Pain de munition, Citadelle : une demie journée pour deux oppida


Sur toutes les cartes IGN, à Pourrières, est repéré un sommet : le Pain de Munition (612 m), à l’est de la montagne Sainte-Victoire. L’origine latine Petra Munita se traduit par roche fortifiée… Avec la transmission orale, en 1878, le dictionnaire archéologique de la Gaule l’appelle ‘camp des subsistances’, évoquant ainsi un camp militaire et la ration de pain cuit rassis entre bis et blanc qu’on donne à chaque soldat depuis bien longtemps. Ce camp est traditionnellement associé au dernier camp romain établi par Marius avant d’arriver sur les positions de combat contre les Teutons et les Ambrons en 102 av. J.-C. Dans une longue démonstration, avec des arguments géographiques et militaires, les Actes du 88e Congrès national des sociétés savantes, Clermont-Ferrand 1963, Congrès national des sociétés savantes, Impr. nationale, Paris, 1965 tentent d’apporter la preuve que les romains s’y sont retranchés.

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Nous nous sommes garés près de la route D23, à l’entrée d’une piste qui nous mènera au sommet. Très vite sur la droite, dans les bois, d’énormes champignons attirent notre attention : grâce à André qui identifie un agaric, et à son pied qui ressemble à une peau de couleuvre, je pense qu’il s’agit d’un agaric couleuvré dont l’odeur de noix est caractéristique.

Le temps est couvert sur Sainte-Victoire. Le sentier part à l’assaut de la colline  par une marche de trois quarts d’heure dans un maquis de chênes. Le premier mur d’enceinte en pierre sèche, écroulé, est de belle largeur. En descendant, on peut repérer plus ou moins bien, deux autres enceintes : ces trois enceintes concentriques de forme ovale, c’est une configuration unique dans la région. Jusqu’au début du XXe les études n’en avaient recensé que deux. Bulletin de la Société languedocienne de géographie, Volumes 46 à 47, 1947
Selon les Annales de la Faculté des sciences de Marseille, Volumes 13 à 15, Faculté des sciences de Marseille, Imprimerie marseillaise, 1903 ce ne serait pas un simple établissement militaire mais un véritable lieu d’habitation permanente. Je n’ai trouvé aucune trace écrite de fouilles méthodiques : il faut se contenter des armes de métal et poteries romaines qu’on a trouvées en surface.

La vue est imprenable sur la route : un véritable point d’appui pour contrôler un axe de circulation et un carrefour de voies. Les Celto-Ligures avaient le sens stratégique. Var Provence-Info, Julien Peyrié

Habitat et société : actes des Rencontres 22, 23, 24 octobre 1998 : 8700 m2 au sol dont 1600 m2 aire intérieure, soit un oppidum de moins de 1 ha, postérieure à l’âge du Fer.
Dans le compte-rendu du Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistoriques, treizième session, Monaco, 1906, figure la coupe schématique d’un mur du Pain de Munition avec son fossé à gauche (?) ; je suppose que contre le mur était accumulée de la terre et étaient installées des traverses en bois assemblées par de longues tiges de fer.

Après avoir parcouru le sommet et profité d’un paysage à 360° côté Var et Bouches-du-Rhône, nous redescendons la piste rougeâtre jusqu’à la voiture. Un œil curieux dans une faille du karst laisse entrevoir un conduit creusé par l’eau, bien plus profond que ce que laissent supposer les apparences…

Direction La Citadelle à Vauvenargues.

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** Ile de Port-Cros : plongée et visite du fort de l’Estissac


Dernière journée sur une des îles d’Or – Port-Cros1 – avec Mattis 17 ans, venu de Norvège pour visiter la France ; il fait vraiment beau (25° annoncé) et j’espère qu’il pourra se baigner – sur une île des Lofoten, je l’ai vu se baigner dans une eau à 10° ! -, filmer les poissons et visiter au moins un fort. En cette fin de saison, il n’y a plus qu’une navette le matin à 9h au départ de Hyères, trop tôt pour nous qui venons d’Aix-en-Provence, et deux au départ du Lavandou : nous prendrons celle de 11h00.

La vedette est presque pleine et l’humeur joyeuse : beaucoup d’étrangers et de retraités qui passeront la journée sur l’Ile du Levant ou sur celle de Port-Cros. Nous longeons le cap Bénat dont je reconnais le phare. La vedette passe entre la pointe nord de l’île de Bagaud et  celle du Miladou de Port-Cros, entre dans  la rade face au fort du Moulin ; aussitôt, les marchandises transportées depuis le continent sont déchargées. Le canon face à la mer rappelle qu’ici cinq forts ont été construits depuis Richelieu pour défendre nos côtes et la rade de Toulon : Port-Man, l’Estissac et l’Eminence, le fortin de la Vigie, le fort du Moulin.
Pas de chien, pas de voiture ni de vélo, pas de pêche de loisir ni de chasse : nous sommes dans un parc national protégé. Port-Cros a gardé son côté naturel et sauvage : seulement une trentaine d’habitants en hiver, une grosse centaine en été et 300 000 touristes de passage chaque année.

Nous allons en premier à l’accueil du parc National de Port-Cros pour avoir une carte de l’île (3€) et obtenir des informations sur les temps de parcours. J’apprends que le sentier sous-marin n’existe plus – je suppose que les balises sous-marines ont été enlevées à la fin de l’été – et que nous ne pourrons pas aller jusqu’au fort de Port-Man sans risquer de rater la dernière navette pour le Lavandou à 16h40.

Port-Man est le fort le plus éloigné, au nord-est de Port-Cros, sur une étroite arête rocheuse ; jusqu’en 1882 un faible armement y sera maintenu. Sur l’île proche du grand Rigaud, il abritait encore en 188 deux canons de 30 ; plus tard, on y a implanté un phare.

Nous partons directement pour la plage de la Palud où le mouillage est totalement interdit. Nous contournons le fort du Moulin et la tour à canon qui porte une inscription rappelant le nom du couple qui a protégé l’île d’une invasion immobilière : Marcel et Marceline Henry, derniers propriétaires de l’île avant qu’elle ne soit léguée à l’Etat, et qui reposent au tout petit cimetière du village (décédés respectivement en 1953 et 1966). Entouré d’un mur qui le rend encore plus petit, il contient une fosse commune où furent ensevelis les soldats morts au lazaret, à leur retour du Tonkin. Petite Histoire des Îles d’Hyères (des origines à 1930): Presqu’île de Giens, […], Emile Jahandiez, Rébufa et Rouard, Toulon, 1929
Pas si facile ce sentier rocheux, en arêtes aiguës, qui monte et descend sans arrêt, découvrant parfois dans une trouée une vue sur la mer, l’île de Bagaud puis le rocher du Rascas. Quand la plage est en vue, il faut encore marcher en longeant les falaises. 40 mn à partir du village ; avec des chaussures de randonnée, c’est mieux.

L’eau est toujours aussi claire, la baie de la Palud est bien protégée des vents, nous sommes dans les premiers à prendre possession d’un petit coin de plage. Mattis prend d’abord un bain ; il a pied sur plusieurs dizaines de mètres ; quand il revient sur la grève, il s’équipe de son masque de snorkeling, randonnée palmée de surface, pour voir et respirer dans l’eau comme sur terre ! Il doit s’ajuster parfaitement au menton (attention à la barbe pour les hommes !) ; nous testons la pochette transparente étanche et flottante pour qu’il puisse faire des photos sous l’eau. Son expédition sera longue mais fructueuse. Il ramènera à faible profondeur une belle vidéo de quelques  poissons de l’île sur les 180 espèces différentes qui la peuplent.
Une vidéo d’André Pierini avec en sous-titrage l’identification des poissons

La réserve de la baie de Palud est aussi un sentier sous-marin pédagogique ; de nombreux panneaux ont été immergés et présentent les espèces locales. Il alterne des prairies de posidonies et de petits îlots rocheux immergés qui affleurent à la surface.

Photos des poissons de Port-Cros, site de la Réserve
Photos des poissons réserve de la Palud, site snorkeling-exploration

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La mine de Cap Garonne au Pradet


Le lendemain de notre réunion de travail, Sylvaine et Bernard partent au boulot en vélo tandis que je me rends au Cap Garonne1. Le parking est désert et je ne croiserai que des scolaires en visite pédagogique. Mon objectif : le sentier de découverte Jean-François Jubé et quelques écarts selon mes envies du moment. Sylvaine a chargé mon GPS avec quelques caches dont une earthcache et ses nombreuses questions sur la mine :

EarthCacheLa mine de cuivre de Cap Garonne GC397A2, Dida03

Mes photos à Cap Garonne

Un technicien de l’eau a posé sa voiture juste en face du réservoir, s’active et s’attarde ; impossible de chercher la cache :
Le Bau Rouge, migar

La première chose que l’on voit, c’est la cheminée et les bâtiments de la mine. Son passé n’a jamais été vraiment florissant. En 1892, on y fabrique du sulfate de cuivre pour la viticulture, nouveau débouché pour un minerai pauvre en cuivre.

Messieurs Layet et Martel […] demandent l’autorisation d’exploiter une carrière de pavés de grés à Cap Garonne. Le maire de la commune de la Garde (Le Pradet n’existait pas encore […] s’aperçoit que les matériaux extraits contiennent du cuivre et du plomb. Il demande un indemnisation financière de 3 000 francs or et, en échange, il donnera son avis favorable à la demande de concession minière de Layet et Martel.
1862Autorisation sous Napoléon III pour une concession de cuivre et de plomb. Les premiers mineurs sont des italiens spécialisés dans le travail minier. […] Pour forer un trou de 60 cm, les mineurs étaient deux et il fallait 8 heures de travail à l’aide d’un fleuret et d’une masse. […] des enfants assuraient les allées et venues entre le forge et les mineurs.
Le minerai extrait est […] envoyé à Swansea […]. La teneur en cuivre à Cap Garonne est faible (3 à 8%) et, en France, on se savait pas traiter les minerais pauvres. […]
Rapidement Layet et Martel se rendent compte que la mine n’est pas rentable […]
1873Rachat de la mine par un anglais, Mr Unwin. […] Il sera le seul concessionnaire à rentabiliser la mine. […]
En 1877 se produit la rencontre avec une grande faille qui provoque un net ralentissement de l’exploitation.
1884Arrêt de la concession anglaise. La mine va fermer ses portes pendant 8 ans.
1892Reprise de l’activité avec le rachat de la mine par M. Roux. Il est le premier à envisager le traitement sur place du minerai pauvre par voie humide pour faire du sulfate de cuivre. Celui-ci servira pour la fabrication de la bouillie bordelaise[…]. Mais la mine n’est toujours pas rentable.
1899Rachat par la Société des Mines de Cap Garonne. […] c’est à nouveau un échec.
1903Rachat de la mine par MM. Enderlin et Roche qui mettent beaucoup d’espoir dans la construction de la ligne de chemin de fer Toulon-Hyères. Ils négocient la réalisation d’un embranchement de 4 km 300 qui dessert la mine. […] Malheureusement ils se heurtent à de nombreux problèmes techniques. […] La mine ferme pendant 9 ans.
1903-1916Dernier concessionnaire : M. Bolo Pacha […] vient en Provence où il rachète la mine par l’intermédiaire de M. Geydon de Dives. Mais il ne va l’exploiter, avec l’aide de 120 ouvriers, que jusqu’en Octobre 1917 date à laquelle on lui confisque ses biens. Il est arrêté et condamné à mort pour intelligence avec l’ennemi. Il sera exécuté en avril 1918. […]
3 octobre 1917, arrêt définitif de l’exploitation.
1933- 1956, Grâce à son ciment humide et tempéré, la mine de Cap Garonne devient une champignonnière. […] Les galeries étant laissées ouvertes, la mine est livrée au pillage. […] elle recèle en effet une extraordinaire richesse : plus d’une centaine de micro-minéraux dont les minéralogistes du monde entier connaissent l’intérêt scientifique.
1984, Les maires des communes du Pradet, de La Garde et de Carqueiranne sont conscients de l’intérêt culturel et historique que représente un tel site sur leur territoire. […] Les trois communes propriétaires des lieux se constituent en syndicat intercommunal et décident de fermer la mine.
1990, Le syndicat fait réaliser des travaux intérieurs de mise en sécurité. […]
9 juillet 1994, le Musée de la Mine est inauguré.
Extrait de l’histoire de la mine, site de la mine du Cap Garonne

Le circuit est court mais comprend de multiples points d’intérêt comme ce bassin qui recueillait l’eau de pluie servant à humidifier les caisses de bois pour la culture des champignons de Paris. Ensuite un panneau d’information sur les arbres : on retrouve tous ceux de la région (pins, arbousiers, chênes verts) avec en plus le chêne-liège caractéristique des sols siliceux.

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