Les pénitents des Mées


Album de la fête régionale randonnée 2008 (1)

Un week-end consacré à la randonnée, week-end organisé par la fédération régionale de la randonnée, à Volonne (04) pour sa seconde édition. On s’est raccroché au groupe à la dernière minute et nous ne l’avons pas regretté. L’hébergement en camping **** à Volonne (04) était à la hauteur de l’organisation.

penitents_wikipedia.jpgphoto wikipedia

Description de la randonnée, par le site saute-collines

 

IMG_0289.jpgIMG_0299.jpgLa première randonnée nous mène jusqu’aux fameux pénitents des Mées (itinéraire de 13.5km,  dénivelée 460m, 5h30 environ avec l’arrêt pique-nique) que tout le monde voit au loin en se rendant dans les Alpes mais que personne n’escalade jamais.

Ma météo aujourd’hui à cet endroit

Nous partons du village des Mées. Il a plu de la veille et le départ commence fort : se promener sur des galets mouillés compacts alors qu’on est si loin de  la mer, ça fait plutôt bizarre ! c’est un sentier en pente un peu raide, sur lequel la mairie décline toute responsabilité. Dans un virage en épingle, nous passons à proximité de la chapelle St-Roch, puis près d’une borne kilométrique (D101) et d’une fontaine moderne. Au XVIème siècle, cette chapelle prend ce vocable, certainement après les épidémies de peste de 1580 ou 1589, Saint-Roch étant habituellement invoqué lors de la peste et du choléra. J’en ai rencontré beaucoup dans la région, la peste de 1720 ayant débuté à Marseille, et s’étant propagé dans toute la Provence (voir La malédiction du grand Saint-Antoine dans ce blog). A la Révolution, elle est vendue comme bien national. Le 29 septembre 1984 M et Mme Jean-Marie Henry en font don à la ville des Mées. « L’Association a consacré exactement 20 chantiers de bénévoles […] soit pour monter les matériaux pour la toiture, soit pour rendre le chemin accessible et aménager l’intérieur de la chapelle et le parvis. » (extrait du site de l’association les Amis des Mées). C’était probablement l’église paroissiale primitive, lorsque le village était accroché au versant du rocher.

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Marque de l’érosion sur les pénitents ; vue de près sur le poudingue

Bientôt, nous sommes sur la crête, dominant les pénitents qui semblent bien grands désormais. On les appelle ainsi en raison de leur silhouette ; d’après la légende, ils représentent les moines de la Montagne de Lure qui ont été pétrifiés par saint Donat au temps des invasions sarrasines pour s’être épris de belles jeunes femmes Mauresques qu’un seigneur avait ramenées d’une croisade. De là haut, je me rends mieux compte de leur composition et je vois que des morceaux de galets se détachent encore : l’érosion continue.
Schématiquement c’est le résultat de 3 phases essentielles (voir en détail Rochers et légendes, du site des Amis des Mées avec schémas):

  • 25 millions d’année : la faille de la Durance élève le côté ouest (Forcalquier, Manosque,…) ; contre cette élévation butent les anciennes rivières de nos rivières actuelles (la paléo Durance, par exemple) ; plus au nord naissent les Alpes aussitôt attaquées par l’érosion. Ces blocs arrachés, roulés et devenus galets s’accumulent dans un delta de 60 km de long et de 30 km de large (zone du plateau de Valensole), sur des épaisseurs considérables (Les Mées: 600 à 800 m.). Le calcaire dissout dans l’eau les cimente avec un grès très dur. La roche ainsi formée constitue le poudingue.
  • Ces dépôts s’arrêtent il y a environ 2 millions d’années. Au niveau des Mées, en profondeur, une couche épaisse de conglomérat accumulé, de plus de 100 mètres d’épaisseur et longue d’au moins un kilomètre, se trouve enfermée dans cette masse. Sont déjà pré-formés les futurs pénitents…
  • la Durance attaque le poudingue, le « rogne » sur une épaisseur d’environ 400 mètres. A chacun de ses passages puissants, elle arase le sol et crée une terrasse ; des vallons se forment, tel celui de la Combe.
    Quand elle atteint les Mées, elle butte contre cette partie très dure, racle la face nord-ouest et rabote ainsi une haute façade verticale. Nous retrouvons aujourd’hui, sur l’avant de nombreux rochers, cette face plane.
  • Lors des périodes glaciaires, le gel débite le poudingue en morceaux et laisse les matériaux sur place. Mais aux époques plus chaudes, les eaux sauvages venant du plateau emportent tous les matériaux instables qui vont s’engager dans les fissures existantes et ronger profondément le poudingue.

Sur le coté ouest, le poudingue, profondément travaillé dégage des monolithes. De cette double érosion, latérale et verticale, résultent ces formes coniques qui sont devenues des Pénitents. L’érosion continue toujours…
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*** En route vers la résurgence du Ragas


En route pour le Revest les Eaux (Var), la Suisse Varoise comme certains la surnomme. A 5km de Toulon. Ce village vient de fêter l’anniversaire de sa libération à la fin de la seconde guerre mondiale. Le vieux village, aux maisons de toits roses, se mire dans les eaux claires du Ragas dont les eaux sont retenues dans un lac aménagé. * Itinéraire vers le Ragas

Belles et grandes photos de Catherine dans son article sur le barrage de Dardennes, randonnée sur le tour du lac

img_2266.JPGEtant venue pour la résurgence (de type vauclusien), je rejoins le barrage des Dardennes et j’emprunte le GR51 près du panneau d’information sur les ponts du Colombier ; l’un d’eux, a été construit aux frais du propriétaire du moulin. Tous les habitants avaient le droit de l’utiliser pour traverser la rivière avec leurs bêtes, ou leur charrette, sans avoir à payer une quelconque redevance au sieur Artigues.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie et le vent

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La découverte du barrage (construit en 1912) et de ses eaux turquoises est une agréable surprise : un paysage de carte postale. Constater qu’il n’y a de l’eau que d’un côté du barrage en est une autre ! Je n’ai compris que plus tard en quoi il était différent : alimenté par 7 sources souterraines, il ne sert que de réservoir pour la commune de Toulon.

img_2273.JPGJe marche le long du lac. De nombreuses interdictions de se baigner jalonnent le parcours mais cela n’empêche pas les gens d’être dans l’eau. Je me pose la question du « pourquoi est-ce interdit ? » sans trouver de réponse satisfaisante puisqu’il ne peut y avoir de lâcher d’eau comme dans les barrages classiques. Pour rejoindre l’autre rive, je traverse d’anciennes restanques à sec en cette saison et sur lesquelles des cultures poussent encore de manière régulière. Je n’ai aucun mal à passer sur l’autre rive. Je vois l’embouchure du torrent à son arrivée dans le lac et par curiosité, j’y pénètre. D’énormes blocs de rochers, indisciplinés, rendent la marche quasi impossible ; c’est comme s’ils avaient été violemment bousculés jusqu’en bas.

img_2276.JPGLe chemin, de plus en plus étroit, m’offre sa fraicheur sous les arbres. Il n’y a plus personne désormais. Bientôt je me retrouve coincée, devant choisir entre un étroit chemin montant ou bien le cours du torrent. Je pressens que la découverte de la résurgence n’est pas loin. J’essaie le premier mais ne trouve pas le moyen de redescendre au pied de cette énorme falaise qui barre le passage. Je décide alors de remonter le lit du torrent. J’ai l’appareil photo dans la poche, pour être prête à capter un souvenir que je partagerai avec d’autres plus tard. Malheureusement, durant cette expédition où j’utilise les mains et fais le grand écart sur les blocs rocheux, je le cogne contre un rocher. Le boîtier en gardera une trace extérieure et le viseur une feuille d’arbuste à l’intérieur. Après quelques mètres pénibles, je lève les yeux : une vieille passerelle métallique traverse la rivière ; une énorme ouverture dans le rocher me prévient que la résurgence est là. Sera-t-elle impressionnante malgré l’absence d’eau ?

Ce syphon, visité par les plongeurs, est profond de 117m ; celui de Fontaine de Vaucluse img_2277.JPGest de 315m (le 3ème au monde pour sa profondeur).

Edouard Martel qui en a fait la première description en 1894, écrit : « … sa superbe entrée s’ouvre verticale et triangulaire (haute de 10 à 15m et large de 5 à 10m) dans une pittoresque falaise. Elle domine de 40m la source ordinaire de la Dardennes.[…] Il arrivait parfois qu’après de grandes pluies, l’eau souterraine, ne trouvant pas d’épanchement suffisant par la source, s’élevait jusqu’à la gueule du gouffre et s’en échappait en torrent furieux. Profitant de cette disposition, la municipalité de Toulon a fait creuser vers 1879 un tunnel horizontal qui va drainer la rivière souterraine. »

ragas3.jpgSi vous regardez les strates redressées presque à la verticale, vous constaterez que c’est dans le joint de deux strates que l’eau a foré cette cheminée. Je m’approche de l’ouverture : la forme en ogive du fond et les restes de branches encastrés, témoignent de la puissance des eaux hivernales. …puis comme elle franchit la grille, elle s’épand soudain au dehors en un tumulte d’écume et un fracas véritablement impressionnant. Zigzags dans le Var, j. henseling, 1947, pages 39-43. Vous ne la verrez ainsi qu’une ou deux fois par an. En attendant, regardez les très belles photos du blog de Fouchepate dont une prise en janvier 2006…

Ne manquez pas le film sur le système du Ragas extrait du film “L’eau de là” (France 2), réalisé par Philippe Maurel qui m’a aimablement communiqué l’adresse de la vidéo prise lors des crues de janvier 1999. Les crues de la Reppe font l’objet d’un autre reportage filmé http://www.aiga.name/news-janvier.htm.

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Les rochers des Mourres


medium_img_0464.jpgParcours plein de charme provençal au départ du village de Forcalquier, dans la Haute-Provence de Giono, réputée pour la grande pureté de son air.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Direction du vent et température ressentie

J’accède au chemin de saint-Marc après une route en pente raide. Un villageois m’interpelle gentiment et me souhaite une bonne balade. Le chemin de St-Marc longe quelques propriétés et domine les anciennes parcelles agricoles dans lesquelles de nombreux cabanons pointus ont été construits. Pierre Martel estime entre 30 et 50 tonnes le poids d’un cabanon pointu de taille moyenne du pays de Forcalquier ! « Ils servaient à protéger les outils d’un jardinier, la provision de bois ou les ruches d’un paysan, ou encore son repos les jours de canicule au moment de la « méridienne »; parfois ils servaient d’écurie pour un âne, un mulet ou un petit troupeau » (extrait de * Témoins de l’architecture de pierre sèche en France).

Un site très concret sur la pierre sèche

A l’aide d’une paire de jumelles, vous pourrez les observer depuis le haut de la falaise, ainsi que les coupoles lumineuses de l’observatoire de St-Michel.
* Voir dans ce blog d’autres randonnées permettant de voir des constructions en pierre sèche : * Eguilles, ou * Salon de Provence, dans le Tallagard
Dans un petit enclos tout près de cette falaise, deux ânes sont parqués ; l’un deux pose sa patte arrière si près du précipice que j’ai peur qu’il ne tombe. Je passe à côté de lui en veillant à ne pas l’effrayer.
Du relais de télévision, le paysage est contrasté : le soleil est chaud en ce début de printemps mais au loin les Alpes du Nord sont enneigées et les skieurs, sans doute, s’en donnent à coeur joie.

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En contrebas, les agriculteurs travaillent dans les champs d’oliviers ou d’amandiers. Au nord, j’aperçois le bois du Roi et le début des rochers des Mourrres1.
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Ce calcaire des Mourres date de 25 millions d’années (oligocène) à l’époque où un lac recouvrait Valensole et Forcalquier ; la période miocène qui suivra verra la dernière transgression marine régionale. Au pliocène, par une inversion de la faille de la Durance, le fleuve comblera le bassin d’effondrement de Valensole de plusieurs centaines de mètres de galets arrachés aux Alpes. Les jeux de l’érosion actuelle dégageront […] les pénitents des Mées, et les paysages en cuestas de Forcalquier […] des Mourres.

En savoir plus sur randomania plus : la formation des Mourres

Les formes sont différentes selon l’avancée de l’érosion :

  • quand les eaux de ruissellement commencent à emporter la marne friable, elles laissent émerger des rochers grisâtres,
  • puis quand elles ont enlevé complètement la marne, elles laissent apparaitre des rochers de différentes formes, gris en haut sur du calcaire blanc plus tendre en bas,
  • Enfin, quand l’assise blanche est érodée, le rocher gris qui était suspendu, se retrouve au sol.

Ainsi l’érosion par les eaux de ruissellement qui coulent Nord-Sud dégage progressivement les rochers de ce site en entraînant vers le bas les marnes tendres qui les entouraient.

En effectuant la randonnée dans le sens indiqué, la visite sera plus cohérente. (* Voir la sortie pédagogique faite par un professeur de Sciences de la Vie et de la Terre)
medium_img_0478.jpgCe qui m’a tentée, c’est de délaisser le balisage pour le vallon, à l’aventure ! et je n’ai pas regretté. Après la traversée du ruisseau à gué, je me suis retrouvée alors dans un lieu désertique entouré de ces figures bizarres posées sur un sol grisâtre parmi une végétation maigre digne des déserts arides. Imaginez-vous perdu dans ce lieu la nuit, uniquement éclairé par la lune, un jour de violent orage… J’ai compris pourquoi ce paysage ruiniforme, avait inspiré des écrivains tels que eugène plauchud, Lou Diamant De Sant-Maime, 1893 ou la légende des pénitents des Mées, écrit en provençal, camille arnaud, ancien maire de Forcalquier, et le réalisateur georges lautner pour son film la maison assassinée, 1988, avec Patrick Bruel, tiré du roman de Pierre Magnan (décédé le 28 avril 2012).
medium_img_0493.jpgBien qu’à quelques kilomètres encore de la ville, le son clair et harmonieux du carillon de la citadelle (seul carillon manuel de Provence fonctionnant « à coup de poings ») accompagne à midi mon retour vers Forcalquier. En passant devant le cimetière classé dont les ifs centenaires sont parfaitement taillés en haies épaisses percées de voà »tes, je me remémore la tristement célèbre affaire Dominici, dont les victimes sont enterrées ici (* l’affaire Dominici).
Voilà une randonnée particulièrement agréable et variée : nombreux monuments à visiter dans le village, montagne des préalpes ou colline, champs ou forêt, fleurs et animaux, constructions de pierre sèche et chapelle, curiosité géologique, ruisseau, cimetière classé, carillon peut-être, tout cela sur un seul itinéraire de 2h15 ! Le sentier est peu fréquenté et sort vraiment des randonnées classiques.

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1mourre : visage, museau, trogne, groin, mufle. Exemples : mourre nègre = face noire. Faire un mourre de six pans = c’est faire la tête. Selon l’index alphabétique du lexique provençal