Refuge Baudino par la Torque


Une randonnée sur la face sud de la Sainte-Victoire, au départ du parking du Saut du Loup, qui m’a plutôt surprise : aride et dégagée habituellement, ici, pendant un long moment, on traverse une zone boisée et de garrigues ; au vu des formes et de la composition de certaines roches, différentes de chaque côté de la Torque1, on évalue le témoignage des bouleversements tectoniques. Le temps est gris, quelques gouttes de pluie assombriront les photos mais ça vaut le déplacement.

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Le domaine départemental de la Torque, ce sont 91 hectares situés sur la commune de Puyloubier auquel on n’accède qu’à pied. Au loin la Torque en forme de couronne aplatie et pentue qu’il me faudra contourner pour atteindre le refuge. Le sentier étroit, parfois difficilement repérable, sinue jusqu’au pied de l’énorme rocher aux formes dodues fortement inclinées. Alors que je suis proche du rocher, je vois arriver de Saint-Ser un grand rapace qui plane longuement, très haut dans le ciel. Dans ce coin de nature, où courent lièvres et petits rongeurs, nourriture principale des aigles, je me plais à imaginer qu’il s’agit de l’aigle de Bonelli si rare à la Sainte-Victoire. Tout en bas, la ferme de Genty.

Lors de la première phase tectonique importante, une compression brutale entraîne la formation d’un pli anticlinal dans la région de Sainte Victoire. L’érosion de ce nouveau relief engendre des éboulis qui une fois cimentés formeront les brèches visibles à la Torque. La faille du Delubre représente une limite naturelle : il s’agit de l’endroit où la partie occidentale  de la falaise sud se décale d’environ 200 m par rapport à celles du Pic des Mouches.

Association pour le Reboisement et la Protection du Cengle et Sainte-Victoire

Plus je monte, plus je distingue clairement la forme de cuvette du plateau du Cengle (qui fut un lac il y a fort longtemps). Tapissé de mosaïques de verdure, avec quelques habitations éparpillées (dont la célèbre ferme templière de Bayle), le plateau est couronné d’une barre de calcaire blanc que l’on voit encore mieux depuis l’autoroute A8.

La Barre du Cengle est constituée de strates épaisses de calcaire massif. Elle présente un grand nombre de diaclases orthogonales aux strates. Localement, ces diaclases favorisent la circulation d’eau et la dissolution de la roche. Peu à peu, les diaclases s’élargissent et des blocs écroulés se retrouvent au pied de la barre. Extrait de la lithothèque de l’académie d’Aix-Marseille

La montée est de plus en plus difficile sur un sol caillouteux parfois dérapant ; le ressaut rocheux au pas de la Torque, assez impressionnant vu d’en bas, se franchit avec prudence derrière le rocher de la Torque. Après une petite erreur d’aiguillage, je repère la trace rouge sur les rochers. L’arrivée sur ce balcon naturel, dans l’îlot de verdure entourant le refuge Barthélémy Baudino, est un vrai réconfort. De là haut, au delà du Cengle, le regard balaie « la plaine de l’Arc, l’agricole Trets, l’industrielle Rousset, la chaîne du Regagnas, les monts Auréliens ».

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Aux portes des Alpilles : Notre-Dame de Beauregard


Voyageurs, n’avez-vous jamais vu le long de l’autoroute A7 le panneau fléché indiquant « Notre Dame de Beauregard » perché sur sa colline ? ne vous êtes-vous jamais dit qu’un jour il faudrait que vous alliez la voir ? fin août 2008 : je m’y rends en voiture ; cette fois, pas de triche,ce sera à pied. C’est jour de vide-grenier dans le village : impossible de se garer dans le centre.

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Du cœur du village se profilent les vestiges du château du Duc de Guise ; je m’y rends en passant sous la porte de l’Hortet. Ruines imposantes où il est probablement risqué de s’aventurer. Après les Templiers au XIIIè, au fil des siècles, le château d’Orgon, puis l’église sont tour à tour démolis puis reconstruits. En 1653, la communauté d’Orgon reçoit d’Henri de Guise « les îles, accréments et atterrissements » de la Durance.

L’oratoire de l’Annonciation est le premier des oratoires qui jalonnent le sentier menant à la chapelle Notre-Dame-de-Beauregard. Il est situé à proximité du portail du château des Ducs de Guise. Construit en pierres de taille, il abrite une sculpture dégradée représentant l’apparition de l’ange Gabriel à la Vierge Marie.

En 1562, pendant les guerres de religion, le Baron des Adrets saccage et profane le sanctuaire. Il précipite dans le vide la statue de la Vierge que l’on recueillera intacte. Un monument expiatoire évoque cet acte tragique [ndlr : voir le monument expiatoire dans les jardins en contre-bas].
Le couvent de Beauregard a été construit de juillet 1638 à avril 1660. A la Révolution Française , les religieux furent chassés, leurs biens confisqués ou vendus. […] En 1840, il ne subsiste que les murs en ruines. C’est en 1878 que le Chanoine Bonnard, curé d’Orgon, fait restaurer le vieux couvent et surtout édifier une nouvelle église. Extrait de notre Dame de Beauregard, site de l’association les Amis de Beauregard.
En octobre 1983, John Fano […] décide de s’y installer avec l’accord de la municipalité d’Orgon. Il crée en 1984 l’association des Amis de Beauregard pour la sauvegarde et l’animation culturelle de Beauregard. En 2004, dans cette dynamique culturelle, Isabel De Géa, céramiste, investit Beauregard. Elle y installe son atelier de poterie.

J’entre dans l’église ; j’y trouve le traditionnel chemin de croix, dont les stations sont sculptées avec grande précision. Ce n’est qu’au retour que j’apprendrai grâce à ce livre récemment paru Venelles : Monographie d’un village de Provence, Jean-Claude Caillaud, Alain Balalas, Jean-Marc Héry, BOD, 2012, que c’est le venellois Félix Chabaud qui a réalisé cette oeuvre. Dans le fond de l’abside, une barque rappelle la légende de Marie, Jacques, et Salomé, débarqué aux Saintes-Maries de la Mer.

A l’extérieur, la statue de Marie fait face à la vallée de la Durance ; au sud de la chapelle, à l’intérieur des fortifications du château, près de la vigie, vous trouverez une table d’orientation.

Notre Dame de Beauregard, berlan egilab

Je descends la route le long d’une impressionnante falaise de calcaire urgonien, curieux qualificatif signifiant originaire d’Orgon : quel honneur pour le village !

L’Urgonien est une formation décrite la première fois par D’Orby, en 1847. Cette dénomination désigne, dans les massifs subalpins septentrionaux, les calcaires comparables à ceux d’Orgon ; l’urgonien est caractérisé par sa teinte très claire, souvent blanche et à sa pureté en carbonate de calcium. Grâce à sa solidité et sa couleur blanche, il est très employé dans la construction (par exemple, chapelle Saint-Michel de Cabannes, quelques parties du palais des papes d’Avignon). Il contient des fossiles.

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Romanin et les Alpilles


Point de départ : la chapelle de Romanin près de l’aérodrome éponyme, sur la voie Aurélia. Le circuit passe en sous-bois au pied de la chaîne des Alpilles puis redescend dans la plaine à travers les vignes.

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Je longe la piste de l’aérodrome jusqu’au croisement avec le GR6 ; j’ai déjà croisé six VTT ; au loin, j’aperçois les ruines du château de Romanin. Frédéric Mistral originaire de Maillane (1830-1914), se disait descendant des seigneurs de Mondragon et de Romanin . Stéphanette de Romanin, de la maison des Gantelme, tenait de son temps cour d’amour1 ouverte et plénière en son château. La légende ci-dessous témoigne de sa réputation.

Pierre de Chateauneuf, jeune troubadour rêve à sa dame tout en chevauchant dans le défilé de Vallongue tout proche. Il se dirigie vers où l’attendent 12 femmes de haut lignage. Tout à coup, de l’épaisse forêt de chênes, surgissent des brigands. Ils le désarçonnent, le dépouillent de ses habits, de sa bourse, de son luth. Le voici à terre, nu comme un ver, tandis qu’on s’apprête à le rouer de coups. […] Soudain une idée traverse son esprit : humblement, il prie les brigands de lui permettre de chanter une dernière fois avant de mourir. Sa prière est exaucée. […] il improvise un chant à la gloire de ses détrousseurs. Miracle ! les poignards s’abaissent, et on reprend le chant avec lui. Pourpoint, chemise, bourse, cheval lui sont rendus dans l’allégresse générale. Tous chantent et l’escortent jusqu’à Romanin qui se profile dans la lumière dorée. […]
La Provence et l’Amour, Maurice Pezet, Editions F.Sorlot, F.Lanore, 1984

Le quartier des Pins du Sinsarre est probablement une zone de chasse : traces de sanglier, champs d’agrainage tout en longueur entre deux zones boisées. A Camini Luen, c’est une vingtaine de VTT que je croise : un VTTiste me suggère d’éviter le chemin sur lequel dévalent les coureurs. Vers 11h une jeune femme s’arrête en plein bois ; elle est partie un peu tard, m’avoue-t-elle ; « vous n’avez pas peur toute seule dans les bois ? Justement je suis la dernière de la course et vous ne rencontrerez plus personne ». Je la rassure : j’ai tout ce qu’il faut : du téléphone portable à la trousse de pharmacie en passant par la couverture de survie.

Des affleurements discontinus de marnes rouges, dans un massif karstifié, peuvent paraitre surprenants mais nous ne sommes pas loin du pays de la bauxite (minerai dont on tire l’aluminium) et des Baux de Provence.

En me rapprochant du massif rocheux, j’aperçois au loin une grotte dont je ne trouve pas l’accès. Je tenterai cependant d’en découvrir une autre, traversant une végétation hostile, dérapant dans un pierrier long et pénible ; après de nombreux allers et retours pour m’infiltrer entre les arbustes, quelques pas d’escalade, j’ai trouvé une grotte largement ouverte sur l’extérieur ; elle sent fort l’animal sauvage, ce qui me fait craindre d’y trouver une colonie de chauve-souris géantes !  je m’installerai sur le parvis pentu le temps d’un pique-nique. J’aurais préféré trouver la grotte ornée d’Otello…

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