Grâce à Yves voici un itinéraire campagnard pour se rendre au prieuré médiéval de Carluc à Céreste ; ma première visite date de 2006, c’était alors une de mes premières randonnées car facile avec un point d’intérêt remarquable.
L’album de Céline (cliquer sur l’oeil en haut à droite pour les visualiser)
Nous passons devant la chapelle de Piété (propriété privée) devant laquelle un rosier trémière a été planté. L’IGN s’évertue à appeler romain le pont sur l’Encrême, il ne l’est pas ;
le panneau directionnel de la gare le nomme pont roman, il ne l’est pas davantage ; la commune l’appelle pont de la Baou (1740), c’est mieux.
Le pont de la Baou, alterch
Nous passons devant un énorme réservoir puis devant des bâtiments dont la construction est « signée » (toit en triangle, fenêtres entourées de briques rouges, un étage) : nous reconnaissons l’ancienne gare de Céreste, située sur la ligne Cavaillon-Saint-Maime. Côté Vaucluse, l’emprise de la ligne est en partie réutilisée par la véloroute du Calavon. Le projet est, à terme, de relier Avignon à Volx.
Sur une carte postale ancienne datant de 1920 le train à vapeur arrive sur Céreste par la vallée de l’Encrême, à un endroit encaissé : elle est sous-titrée le derrunaou ; selon UnDeBaumugnes, cela viendrait du verbe derruna qui veut dire s’écrouler, s’ébouler, rouler. Faudrait que j’aille sur place pour comprendre ce toponyme.
La section entre Apt et Saint-Maime – Dauphin, est concédée à titre définitif à la compagnie du PLM […] le 26 mai 1883. […] La ligne et l’embranchement, tous deux à voie unique, sont mis en service le . La ligne comporte quinze ouvrages d’art dans son trajet en Vaucluse, et dix-sept dans les Basses-Alpes. Selon wikipedia Ligne de Cavaillon à Saint-Maime
Quand je vous disais que la balade était campagnarde : au loin un troupeau de moutons, au bord du chemin un cheval dans un pré s’approche de nous espérant obtenir quelques caresses ou friandises. La piste de terre est encombrée de cailloux mais rien de difficile.
Des champs à perte de vue avant d’arriver à l’ensemble architectural du prieuré de Carluc situé dans un vallon humide. Il a été l’objet de nombreuses recherches et… interrogations. Carluc est une étape sur la voie Domitia romaine signalée sur l’itinéraire d’Antonin, et étape sur le chemin de Compostelle : cela nous sera rappelé par la coquille dessinée sur les panneaux directionnels.
Quand nous arrivons sur le site, le premier monument que nous découvrons est la chapelle Notre-Dame dont l’abside polygonale prend appui sur les fondations de l’abside romane primitive, semi-circulaire à l’intérieur et pentagonale à l’extérieur. C’est une forme assez rare en Basse-Provence.
Ensuite une galerie à fonction funéraire avec des sarcophages de pierre de chaque côté ; à la fin de celle-ci un hypogée, espace rupestre funéraire supposé dédié à des personnalités, une salle couverte d’une coupole [chapelle Saint-Jean Baptiste ?], un appentis couvrant un espace ayant servi de carrière de pierres, une petite cellule creusée dans le rocher et une construction interprétée comme une chapelle [Saint-Pierre ?] qui aurait englobé une cellule rupestre. Dans un rayon de 200 m les tombes foisonnent autour de l’hypogée. Soyons honnête, j’identifie bien mieux le début de la visite que la fin.
Si l’on admet qu’un sanctuaire plus ancien a précédé le prieuré, la source près de la crypte pourrait évoquer une divinité aquatique ou une eau miraculeuse. Selon La Haute Provence monumentale et artistique, R. Collier, Digne, 1987
Vermot-Gauchy L, Le prieuré Saint-Pierre de Carluc, organisation monumentale et administration d’un relais de l’Abbaye de Montmajour en Haute-Provence du XIe siècle au XVe siècle, 2007, master 2, UNSA, sous la direction de Dominique Garcia
Boekholt C., Du nouveau à Carluc, ARCHIPAL, 61, 2007, pp.55-62
Au pied de l’ensemble architectural, un panneau d’information propose un hypothèse de restitution des lieux faite par J.M. Gassend de l’IRAA/CNRS. L’importance incontestable de Carluc par les dimensions du site, est confirmée par ses liens avec la célèbre abbaye de Montmajour et la quinzaine de prieurés ruraux sous son obédience.
Archinric, scribe de Montmajour dès 973-975, en devint l’abbé en 999 ; […] C’est probablement vers 1010 que l’abbé quitta Montmajour pour se réfugier à Carluc, bien que la nature et la motivation principale de ce retrait ne soient pas connues.
Le prieuré de Carluc, Serge Robert
Au sud de Carluc un lieu-dit Saint-Pierre, à 600 m à vol d’oiseau, a été fouillé en 2011 : on y trouve un bâtiment ayant servi de chapelle ; des tombes en bâtières, dont la datation est traditionnellement située dans les périodes hautes, autour des Ve-VIIe s., des tombes rupestres, des tombes en coffrage de pierres avec ou sans couverture de dalles et des tombes en pleine terre, attribuables aux Xe-XIIIe s. J’ai immédiatement pensé qu’il pouvait faire partie du site de Carluc mais selon la DRAC les hypothèses sur les liens avec le monastère de Carluc, où les textes mentionnent également une chapelle Saint-Pierre, ne peuvent pas à l’heure actuelle être confirmées ou infirmées. En tous cas, ces deux lieux ont la même fonction funéraire…
Les champs de lavande bordent la route revêtue ; de jeunes plants ont remplacé les plus vieux.
Les champs de courges ont parfois été dévastés par les sangliers. Au fond d’un petit parc planté de marronniers et platanes, le château de Valligrane sur la commune de Reillanne, construit entre 1650 et 1680, tranche avec les fermes alentour. Il appartenait à une vieille famille du lieu, les d’Izarny.
Le comte d’Izarny-Gargas est décédé en 2015, François d’Izarny-Gargas était en 2011 président de l’association de sauvegarde et d’animation du prieuré de Carluc, Louis auteur d’un Nouveau nobiliaire de France.
C’est l’heure du pique-nique, réclamée par certains, dans un décor champêtre au bord de l’Encrême, avec le Luberon pour décor. Le repas se termine par le rhum arrangé qu’Yves conserve dans ses fioles de métal, suivi d’un gâteau, d’un café et de la sieste pour certains.
Nous reprenons la route puis un agréable chemin bordé d’arbres hauts le long de la rivière. Un patou s’évertue à aboyer à l’intérieur d’une barrière souple électrifiée mais pourtant ne garde aucun mouton.
Les grands espaces verdoyants le long de la rivière accueillent de beaux spécimens d’arbres isolés.
La Bastide Neuve se reconnait à son mur de pierres sèches moderne et le parement arrondi devant le tronc d’un arbre.
Dans le pré, un troupeau de moutons gardé par un patou enroué, suscite notre empathie : certains agneaux chancellent encore, d’autres têtent leur mère.
Au lieu-dit Longroux – Le Long Roux au XVIIIè, peut-être à cause de la couleur de la terre autour de la propriété, terre qui contient des calcarénites rousses, selon le BRGM –, certains remarquent que les poutres du vaste hangar vont bientôt craquer.
La route monte, monte jusqu’à Céreste ; c’est l’église Saint-Michel que l’on voit en premier, avec l’harmonieuse construction de son campanile en fer forgé qui protège la cloche.
Il nous reste une visite à faire, jugée importante car elle n’avait pu se faire lors de notre précédente randonnée à Céreste. Nous déposons nos sacs à dos dans la voiture, repartons par la rue de la Bourgade ; sur la maison où vécut René Char, poète et résistant, une plaque est apposée.
Nous arrivons chez Scaramouche devant lequel plusieurs personnes sont déjà attablées. Après avoir rapproché plusieurs tables sur le sol en pente (attention, les verres et les coupes glissent !), nous consultons la longue carte des glaces et sorbets dont certains avec des parfums inhabituels : thym, hibiscus, pêche de vigne, basilic, etc. Les boules sont bien plus grosses que chez les autres glaciers ; avec trois boules (6.50€), je ne parviendrai pas à finir ma coupe.
Sur le chemin vers les voitures, l’œil aiguisé d’Yves a repéré deux arbres avaleurs de pancartes. La pancarte gêne l’arbre car elle l’empêche de grossir. Comme il ne peut la déplacer, il décide de passer par dessus.
Une randonnée facile, à moitié sur routes peu fréquentées, à moitié sur des sentiers, dans un paysage de champs, et bosquets en fin de randonnée. Idéale en automne ou pour reprendre la marche après une longue interruption.
Image de l’itinéraire 12km478, 3h20 déplacement (5h45 avec pique-nique, visite et dégustation de glace chez Scaramouche), 98m dénivelée (+208, -208). Télécharger la trace au format gpx
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