicateur écolo de la qualité du sol.

La voie dite romaine me laisse presque aussi dubitative qu’en 2007 ; s’il y a voie romaine, ce n’est pas une grande voie de communication utiisée par les légions romaines, comme l’est la Via Domitia qui passait dans la plaine, traversait la Durance en radeau flottant à Cabellio (Cavaillon). Le géographe Strabon, dit qu’elle est excellente l’été mais toute fangeuse en hiver ; lors de sa visite en pays cavare, il signale l’existence d’un chemin gaulois. Les romains ont peut-être réaménagé cet axe Nord-Sud : les dernières fouilles (2016 ?) le laissent penser.

La principale caractéristique de cette occupation tient à la découverte de plusieurs vestiges antiques, dont un tronçon inédit de voirie antique, qui, à l’origine, desservait côté nord l’oppidum de la colline Saint-Jacques, […] et enfin, le long du chemin de Béraud, de deux sépultures à incinération du Ier avant J.- C. Département du Vaucluse

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** Le chemin des peintres à L’Estaque


Malgré les contraintes imposées – balade courte, ombragée, peu de dénivelée et cependant quelques centres d’intérêt, André a trouvé la bonne idée : le hameau de L’Estaque rattaché à Marseille 16e ; j’ai mixé deux tracés : celui de l’office du tourisme et celui bien documenté en vidéo des petites balades urbaines ; j’ai ajouté nos divagations. Dans l’air du temps puisque Aix fête Cezanne en 2025, nous y retrouverons le peintre. C’est le village des chichis fregis1 que l’on vient de loin pour la dégustation.

Estaque : du provençal estaco = attache, lien ; l’anse de L’Estaque est protégée du mistral par la chaîne de la Nerthe et des vents d’est par les collines de Mourepiane. Ce nom viendrait donc des nombreux pieux servant à l’amarrage dans le port. En 1718, des capitaines marseillais affirment que les bâtiments qui partent de cette ville et un grand nombre de ceux qui y arrivent sont mouillés avec plus d’assurance et moins de danger à l’endroit appelé L’Estaque qu’ils ne l’étaient autrefois à l’Aiguille et au Frioul. Gilbert Buti, MMSH-CNRS-TELEMMe

Revue Marseille, juillet 2024, Marseille et le Bassin de Séon, n°269

Comme annoncé, le point de départ est au bout de la digue ; les deux premiers panneaux nous rappellent l’importance de la pêche à la sardine, aux oursins dès le XVIIIe. Un énorme navire de croisière manoeuvre juste en face.

Nous revenons sur la rue du bord de mer en passant devant l’ancien hôtel de voyageurs Mistral (du nom d’un restaurateur Laurent Cyril Mistral). Il ferme en 1943, est racheté par Kuhlmann et aujourd’hui transformé en logements. Il garde d’époque un joli balcon en fer forgé qui se poursuit côté ouest, et des bandeaux de céramique sur sa façade. Derrière, on devine les jardins.

Le premier chalet-restaurant de 1860 est reconstruit en 1888-1890, après la création de la route, par un nouveau restaurant et de nouvelles cabines de bains. Il était situé en bordure de mer, en vis-à-vis de l’hôtel, avec appontements pour ceux qui arrivaient en bateau ! Une passerelle de bois les reliait par le premier étage et passait au-dessus de la route : elle attirait curieux et photographes. Photo IVR93_20111300091NUC2A, Degaye, Copyright (c) Ville de Marseille Bibliothèque Municipale à Vocation Régionale

Nous nous engageons dans la traverse Mistral, à la recherche du lotissement Druilhe. Un passage en chicane accède à la traverse du Lion – lion sculpté qu’André a trouvé lors d’une seconde visite – qui domine les courettes individuelles situées à l’arrière des maisons : nous avons donc une vue plongeante sur celles-ci et sur leur mur de clôture. Chaque courette possède un puits, commun avec celui du logement voisin, séparé en deux par le mur de clôture. Vu qu’il y avait là une ancienne tuilerie, nous ne nous étonnons pas de trouver des pans de murs de tuiles.

Sous-lotissement Druilhe, du lotissement concerté des Creux. En 1863, Victor Tamisier y construit une tuilerie qui est démolie en 1875. En 1887, le terrain est vendu à Julien Druilhe, lui aussi tuilier, qui entreprend de rentabiliser cette friche industrielle par la construction d’un lotissement locatif. Dossier inventaire

Promenade Cezanne à Gardanne


Image à la Une : Gardanne vue de la colline des Frères

Balade faite en 2024 avec Anne, et en 2025 avec André, à l’approche du début des grandes retrouvailles entre la ville d’Aix-en-Provence, et un de ses plus illustres peintres, Cezanne. La petite commune de Gardanne avait prévu cette balade en 2006, lors du centenaire de sa mort. En 2025, plus aucun dépliant en français de l’excellent document 1885-1886 : Cezanne in Gardanne, Service communication de la mairie, préface de Denis Coutagne, édito de Roger Meï, maire de l’époque.
Version numérique sur Cezanne à Gardanne.

La météo ce jour à gardanne/13 :
Avec le vent et la température ressentie

Nous sommes partis du grand parking Mistral, avons rejoint l’office du tourisme pour obtenir le nouveau dépliant sur la promenade Cezanne qui a inspiré celle que je vous propose. Promenade jalonnée de panneaux d’information dont quelques reproductions des œuvres de Cezanne faites à Gardanne et posées là où le peintre aurait installé son chevalet. Deux belles montées d’escalier pour rejoindre la montagne des Frères.

Cette petite colline boisée à deux pas du centre surplombe le village de quelques mètres. L’avenue des Ecoles, la rue Jean Macé, le Bd Paul Cezanne n’existaient pas en 1900 (ni même en 1950), si bien qu’au pied de cette colline boisée, Cezanne pouvait voir le village, le futur emplacement de la nouvelle église Sainte-Marie et l’étagement des vieilles maisons du village. Ce n’était qu’un village rural de 3 000 habitants : aujourd’hui plus de 21 000.

La vieille église près du clocher menace de tomber malgré les travaux urgents de Prosper Deleuil au début du XIXe ; la famille Gras fournit un terrain ; l’abbé Ferdinand Meissonnier prépare la construction d’une nouvelle église en 1888, le curé Bicheron l’entreprend en 1905 ; elle est bénie par l’archevêque d’Aix en 1906. Trop coûteux, le clocher ne sera jamais construit.
Une cour précède le portail, des jardins environnent les nefs latérales. D’après Recherches archéologiques et historiques sur Gardanne, M. Chaillan, Coll. Monographies des villes et villages de France, Rassorts Lorisse, Paris, 2006
C’est lui qui a fait élever la Croix de Provence au sommet de la montagne Sainte-Victoire en 1875, et sa réplique sur un des moulins du Ca(p)tivel en 1894.

Plusieurs panneaux évoquent Cezanne y compris dans la langue de Shakespeare ; les tableaux ont été sous-titrés mais ce ne sont pas toujours les titres des musées ou de la Société Cezanne.

Arrêt devant le tableau de Gardanne vue horizontale. Sur une carte IGN, si on tire une ligne droite d’ici jusqu’au clocher qui est le motif central, on s’aperçoit que les moulins sont sur cette ligne et pratiquement invisibles à l’oeil nu : ce n’est donc pas tout à fait de là qu’a été peint le tableau…

Devant Gardanne en vue verticale, je partage l’opinion de Pavel Machotka sur le site de la Société Cezanne :

[…] et grâce aux photographies des panoramas verticaux, point de doute possible, les arrangements qu’il a peints sont ceux qu’il a vus. Les deux tableaux verticaux sont subtils autant que d’une stabilité qui rassure. Les couleurs des tableaux diffèrent considérablement, du fait des saisons où ils ont été peints. Pavel Machotka

Gardanne,vue verticale

Probablement le même point de vue que celui de la photo, jusqu’au cabanon en bas à droite. A l’époque de cette peinture, le deuxième moulin ne porte pas encore de croix.

Photographie Gardanne vers 1900

Sur cette carte postale du début du XXe, vous reconnaissez le clocher, la vieille église qui ne sera détruite que dans les années 1930, et le futur emplacement de la nouvelle, la chapelle des Pénitents et les moulins du Ca(p)tivel. Photo atelier Baudoin Marseille, Camous éditeur

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