La chapelle Saint-Michel de Cousson


IMG_0021.jpgIl n’y a pas un Cousson mais deux ! C’est la montagne des Dignois. Pour nous y rendre, nous  allons à Entrages annoncé fièrement par des buis taillés de chaque côté de la chaussée. Un « chateau », résidence campagnarde construite en 1782, dont les fenêtres de derrière ont toutes été murées, a dû avoir son heure de prospérité au XVIIIème siècle.

IMG_2744r.JPGA Entrages, le seul droit de péage ayant existé depuis le moyen-âge est le curieux et modique droit de pulvérage1 qui permettait aux seigneurs de percevoir une taxe chaque fois que des troupeaux de moutons traversaient leurs terres incultes pour rejoindre les pâturages d’été de Haute-Provence, ou dans l’autre sens, pour rejoindre la Basse-Provence en hiver.

Durant leur trajet, les transhumants étaient censés trouver de la nourriture sur les chemins qu’on avait tracés pour eux. C’est pour dédommager les seigneurs que fut instauré ce droit. Il était calculé en fonction du nombre de bêtes et de la distance parcourue sur les terres du seigneur. Annales des Basses-Alpes. Bulletin de la Société scientifique et littéraire des Basses-Alpes 1899-1900, T.9.

Les lettres patentes du 16 janvier 1764 maintiennent le statut de Provence concernant le droit de pulvérage et autorisent les seigneurs à lever ce droit sur les troupeaux d’averages ou de moutons brebis, chèvres et chevreaux passant par leurs terres gastes, à raison de 6 deniers par «trentenier2», sans qu’ils puissent rien exiger pour les boeufs, les vaches, les chevaux, mulets, ânes et cochons.  Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790, Bouches-du-Rhône…, M. Blancard, P. Dupont, Paris

IMG_0027.jpgLe parking au bout du village est déjà plein : le Cousson et sa chapelle attirent beaucoup de monde. Au delà, plus de route, seulement le GR qui monte au Cousson. Par une montée continue jusqu’à 1511m d’altitude, nous sommes le plus souvent en plein soleil. Dans la descente empierrée où les racines sont de véritables pièges, une équipe de VTTistes tentent de descendre sans mettre le pied à terre. Nous les laissons passer, appréciant leur sens de l’équilibre. L’un d’entre eux passe par-dessus son guidon et disparait dans le fossé. Plusieurs minutes plus tard, il émerge sans grand dommage.

Descriptif de la randonnée sur le site Haut-Vernet (boucle)

Au pas d’Entrages, nous quittons le GR pour le tracé jaune qui contourne la cuvette formée par les deux sommets du Cousson. Nous croisons une randonneuse partie à 8h du lieu-dit les Eaux-Chaudes. Ce nom vient du torrent d’eau chaude, sulfureuse et saline, jaillissant à des températures diverses, entre 42° et 45°, par neuf sources, au pied d’un immense rocher aux pentes nues : ce sont là les Thermes de Digne » ; un couple accompagné de son vieux chien qui tire la langue, tente de persuader ses enfants qu’ils sont bientôt arrivés.

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Enfin, au loin, la chapelle Saint-Michel apparait en bordure de falaise, défiant le vide. On ne voit qu’elle tant l’espace est dégagé. Elle est si proche du bord qu’il est impossible d’en faire le tour complet et si on le tente, mieux vaut ne pas avoir le vertige et avoir recommandé son âme à Saint-Michel…

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Du charnier de Signes à la grotte du Vieux Mounoï, deux lieux chargés d’histoire


IMG_0133.jpgC‘est d’abord par l’Association de Sauvegarde, d’Etude et de Recherche pour le patrimoine culturel et naturel (ASER Centre Var) et son président Philippe Hameau – spécialiste de la préhistoire – que j’ai entendu parler de la grotte du Vieux-Mounoï  fouillée de 1989 à 1993 sur l’adret de la Sainte-Baume. Après l’avoir retrouvée dans le guide des sites préhistoriques Provence-Alpes-Côte d’Azur, F. Boyer, Mémoires millénaires, 2006, j’ai encore eu plus de détermination à la découvrir. Lors de notre première visite, nous avions questionné quelques habitants de Signes pour savoir s’ils savaient comment la trouver. Tous la connaissaient mais personne n’arrivait à nous expliquer où elle se trouvait. Aucune indication sur place et de nombreux chemins où le risque de se perdre n’est pas nul. Il aura fallu deux essais pour la trouver. Elle est retombée dans l’oubli après des années de surfréquentation qui avaient interrompu les fouilles.

Site sur la commune de Signes, histoire, cartes postales anciennes, actualités,…

IMG_0468.JPGMais d’abord un peu de marche ! Le départ sur la départementale D2 n’est pas difficile à trouver : il se fait au niveau du circuit du Castellet, près du monument qui annonce la nécropole nationale de Signes ou charnier de Signes (c’est cette horrible dénomination qui m’a poussée à rechercher les faits), assez bien signalé. La piste forestière fait de larges virages avant d’arriver sur une aire fermée dans laquelle une quarantaine de tombes de marbre portent les noms et surnoms de jeunes soldats abattus par les allemands en 1944. IMG_0474.JPGUn gamin passe sous l’autel en marchant sur le coffret renfermant les ossements des fusillés (coffret déposé là à la demande de Gaston Defferre, alors maire de Marseille) tandis qu’une adolescente fait part de son étonnement à son père qui lui explique l’évènement : « ah bon ? y’a eu la guerre dans notre pays ? ». Pour moi qui étais enseignante il n’y a pas si longtemps, je pense que l’éducation nationale n’a peut-être pas suffisamment joué son rôle…

IMG_0470.JPGIls veulent sauver de l’oubli le charnier de Signes dans le Var, la Provence, 26 août 2008 (extrait ci-dessous). De tous les patronymes cités à la suite de cet article, je connais celui de Louis Martin Bret qui a donné son nom à un collège de Manosque.

  • 1944. IMG_0469.JPGLes actions des Résistants qui attendent depuis des mois le débarquement des forces alliées se multiplient. Un officier français aurait trahi les 38 martyrs du Charnier de Signes, tous issus du Mouvement uni de la résistance, pour quelques milliers d’anciens francs. Incarcérés aux Baumettes, ils furent interrogés et torturés.
  • Le 18 juillet 1944, un jeune garçon, Joseph Call, dont les parents travaillent dans la forêt, aperçoit un car déposer 29 prisonniers encadrés par les Allemands. IMG_0471.JPGUn bûcheron de Cuges, Maurice Percivalle, passant aussi par là, entend au loin La Marseillaise. Il voit les hommes creuser leurs propres tombes. Le 12 août, neuf autres résistants furent fusillés sur le même site. Mais pourquoi ont-ils été emmenés dans ce vallon ?
  • Raymond Aubrac, alors commissaire de la République de la région – premier signataire de la pétition pour la réhabilitation de la Nécropole de Signes – a fait exhumer les corps. « Certains portaient des marques de strangulation, signes de tortures antérieures  ; des corps ont été recouverts de chaux vive. D’autres ont été enterrés vivants« . Les familles ont dû reconnaître les corps mutilés au Pharo où ils furent transportés avant d’être inhumés à Saint-Pierre au cours d’un hommage républicain ; cinq d’entre eux n’ont jamais été identifiés.

IMG_0423.JPGIMG_1373.JPGPlus nous poursuivons le vallon des Martyrs, plus les chemins se multiplient  sans indication hormis ce panneau tombé à terre et qui confirme que nous sommes sur le lieu-dit du Vieux Mounoï.

IMG_0422.JPGIMG_0109.jpgAttention propriété privée (voir commentaire). Le Vieux-Mounoï est le lieu-dit d’une ancienne bergerie et son puits, peut-être Mounoï est-il le nom provençal d’une famille ‘Mounier’. Si vous les trouvez vous saurez que vous êtes sur la bonne voie. Le second indice significatif est l’abri de chasseur à la verticale de la ruine. Quand j’ai enfin découvert la grotte bien cachée derrière la végétation, je peux vous assurer que ce fut une réelle émotion, comme un secret  que des initiés auraient accepté de partager avec moi. Il s’agit d’un aven dont une partie de la voûte s’est effondrée.

Elle a servi de bergerie depuis le néolithique (6000 ans avant J.C.) et de décor au film Manon des Sources en 1986, là où Manon découvre la source qui alimente le village des Bastides Blanches.

IMG_0115.jpgNous observons tous les recoins de cette très vaste grotte. Deux petites lucarnes de lumière s’infiltrent au dessus de nos têtes. Elle a trois niveaux. Côté droit, des arbres tordus de chaque côté de l’éboulis, se sont accrochés à la paroi rocheuse.

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Côté gauche, nous pouvons accéder par un étroit goulet glissant non sans risque, à une salle souterraine. L’intrépide Actarus83, qui a sans doute des notions de spéléogie, l’a visitée pour nous ; la méduse au plafond n’est-elle pas remarquable ? Jean-Jacques Oller a eu la gentillesse de mettre à ma disposition quelques photos de cette grotte souterraine, ou sous forme d’animation :

Au milieu une grande salle avec des aménagements de pierres : c’est là que la scène de Pagnol a été tournée. Voir le reportage fait par Tazbahn pour retrouver les lieux du film sur le site panoramas de cinéma.

IMG_0434.JPGIMG_0440.JPGIMG_0441.JPGIMG_0460.JPG

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Le sentier des douaniers de Cap Couronne à Carry le Rouet


img_1821.jpgJ‘ai tiré cette randonnée du livre Sentiers du littoral méditerranéen : randonnées de Marseille à Saint-Tropez, P. Garcin et Nicolas Lacroix, Glénat, 2008. Partis de Carry le Rouet, nous avons rejoint la Couronne (commune de Martigues) par le train de la Côte Bleue (départ : 10h03), vieux et poussiéreux. Pas de chef de gare : on prend son billet au distributeur sur le quai, on monte dans le train (que le marche-pied est haut !) sans contrôle. En quelques minutes, nous arrivons à la Couronne.

* Les horaires 2016-2017 de la ligne 7 Marseille-Miramas

Nous descendons jusqu’au cap Couronne d’où nous emprunterons le sentier du littoral, mais on peut partir du port de Carro. Le phare rouge et blanc se détache sur le bleu du ciel. Inventaire général du patrimoine culturel

  • 1er phare :
    • 01 janvier 1867 : allumage sur une tourelle carrée et corps de logis de 11,60 m de hauteur ; feu à éclipses se succédant de 20 en 20 secondes ; focale 0,1875 m ; combustible : huile végétale
    • 1873 : combustible : huile minérale
    • 1904 : combustible : vapeur pétrole
  • Le phare est reconstruit en 1958-1959. Hauteur au dessus de la mer : 36 m, hauteur de la focale : 29,15 m.img_1823.jpg
    • 20 août 1904 : feu à éclats rouges toutes les 5 secondes, focale 0,25 m ; Cuve à mercure
    • 1937 : feu à éclats réguliers rouges toutes les 2,5 secondes.
    • 1959 : feu à éclat rouge toutes les 3 secondes, focale 0,325 m.
    • Automatisation : 2001. Coupole en cuivre avec radar au sommet. Cuve à mercure. Lampe halo 650w. Feu tournant à éclats réguliers rouges 3 sec. Portée 18,5 milles.

img_1830.jpgDéjà du monde sur les plages de juillet ; le sentier, en plein soleil, longe la mer ; nous découvrons grâce aux panneaux d’information qu’il y a eu là une carrière à fleur d’eau, exploitée depuis l’Antiquité pour de grands monuments de la ville de Marseille. Le sol de la Beaumaderie est quadrillé dans des directions différentes, preuve que plusieurs équipes y travaillaient en même temps. Il était possible d’embarquer directement les pierres à partir d’une marge rocheuse servant de digue et de quai d’embarquement. Le niveau de la mer était à l’époque 50cm plus bas qu’aujourd’hui.

img_1834.jpgschema_interpretation_beaumaderie.jpgNous essayons de comprendre ce qu’est une méga brèche, blocs de calcaire anguleux de deux périodes géologiques différentes et qui se sont naturellement soudés ensemble. Puis la mer du miocène transporte les dépôts et les accumule horizontalement. Sur la photo, on voit bien la faille, la formation en éventail et sur le dessus le dépôt marin avec ses nombreux fossiles (coquilles de bivalves, creusement d’oursins). Beaumaderie, brèche.

img_0248.jpgimg_0253.jpgLa petite chapelle Sainte-Croix précédée d’un calvaire surveille l’anse de Sainte-Croix. Sans doute est-ce une chapelle de marins car une ancre de bateau est accrochée sur sa façade. 
Selon une légende moins connue (Georges A D Martin, Le Graal en Provence, Mission secrète en Occident, Cheminements, 1999 ou sur le site Arcadia), cette chapelle serait construite à l’endroit où, suite à une tempête, accostent Marie Jacobée, Marie Salomé, Sarah la servante, Lazare, Marthe et Marie Magdeleine. Un jeune berger sourd-muet leur indique l’emplacement d’une source au pied d’un figuier. Il est guéri miraculeusement. De là, ils partiront ensuite pour les Saintes-Maries de la Mer d’où ils évangéliseront la Provence. « elle [la chapelle] est bien connue des marins et saluée par eux du nom de Sainte-Terre, «Santo Terro». Elle est déjà signalée dans des actes de 1636. Deux pèlerinages importants durant plusieurs siècles amènent le 3 mai (souvenir de la découverte de la croix du Christ), et le 14 septembre (exaltation de la Sainte-Croix), les pêcheurs, paysans, bergers et carriers du terroir, à la Sainte-Terre ».  La plage de Sainte-Croix, site cote-bleue.eu

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