*** Les formes insolites des rochers des Mourres


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img_0129.jpgtypes_de_formes_Mourres.jpgCinq formes de rochers, cinq curiosités : ondulations, monticules, meules de foin, cylindres, vasques. Balade insolite sur le territoire de Forcalquier et qui serait probablement peu rassurante sous les faibles rayons de la lune : des personnages ou animaux surgissent de tous côtés. Que voyez-vous à gauche ? un pingouin ?

img_0115.jpg Partis des Payans sur la D16, nous avons atteint les Mourres1  après une longue montée dans les vallons entre la campagne2 ‘les Souillons’ et ‘le Moulin’ ; le paysage est désertique, seules quelques touffes de végétation img_0113.jpgéparses poussent sur les flancs de la colline ; jusqu’à ce que nous apercevions le premier rocher en forme de champignon, nous doutions être sur la bonne voie. Dans un premier temps, nous montons vers le nord, passant sous les ponts naturels ou jetant un oeil à travers les rochers troués ; des cavaliers traversent le site et s’étonnent : du haut de leur monture, ils voient mieux que nous les chapeaux massifs de ces champignons géants, formés de petites couches entrecroisées, inclinées et fendues.

img_0127.jpgDécouvrir la France par la géologie, François Michel, BRGM, quelques lignes sur les Mourres dont une photo avec légende traduite en anglais
Livret guide des 4èmes journées nationales du patrimoine géologiqué 2008 (ARCHIVE), à télécharger en bas de page (une page sur les Mourres, document pdf 4Mo)

Je ne saurai expliquer facilement comment ces rochers se sont formés : j’ai essayé de faire la synthèse de tous les documents rédigés sur le Net par des géologues. Grâce à Marie-Jo Soncini, géologue à la réserve Géologique de Haute-Provence, j’ai pu apporter quelques corrections à cet essai de vulgarisation scientifique. Stéphane Legal du parc du Lubéron, m’a fourni deux documents de recherche. Qu’ils en soient remerciés tous deux !

Notez bien que vous êtes devant une
rareté géologique !

En savoir plus, l’article la formation des Mourres sur randomania plus.

C’était à l’époque où la région était occupée par un lac marécageux (25 millions d’années, Oligocène supérieur).

  1. Phase de changement du niveau du lac3 : des îlots d’herbiers aquatiques dont la nature n’est pas encore identifiée, croissent en surface du plan de l’eau. « Si le niveau d’eau s’élève assez au-dessus de ces associations que l’on peut baptiser des herbiers, elles meurent, puis s’indurent. Croissent alors «sur leur dos» de nouveaux herbiers, et ainsi de suite, suivant les fluctuations du niveau d’eau »
  2. Les rochers grandissent rapidement verticalement ;
  3. puis l’ilot central se nécrose, ce qui favorise son envasement par une vase calcaire alors même que les végétaux croissent sur la périphérie et en hauteur, formant des structures annulaires  ;
  4. consécutivement à l’envasement, le calcaire se fixe autour des végétaux, dans les zones profondes et au coeur des structures puis s’indurent progressivement.

Ce régime de sédimentation singulier a donc stabilisé et durci les masses calcaires mais à la différence des récifs de coraux, cela a dû se produire alors que l’herbier n’était plus vivant.

  • Phase de baisse du niveau du lac4, l’eau se retire, les mouvements tectoniques, les pressions entrainent la déformation des strates à la périphérie du massif alpin ; le lac se redresse en oblique sous la poussée des Pyrénées puis des Alpes ; l’érosion décape les terrains argileux de préférence aux roches calcaires.
  • Les jeux de l’érosion actuelle dégagent progressivement les rochers de ce site en entraînant vers le bas les marnes tendres de leur assise.
  • Quand les eaux de ruissellement commencent à emporter la marne friable, l’érosion laisse émerger des rochers grisâtres (image 1),
  • Quand l’érosion a enlevé complètement la marne, apparaissent des rochers de différentes formes, gris en haut sur du calcaire blanc plus tendre en bas (image 2),
  • En dessous de la D12, enfin, quand l’assise blanche est érodée, le rocher gris qui était suspendu, se retrouve au sol (image 3).

Paléogenèse des Mourres, site des professeurs de SVT de l’académie d’Aix-Marseille, avec petite animation sur la formation des Mourres par les herbiers. En observant bien, vous reconnaitrez trois étapes successives de cette érosion :

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De l’ermitage orthodoxe St-Jean à la voile de Facibelle


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Nous sommes à nouveau dans les Alpes-de-Haute-Provence où aucun arrêté d’interdiction de circuler dans les massifs n’a été pris pour l’été, contrairement aux Bouches-du-Rhône. Les premières randonnées nous ont convaincus de continuer nos découvertes. Départ juste après le tunnel de Pérouré, peu avant 18h  : c’est la présence des boites aux lettres de la chapelle, en bordure de la D900, qui nous confirment le départ du sentier. Le Bès tourmenté circule entre les nombreuses couches rocheuses inclinées. L’indication d’un sanctuaire attise notre curiosité.

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herman de vries a accepté avec enthousiasme d’implanter Le Sanctuaire de la nature en ces lieux. Situé en altitude sur le site de roche-rousse, le dispositif du sanctuaire enserre avec des piques en fer forgé dont les pointes sont dorées à l’or fin, une ancienne maison forestière en ruine, habitée par de vieux buis, des rosiers et des arbustes. Comme une guérison, dit Herman de Vries, comme en ville où la nature retrouve sa place dans la moindre parcelle de terrain vague. Que gagnons-nous à faire un sanctuaire avec une grille plaquée d’or ? On ne gagne rien, mais il n’est pas nécessaire de toujours gagner quelque chose sur la nature. Avec cette attitude, je veux réintégrer dans cette nature la notion du sacré pour un moment de réflexion.
Peu après le sanctuaire, à l’entrée d’un bois que nous n’avons pas hésité à qualifier de sacré, tout comme herman de vries, une pique sur laquelle le mot « silence » est gravé en lettres d’or. Cette inscription fait partie du projet traces (CAIRN) ; elles sont gravées dans la pierre à des endroits choisis par l’artiste dans la Réserve Géologique. Ces traces fonctionnent comme les notes de bas de page du paysage. Avec le mot silence commence la méditation. Nous y avons vu un lien avec l’ermitage orthodoxe.

Un centre d’art, le Centre d’Art Informel et de Recherche sur la Nature (CAIRN), regroupant le musée et la réserve a été créé pour développer une programmation tournée vers l’art contemporain : Andy Goldsworthy par exemple a réalisé une œuvre dans le refuge d’art du vieil Esclangon (voir Et si le vélodrome n’était pas à Marseille ?).

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Cet « ambulo ergo sum » peint sur un rocher, nous a bien surpris également : sans mouvement nous n’existons plus (formule empruntée à Gassendi, philosophe et mathématicien, né près de Digne en 1592). herman de vries veut nous donner la possibilité de réfléchir sur notre propre démarche dans l’instant…

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Après quelques avertissements incitant au silence, nous parvenons à la chapelle orthodoxe St-Jean bien cachée en haut de la montagne, dans la verdure. Coquette avec sa coupole à bulbe rouge, elle nous incite à pénétrer par la porte entrouverte. Une coupole sur le nef de l’église symbolise le ciel au-dessus de la terre (voir lexique orthodoxe). Les clochers à bulbe sont caractéristiques de l’architecture religieuse russe. Au sommet, la croix orthodoxe à huit branches : la transversale supérieure, c’est l’écriteau qui portait l’inscription « Jésus de Nazareth Roi des Juifs ». La transversale médiane, c’est la pièce de bois où furent cloués les mains du Christ. Quant à la transversale inférieure qui correspond à la pièce de bois où furent fixés les pieds, elle est disposée en biais car elle évoque les deux larrons crucifiés avec le Christ : le mauvais larron la tire vers le bas (L’Enfer) tandis que le bon larron la tire vers le haut (le Ciel).

Principales caractéristiques d’une église orthodoxe :
– l’absence de statues et de sculptures et l’importance des icônes,
– l’iconostase : c’est une haute cloison qui sépare le sanctuaire où se trouve l’autel de la nef où se trouvent les fidèles,
– l’absence d’orgues.
Extrait du site Russie sur Seine
Derrière le drapé blanc placé devant la porte, vit un ermite orthodoxe que nous ne voulons pas déranger. De quoi vit-il ? pas de trace de culture ni d’élevage, 1h30 pour rejoindre la départementale, peu d’habitations et aucun commerce dans les environs…

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Le balisage jaune continue : nous décidons de le suivre bien que ne sachant pas trop où il nous conduira. Un sentier balisé a quelque chose de rassurant : il mène toujours à bon port. Il est à peine visible dans les bois, il circule parfois sur des dalles rocheuses, parfois en sous-bois, toujours en zig-zag s’éloignant de notre point de départ, et descendant rapidement dans le vallon. Où sommes-nous ? Quand au loin je reconnais la lame de Facibelle, après en avoir douté au moins une dizaine de fois, je comprends que je suis au cœur du vélodrome, cette fameuse curiosité géologique que nous avions en vision panoramique deux semaines auparavant (voir Et si le vélodrome n’était pas à Marseille ?). Je ne le reconnais pas et j’en suis décontenancée. De loin, la lame semblait fine, frêle et gonflée comme une voile au vent. De près, c’est un amas de gros rochers grossièrement posés les uns sur les autres et qui tiennent on ne sait trop comment, miracle d’équilibre mis en relief par l’érosion. Peu après, c’est un passage à gué avec une superbe marmite sur le cours de l’Adret.
Retour en suivant la direction de la passerelle sur le Bès. Nous descendons encore et encore jusque dans un sous-bois si sombre qu’on croirait la nuit tombée. La passerelle est en vérité un pont suspendu tenu par des câbles métalliques. Pour traverser le torrent, il faut jouer à Indiana Jones. Pas d’autre solution. Et croyez moi, plus on avance plus elle bouge !

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Le retour vers le parking se fait sur la route départementale à bonne allure. Quand nous parvenons au tunnel de Pérouré, nos regards se fixent sur un objet insolite : une sorte de grande nasse suspendue au-dessus du torrent. Toutes nos hypothèses progressivement s’écroulent. Il n’en reste qu’une : que ce soit une œuvre d’art contemporain comme il en existe tant dans le territoire de la réserve. Je pensais à une œuvre de Hubert Duprat qui avait prévu de laisser une trace lui aussi mais il s’agit d’une chrysalide ou nasse de pêcheur, œuvre d’un workshop. L’objectif de cet atelier est la production et l’installation, par les étudiants de l’école, d’une œuvre d’art qui restera en place sur la VIAPAC [via per l’arte contenporanéo = voie pour  l’art contemporain] pendant deux années. Pour suivre au jour le jour le workshop de Digne, par le texte et la photo, voyez le blog des étudiants. »  Extrait du site de l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Nantes.

Une balade pleine de surprises avec parfois l’impression d’un parcours aventureux. Boucle sanctuaire de la nature – St-Jean – voile de Facibelle – passerelle de 7.100km, dénivelée 457m, 3h

L’ichtyosaure de la Robine


IMG_8285r.JPGIMG_8288r.JPGLichtyosaure de la Robine, reptile marin fossile dont l’aspect est celui d’un requin, est maintenant bien connu : Je l’ai découvert la première fois lorsque j’habitais Digne.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
La Robine

Georges Bellon, un Dignois passionné de géologie, prend connaissance de l’existence de l’ichtyosaure de La Robine. Il fait part de la découverte à Guy Martini, futur directeur de la RNGHP. Dans le cadre de ce projet de Réserve, de protection sur place et de valorisation du site, une fouille est lancée et un squelette presque complet d’ichtyosaure est dégagé. Le premier musée de site en Europe protégeant les ossements d’un grand verterbré fossile est inauguré en 1984.

IMG_8291r.JPG J’ai eu la chance de connaitre M. Martini à ce moment là et de pouvoir me rendre sur place en passant par un sentier en partie privé, en suivant un vallon tant bien que mal puis en grimpant sur les robines1. Il n’était pas balisé et il fallait bien connaitre les lieux pour le retrouver. Désormais, un sentier balisé et un parking ont été aménagés un peu plus loin. J’y retourne donc aujourd’hui, sous la pluie.

schema_squeltte_andreani_2002.jpgrestes_thorax_et_crane_la_robine.jpgAprès une belle grimpette le long du torrent et de ses cascades, on arrive sur les lieux ; les gouttes de pluie obscurcissent la coupole protectrice et il est presque impossible de reconnaitre l’animal. De plus, il est assez mal conservé et cela peut être décevant si on s’attend à découvrir un squelette parfaitement identifiable.

Le spécimen rarissime pour la région, repose sur son flanc gauche, à l’exception du crâne, dont seule la face dorsale est visible. Il mesure environ 4,20m. Il est assez mal conservé et certaines pièces manquent comme la plus grande partie du rostre, le bassin, de nombreuses vertèbres de la queue.

Plusieurs autres ichtyosaures ont été trouvés à Prads Haute Bléone, dont un presque complet mais sans la tête. Âgé de 90 millions d’années, ce fossile fait l’objet d’études par les paléontologues de la Réserve géologique de Haute-Provence. Un site archéologique touristique a d’ailleurs été créé à l’entrée du village de Prads, où on peut y voir des moulages réalisés sur l’ichtyosaure de Prads. Schémas et photo extraits de : Trois gisements fossilifères phares de la réserve géologique des Alpes de Haute Provence, livret-guide d’excursion géologique, congrès de l’association paléontologique française, 2007. Attention ! document de 7Mo.

2004 : sur l’archipel quasi désertique du Svalbard [en français le Spitzberg], en Norvège, un paléontologue et son équipe ont découvert un squelette  d’ichtyosaure de 150 millions d’années dans un état de conservation exceptionnel. Découverte d’un gisement de reptiles marins dans l’archipel du Svalbard

Mon accolyte, ancien professeur de biologie, me fait remarquer l’accumulaton de rostres de bélemnites2 dans l’espace autour du squelette ; il y en a dans tous les sens, preuve que les courants étaient faibles ou inconstants. Ils vivaient en pleine eau tout comme les ichtyosaures. Schémas de bélemnites

Itinéraire vers l’ichtyosaure, 4.430km A/R, 1h40, dénivelée 540m
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