Les boules de Saint-André de Rosans


Balade courte mais surprenante, un petit voyage de 110 millions d’années, dans un paysage lunaire et surréaliste, sur le Serre d’Autruy, d’accès privé mais toléré alors sans hésitation, nous y allons. J’en avais entendu parler depuis plusieurs mois par Ti’Mars… et par le blog d’Irna.

Peu avant d’arriver dans le village, intrigués, nous passons devant un immense site entièrement clôturé et surveillé à l’entrée duquel une pancarte nous informe sans rassurer vraiment. Il s’agit d’un site de traitements de déchets ultimes non dangereux géré par le SMICTOM (Syndicat Mixte Intercommunal de la Collecte et du Traitement des Ordures Ménagères). « Les déchets ultimes sont ceux situés en bout de chaîne de traitement, c’est-à-dire que leurs caractères polluants ou dangereux ne sont plus à même d’être réduits davantage. De la même manière, leurs parts valorisables ne sont plus économiquement et/ou techniquement extractibles ». J’en déduis donc qu’ils peuvent encore polluer mais que l’homme ne sait pas encore les rendre totalement inoffensifs…
Visite d’un CTDU à Lesménils (instructif)

Un projet d’extension de ce site de stockage de Sorbiers est envisagé pour un coût de plus de 2 millions d’euros HT. Son sort est en suspens. C’est un habitant de Montjay qui s’oppose à l’extension du site : il a déposé 17 recours, seul le dernier n’a pas été rejeté.
Le Dauphiné, 20/09/2009

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IMG_9719.JPGIMG_9720.JPGLa localité de Saint-André-de-Rosans se signale par une autre curiosité sédimentologique connue sous le nom de boules de Rosans. Un beau spécimen trône d’ailleurs sur la place du village, d’autres servent de décoration dans les jardins. Nous nous garons sur le côté de la route, ouvrons et refermons soigneusement la barrière, longeons le champ avant d’arriver sur une immense surface sableuse parsemée de boules. IMG_9747.JPGNon, ce ne sont pas des oeufs de dinosaures ! IMG_9723.JPGPas toujours en forme de boules mais parfois de forme ovoïde, ou ressemblant à des tortues qui sortent la tête, à des carapaces coupées en leur milieu.

Sur le plateau de grès, parfois en dallage, les boules semblent progressivement perdre les différentes peaux de pierre qui les protègent : IMG_9754.JPGcomme si on les épluchait ! leur couleur est souvent plus soutenue mais il s’agit bien de la même roche que celle qui les accueille.

IMG_9735.JPGDans ces mêmes grès, toute une série de décorations, sous forme d’auréoles colorées, apparaissent à l’oeil attentif,  « liés à la circulation de fluides dans la roche et formés par la diffusion et la précipitation d’ions métalliques ». De petites concrétions métalliques de taille centimétrique se déchaussent parfois de la roche, laissant leur empreinte derrière elles. D’après le blog d’Irna

Sur le flanc de la falaise au contraire, les boules sont fichées dans la paroi tels des boulets de canon. Vous pouvez même en voir le long de la route. Mieux protégées de l’érosion, de surface lisse, elles émergent de la paroi, et finiront sans doute par tomber. Le phénomène ressemble à celui des boules de Buoux dont je vous avais parlé dans la boucle des Esconfines.

IMG_0012.jpgIMG_9738.JPGIMG_9741.JPGIMG_0015.jpg

Le banc de grès […] s’est formé il y a un peu plus de 110 millions d’années. A cette époque, toute la région de Saint-André se trouvait sur les pentes d’une fosse sous-marine.  Cette pente sous-marine recevait une sédimentation intense essentiellement sous forme de marnes. Mais il s’y produisait aussi régulièrement des épisodes plus turbulents, sous forme d’avalanches et de glissements de terrain sous-marins, amenant localement, […] des dépôts massifs de sédiments plus grossiers. C’est un de ces épisodes, une avalanche sableuse ayant rempli les chenaux creusés dans les marnes sous-jacentes sur près de 50 kilomètres de long, qui est à l’origine des grès de Saint-André de Rosans.

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L’extrémité du mur de la peste, Monieux


IMG_8180.JPGJe suis venue jusqu’à Sault où une visite guidée était organisée par l’APARE. Julie nous avait donné rendez-vous l’après-midi, devant l’office du tourisme. Profitant d’une matinée libre, je décide d’inventer un circuit me permettant de longer le mur de la peste, partie terminale de celui que j’avais découvert à Cabrières d’Avignon : voir le mur de la peste ou la malédiction du Grand Saint-Antoine. Le temps est gris, les nuages présents mais il ne pleut pas… pour l’instant.

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IMG_8183.JPGDépart du pavillon de Saint-Hubert, bastide d’agrément bourgeoise dominant le confluent de deux vallons, position privilégiée pour tirer le gibier poussé par les rabatteurs et leurs chiens. Parvenue au pas de Viguier, le mur de pierres sèches débute par un enclos : il servait d’entrepôt à vivres ou à fourrage pour les chevaux et mulets chargés de l’approvisionnement des troupes ; je me mets dans l’alignement du mur pour mieux en mesurer l’importance : il est long, 27km, construit autrefois « par de petites gens contraints et pestant », ossature d’une barrière sanitaire décidée en haut lieu et appelée la Ligne. IMG_8190.JPGHaut de 2m de haut et 0,60m à l’origine, il n’a pas été restauré sur toute sa longueur. Construit grossièrement avec des matériaux trouvés sur place, il est l’oeuvre de tâcherons pressés.

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** Autour de la pierre sèche à partir du relais de Saint-Hubert à Monieux


La visite était organisée par l’APARE. Julie nous avait donné rendez-vous à Sault, devant l’office du tourisme. Sault : Zone A, massif du Ventoux. L’été, contrairement à la zone B, l’accès est libre dans les massifs forestiers, sauf en cas de risque exceptionnel. Profitez-en !

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Sault, village perdu dans les Monts de Vaucluse entre la Nesque et le plateau d’Albion, à 1h30 de voiture d’Aix-en-Provence, rattaché au Vaucluse aujourd’hui, autrefois aux Basses-Alpes. Voilà une randonnée dont l’intérêt était grandement accrue grâce à la présence d’un guide professionnel, qui m’a bluffée. Moi qui ai tendance à penser que les sportifs ne s’intéressent qu’au sport, j’ai constaté que Daniel, lui, était curieux, se renseignant avec sérieux sur les objets de découverte le long du parcours. Ce n’est qu’après avoir posé quelques questions précises (dont j’avais parfois la réponse…) que j’ai pu constater que ses connaissances étaient solides et étayées. Il a prévu trois petites balades en étoile lui permettant d’aborder trois thèmes différents avec passage au point de départ entre chaque boucle :

  1. la ferme de Lauzemaulan et la vie au XVIIè,
  2. le mur de la peste construit peu après l’arrivée de la peste de 1720,
  3. les aiguiers du champ de Sicaude.

Cassini_L2E_ndespino_24_04_2011.jpegSur la carte de Cassini (1775-1776) je retrouverai les lieux évoqués par notre guide : Lauzemoulant, Grange Neuve, La Verrerie (activité du XVIIè), la Grange de Javon. Cassini

Photos de la randonnée avec Daniel
IMG_8218.JPGNous stationnons en face du relais Saint-Hubert, ferme-auberge et grande propriété agricole et forestière de plusieurs centaines d’hectares, situé sur un col à 820 mètres d’altitude, sur l’ancienne route qui reliait Sault à Apt. Il appartenait à la famille Bernardi, qui donna à la France des magistrats et hommes de lettre, musiciens et le célèbre peintre Evariste de Bernardi de Valernes. A côté de la conque creusée dans la pierre, le guide commence par son histoire en tant que pavillon de chasse bourgeois.

La ferme de Lauzemolan

GR9 sur un sentier typique du Vaucluse : sec et caillouteux traversant un lieu inhabité, laissé à l’état naturel depuis de nombreuses années. On a du mal à croire que ce secteur était anciennement cultivé aux abords des fermes de Lausemolan et Saint-Hubert.

IMG_8220.JPGIMG_8224.JPGLa ferme de Lauzemolan du XVIIè est une bâtisse de taille impressionnante, conçue pour une vie autonome ; elle possédait ses propres réserves en eau. Le départ des hommes à la guerre   en 1914 entraîna la désertification des Monts de Vaucluse et l’abandon des hameaux. La reconquête récente du monde rural a permis la restauration de quelques fermes dont celle-ci. Chaque détail de la construction prouve que les fermiers ont su s’adapter aux conditions difficiles : peu d’ouverture du côté où le vent souffle, ouverture au IMG_8234.JPGIMG_8225.JPGIMG_8229.JPGsud pour le soleil, un grand enclos délimité par un mur de pierres sèches pour l’élevage des ovins et caprins, un poulailler, une étable pour chevaux et mulets, un champ de lavande, des cultures en terrasse, une citerne couverte alimentée naturellement par des rigoles creusées dans le rocher, un four à pain,… On reconnait même une cuve à vin grâce aux carreaux vernissés qui en recouvraient les murs.

IMG_8243.JPGIMG_8244.JPGDélaissant la direction de la Jaille, nous revenons par le sentier botanique de Saint-Hubert aménagé par le Syndicat Mixte d’Aménagement et d’Equipement du Mont-Ventoux et la commune de Monieux.  Alors que nous devisons avec le guide, brusquement, tous les randonneurs s’arrêtent ; face à un immense de troupeaux de moutons, le patou qui le précède, sans le berger, monte la garde. C’est l’occasion pour notre guide de nous conseiller sur la meilleure attitude à adopter en de pareilles circonstances : tenir son chien en laisse, éviter de traverser le troupeau, et s’en éloigner. Nous décidons de grimper sur le bas-côté mais les moutons ont profité de la diversion pour en faire autant et aller grignoter quelques herbes odorantes. On traverse donc tant bien que mal le troupeau désobéissant dont un bouc aux cornes impressionnantes.

Le mur de la peste

IMG_8181.JPGNous sommes maintenant à la dernière extrémité connue du mur de la peste construit par les villageois réquisitionnés, pour tenter d’enrayer la progression vers le nord de la grande peste de 1720 venue de Marseille (je vous en parle dans un autre article L’extrémité du mur de la peste) ; nous sommes au pas de Viguier où de nombreuses traces d’exploitation du bois sont visibles. Autrefois dépeuplée puis surexploitée, la forêt était bien mal surveillée par les représentants de l’autorité des seigneurs, ces derniers propriétaires de la forêt ne résidant pas sur place. Plus récemment l’exploitation de la forêt n’avait plus rien de rationnel : on prenait le bois pour construire et se chauffer ou on faisait des coupes exagérées, on se servait du bois pour le charbonnage et la verrerie.
Les Monts de Vaucluse. L’exploitation des bois du XIIIè à la fin du XVIIIè siècle, Thérèse Sclafert, Revue de géographie alpine, Année 1951, Volume 39, Numéro 39-4

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