Circuit Pagnol au départ de la Treille


Ce circuit Pagnol est organisé par l’Amicale des personnels du rectorat. Un peu inquiète de la difficulté, je demande à notre président, Franck, de m’envoyer le tracé que je prépare fidèlement à l’aide de mes outils cartographiques : 14 km avec un cumul de dénivelées de 774 m, sur des sentiers parfois escarpés ou caillouteux, difficulté 3/5 selon la nouvelle cotation de la FFRP (pour personnes ayant de l’entrainement physique moyen) ; je prévois une alternative plus courte. Sur une suggestion de Majo, les Aixois de la communauté d’OVS, plus tout jeunes, décident de se mettre en route plus tôt et d’attendre le reste du groupe à la grotte du Grosibou. Evidemment ça ne se passera pas ainsi…

L’album photos complet

Trouver l’ancien village de La Treille, coincé entre Allauch, Aubagne et Marseille (11e), à l’aide de deux GPS qui indiquent parfois des directions opposées, ne sera pas facile. Et nous n’avons pas de carte routière papier ! la technologie n’est donc pas toujours la meilleure solution…

Origine de La Treille : viendrait du nom d’une famille de Ligurie qui s’y installe avec ses deux enfants Claude et Jean Paul au XVIe. Jean Paul est toujours dans les textes affublé de son surnom : Jean Paul dit la Treille ! selon François Barby, revue Marseille

Quand nous arrivons, tout le monde est déjà là : c’est raté pour prendre de l’avance ! C’est dans ce village que se trouve la maison de vacances de la famille Pagnol.

– Vous n’allez pas me dire que vous allez à La Treille ?
– Nous traversons le village, dit mon père, mais nous allons encore plus loin.
– Mais après La Treille il n’y a plus rien !
– Si, dit mon père, il y a Les Bellons. Marcel Pagnol

Nous commençons par le cimetière de la Treille où est enterré Marcel Pagnol, sa fille Estelle et sa mère Augustine morte un 16 juin (1910) comme aujourd’hui ; la tombe se trouve face à l’entrée avec une épitaphe de Virgile : Fontes, amicos, uxorem, dilexit ; dans une autre sépulture Pagnol, sont enterrés son père et la seconde femme de celui-ci Madeleine ; Maurice, le petit Paul, Germaine, René (et sa femme Martine), ses frères et sœur nés du premier mariage de son père avec Augustine ; depuis 2016, sa nièce Andrée, fille de sa sœur Germaine. C’est là dans ce cimetière que sont enterrés également son ami Lili des Bellons (Baptistin David Magnan de son vrai nom), mort pour la France à 21 ans et le maçon Marius Brouquier.

La montée démarre aussitôt, passant devant l’église et la fontaine de Manon, la villa la Pascaline, louée par Pagnol dans laquelle il a écrit les premières pages de ses souvenirs d’enfance.

Ce devait être en janvier 56. Mon frère […] avait […] décidé d’aller, avec sa femme, s’installer pour quelques semaines à La Treille, dans […] la villa rebaptisée aujourd’hui La Pascaline, qu’il avait gardée en location depuis le tournage de Manon des sources. La nuit tombait vite, nous rentrions tôt. Marcel passait une partie de ces longues soirées à écrire. Germaine Gombert

Insensiblement, nous passons dans la commune d’Allauch ; dans la traversée des Bellons, je reconnais la fontaine devant la Bastide neuve où la famille Pagnol passait ses vacances au grand air, pour le bien d’Augustine, la mère de Marcel Pagnol, de santé fragile. S’ouvre alors un paysage de collines typique des films de Pagnol.
Les lieux de tournage des films d’Yves Robert ne sont pas toujours les lieux vécus par Marcel dans son enfance : par exemple, dans le film, la Bastide Neuve est aux Plâtrières à Pichauris.

La maison s’appelait La Bastide Neuve mais elle était Neuve depuis bien longtemps. Pagnol

Sous la Grande Tête Rouge, rouge de la bauxite, un grand abri sous roche sous les deux citernes DFCI. Au croisement marqué Escaoupre1 nous obliquons dans le lit d’un ruisseau à sec, sur de grandes dalles plates parfois creusées de marmites remplies d’eau, parfois circulant dans un étroit passage envahi par la végétation, signe qu’il y a encore de l’eau.

Après un petit arrêt photos – en haut de g. à d. : Marianne, Nathalie, Franck. En bas Maurice, Sylviane, Cédric, Marie-F., Sandrine, Majo, Claude – par un pas un peu haut dans la paroi rocheuse, nous rejoignons le sentier et poursuivons jusqu’au barrage non loin de la source du Chien ; Jean-Luc a pu y voir la cascade en furie. Au loin, Franck nous montre un petit abri sans toit où dans le film, Marcel trouve refuge le jour où…

Soudain, une ombre passa sur le taillis. Je levai la tête, et je vis le condor. […] Je pensai qu’il était venu par curiosité pure […]. Mais je le vis prendre un large virage en passant derrière moi et revenir sur ma droite : je constatai alors avec terreur qu’il décrivait un cercle dontj’étais le centre, et que ce cercle descendait peu à peu vers moi ! Je cherchai des yeux […] un refuge  : ô bonheur ! À vingt mètres sur ma droite, une ogive s’ouvrait dans la paroi rocheuse […] Je marchais tout droit devant moi, à travers les cades et les romarins, les mollets déchirés par les petits kermès […]. L’abri n’était plus qu’à dix pas : hélas, trop tard ! Le meurtrier venait de s’immobiliser […] Soudain, il plongea, à la vitesse d’une pierre qui tombe. Fou de peur, et mes yeux cachés derrière mon bras, je me lançai à plat ventre sous un gros cade, avec un hurlement de désespoir. Au même instant retentit un bruit terrible […] : une compagnie de perdrix s’envolait, épouvantée, à dix mètres devant moi, et je vis remonter l’oiseau de proie : d’un vol ample et puissant, il emportait dans ses serres une perdrix tressaillante […] Pagnol, la gloire de mon père

Au virage vers l’est, commence la plus rude épreuve de notre parcours : 131 m de dénivelée sur une distance horizontale de 401 m, soit une pente de 33%, piste classée de difficulté rouge, voire noire si l’on tient compte de la nature du terrain. Le groupe s’étire ; Franck organise plusieurs pauses à l’ombre. Je m’accroche parfois aux branches, souffle et sue à grosses gouttes, encourage Majo qui maintient l’intensité de l’effort bien qu’elle soit au bord du malaise.

Finalement tout le monde se retrouve au Pas du Loup : crâne, visage, bras ou mollets sont rougis par le soleil qui chauffe à plus de 25° et pas de vent ; pendant la longue pause, je cherche la gravure de berger la plus proche que j’ai repérée il y a deux ans avec Michel ; après 10 mn de recherche, c’est Franck qui l’aperçoit ; quelques gouttes d’eau versées sur le dessin et voilà la gravure qui apparaît en relief comme par magie ; nous n’en retrouverons aucune autre. Pourtant, sur ces dalles plates exposées au soleil, se cachent rosaces, fleurs, et un long serpent. Pour voir toutes les gravures de bergers, lire l’article Sur les traces des derniers bergers du Garlaban. Le petit Paul, frère de Pagnol, dernier chevrier d’Allauch, y aurait gravé un de ces dessins.
Au sud du Pas du Loup, vers les barres de la Garette, eut lieu la scène des Bartavelles de la Gloire de mon père.

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Roumavàgi au prieuré de Sainte-Victoire à partir du parking des Amandiers


Grand jour au Prieuré de Sainte-Victoire : c’est l’inauguration des nouveaux vitraux de la chapelle et le traditionnel pèlerinage (roumavàgi en provençal) qui se perpétue le dimanche le plus proche du 24 avril, sur la montagne Sainte-Victoire.
# Liste de tous les parcours menant au Prieuré dans ce blog
Je me suis garée sur le parking des Amandiers, 3 km après le hameau des Bonfillons, pour laisser libres les places du parking des Venturiers. Partie vers 8h, je découvre le sentier qui va rejoindre le GR9 ; Philippe l’a balisé de ruban rouge et blanc, et apposé quelques pancartes là où le doute s’impose.
Ce sentier passe au pied des coteaux du Tounin d’Arles (cadastre napoléonien, E2, 1829), un bien drôle de toponyme qui m’évoque un nom propre (diminutif provençal d’Antoine ?), ou un oronyme signifiant hauteur (selon UnDeBaumugnes), mais en tous cas lié à la grande transhumance des troupeaux d’Arles ; la carraire arlésienne passait au nord de la route d’Aix à Vauvenargues à moins d’un kilomètre à vol d’oiseau ; la carraire des Nègres (sans doute Négrel) arrivait au pied de cette colline, en venant de Beaurecueil et celle de Trotobas la poursuivait vers le nord jusqu’à la carraire d’Arles.
D’après le cadastre napoléonien de Vauvenargues, c’est donc bien sur les pas des bergers que je commence la randonnée. Le parking des Amandiers était-il un lieu de repos avant la rude montée sur le plateau ? Je serais prête à parier que la plus grosse pierre couchée au sol qui matérialise l’entrée du parking est une ancienne borne de transhumance : si je trouve la seconde, puisqu’elles étaient plantées par paire, j’en aurai la preuve définitive…

Avant de tourner à gauche pour longer la rivière, si la curiosité vous pousse à faire un saut jusqu’à l’extrémité orientale du barrage de Bimont actuellement à sec (2017-2019), passez le gué, probablement à pieds mouillés après les pluies ; vous découvrirez habituellement sous l’eau, un ancien pont de pierre sur la Cause, rivière qui coule sous vos yeux comme avant le barrage ; le petit chemin passant sur le pont rejoignait les Nègres (aujourd’hui les Sages) au Tounin d’Arles. Spectacle curieux que ces ilôts verdoyants qui côtoient des espaces caillouteux et secs et sur lesquels gisent des objets insolites ou des vestiges de murs de soutènement.

Le sentier longe les champs, passe dans un agréable sous-bois, traverse la rivière de la Cause sur un passage aménagé de pierres plates émergentes. Les enfants Alibert, qui vivaient ici au XIXe, étaient tous des bergers, filles ou garçons, sauf le père qui était agriculteur ; ne vous étonnez pas d’y retrouver encore des troupeaux de moutons.

Plus loin, un second gué rejoint le parking des Cabassols mais il ne faut pas le prendre mais monter vers l’est jusqu’à la jonction avec le GR9.

Ce petit parcours bien agréable n’enlève rien à la difficulté du tracé : vous retrouverez la montée raide et régulière, les parties bétonnées parfois entrecoupées de chemin de terre ; je croise le groupe des chanteurs qui va participer à la messe au Prieuré puis une dame en difficulté qui marche bien lentement mais sûrement. A la cote 710, je pars discrètement faire la maintenance de ma geocache ; je retire le logbook « all-weather writing paper » pour y lire les commentaires tout à fait lisibles malgré les intempéries qu’il a forcément subies : un anglais, des hollandais, un allemand, des autrichiens, un suisse, un tchèque,… et des français de tous horizons, sont passés par là. Presque tous écrivent qu’ils sont contents d’y faire une pause avant le dernier effort vers le Prieuré. Ci-contre un extrait de ce carnet de passage.

Summer #3a : le prieuré, la pause, nicoulina

Dernière partie, dans un sous-bois dans lequel vous apercevrez une stèle portant le nom de Lou ; puis la partie rocheuse, tout en virages aigus, zigzags, avec quelques pièges tant les roches sont hautes ou patinées ; je croise en cours de route un ami qui descend du Prieuré ; à peine le temps d’évoquer la Favouillane, dernière grande bergerie de Camargue, que je repars vers le Prieuré où l’inauguration a lieu dans une demie-heure.
Tous les Amis de Sainte-Victoire (AdSV) portent un brassard fluo les identifiant ; les bénévoles, trop nombreux pour être tous cités ici, connaissent la tache qu’ils ont à faire et, vu leur sourire, je pense qu’ils sont fiers de ce moment qui concrétise leur travail acharné durant plusieurs années.

Vous visiteurs, le temps d’une prière ou d’un échange avec un Ami de l’association, vous découvrirez les nouveaux vitraux de la chapelle et le cloître reconstruit.

Les vitraux ont été conçus par le maître verrier Gérard Tessier, fabriqués par les Passeurs de lumière de Massalia Vitrail, installés par les bénévoles de l’association. Une vidéo des Amis de Sainte-Victoire, des vitraux pour la chapelle, résume les différentes étapes de cette magnifique réalisation. A l’élégante montagne aux couleurs froides près de l’entrée, succède celle aux couleurs chaudes dans le fond de la chapelle.

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** Confluence Ubaye-Durance vue d’en bas puis d’en haut


Après un reportage à la télévision sur le lac de Serre-Ponçon dont le niveau n’a jamais été aussi bas, j’accepte l’invitation d’Yves qui me propose de faire le tour du lac et découvrir à pied, si possible, la confluence de la Durance et de l’Ubaye, sous le village de Le Sauze-du-Lac.

l’album photos complet de Serre-Ponçon

Arrêt n°1 Remollon, cascade pétrifiante, pas très grande mais rafraichissante tout de même. Une eau de source chargée de calcaire et de gypse dissous dévale la montagne et vient terminer sa course dans la vallée de la Durance par une chute du haut d’une falaise de tuf, au niveau de la fontaine pétrifiante.

S.P.01 – Autour du Lac : Remollon, la cascade, Ti’Mars…

Arrêt n°2 bassin de compensation, à l’aval du barrage, créé lors de l’extraction des alluvions nécessaires à la construction de la digue de Serre-Ponçon : il joue un rôle régulateur en contenant les déversements importants de l’usine aux heures de pointe. Les turbines de son propre barrage permettent de fournir un appui énergétique ; le bassin de compensation est devenu un lieu d’importants rassemblements d’oiseaux migrateurs d’octobre à avril.

Arrêt n°3, la Bréole, belvédère sur le lac : là où le geocaching joue son rôle, c’est en proposant des caches bien placées comme celle située à Sardanne ; on y accède par un sentier pentu qui mène à un belvédère sur le lac de Serre-Ponçon, bien sécurisé par des barrières en bois ; en chemin, vous aurez une vue sur le village de la Bréole (Altitude : 939 m, 320 habitants) et le clocher carré de l’église Saint-Pierre, surélevé à la fin du XIXe pour exaucer le vœu d’Honoré Charbonnier, bienfaiteur de la commune.
Au loin, à peine visible, Yves m’indique le viaduc de Chanteloube, spectacle bien insolite quand on le voit de près. Enjambant le torrent des Moulettes, il était à destination ferroviaire, mais n’a jamais été utilisé. En effet, la construction de la ligne de chemin de fer Chorges/Barcelonnette, amorcée en 1909, est modifiée en raison du projet Serre-Ponçon puis finalement interrompue en 1935 alors que la plupart des ouvrages d’art sont achevés. Le viaduc de Chanteloube… dans l’eau !

S.P.49 – Autour du Lac : Sardanne Panorama, Ti’Mars…

Arrêt n°4, la Bréole, un tunnel ferroviaire qui n’a jamais servi : une fois garés près du défilé, Yves se rend compte qu’il connait ce tunnel ferroviaire, il y est venu en vélo mais venait de l’autre sens. Les murs qui devaient protéger la ligne sont quasiment neufs, la voie est désormais utilisable par les vélos et les piétons mais attention, pas de panique, le tunnel est sombre et long…

S.P.31 – Autour du Lac : L’Ubaye, Ti’Mars…

Arrêt n°5 cimetière d’Ubaye, il a été patiemment déplacé par les habitants avant l’envahissement du village par les eaux de Serre-Ponçon ; rien de ce qui émerge du lac n’est reconnaissable. C’est le seul village qui n’a pas été reconstruit.

Nous nous arrêtons au port saint-Pierre à Sauze1 du Lac pour le déjeuner. A l’abri du vent sur une table de pique-nique, nous observons le paysage bizarre sous nos yeux : la base nautique est fermée, il n’y a personne ; des collines émergent, les pontons d’amarrage serpentent au sec, l’eau est bien loin du port. Sur les strates en face, se lit le niveau optimal du lac (780m) qui, aujourd’hui, est de plus de 40 m en dessous. Nous espérons donc pouvoir marcher dans le fond du lac si le limon est bien sec. Depuis le 24 mars, les dernières cotes ont encore baissé :

24 mars : 739 environ soit – 41 m sous la cote optimale de la retenue
26 mars : 737,53
27 mars : 736.90
28 mars : 736.76
29 mars : 735.85
30 mars : 735,72
31 mars : 734,98 … et le 11 avril : encore plus bas : 731.33

Arrêt n°6, confluence : c’est maintenant qu’il faut marcher un peu pour rejoindre la confluence des rivières Ubaye et Durance, au pied du village de Sauze-du-Lac ; parcours aventureux dont il faut bien mesurer les risques car ils sont réels. Il commence par un sentier qui monte puis sinue en balcon au-dessus du lac ; cette partie a été aménagée en début d’année 2012 par une brigade ‘Sentier’ et ça se voit.
Quelques mètres en dessous de nous, un petit pont sur lequel devait passer au XIXe siècle un chemin partant du Plan d’Ubaye. Nous atteignons un carrefour ; le sentier en face de nous mène au village du Sauze quelques 200 m plus haut ; nous optons pour celui de Champinas.

L’ANCIENNE ROUTE : Champinas, Mpoup

Il devient de plus en plus sauvage et dégradé ; le haut du pont sous lequel s’écoulait un ruisseau se jetant dans la rivière est abîmé mais solide en-dessous. Il y a de l’eau dans le lac, nous ne sommes pas loin du barrage, mais de plus en plus de terres émergent. Un haut mur de soutènement nous permet de passer avant de croiser un premier éboulis rocheux ; certes, il frôle le vide mais avec prudence, nous passons au dessus. Nous entendons le bruit d’une cascade sans la voir  ; elle s’écoule sous forme de ruisseau dans une petite anse du lac ; rien de prévu pour le traverser à part faire un pas de géant en se reposant sur des mottes de terre durcies. Nous continuons jusqu’à la cache.

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