Après 4km de virages tout en montée, vous parvenez sur le parking du prieuré de Ganagobie. Après vous être garé, vous ne pouvez manquer la vue sur la vallée de la Durance qui « méandre dans le lit restreint que les hommes lui ont laissé ». Le parcours sur le plateau s’avère facile et plein de surprises ; aucun danger dans la zone centrale : les enfants pourront courir en toute liberté. Le seul risque se trouve sur le bord qui donne sur un a-pic. Si vous allez à l’aventure sans préparer votre circuit, il est probable que vous ne verrez pas tout. Je vous accompagne sur ce plateau dont les plus anciennes traces remontent au néolithique (2800 à 1800 av. J.C.).
avec prévisions à 3 jours
Nous longeons d’abord le bord du plateau le long de falaises abruptes que l’on ne peut franchir que par la route sinueuse qui entaille le roc. Nous marchons sur des dalles calcaires irrégulières, la sixième et dernière couche géologique. Si on s’approche du bord, on s’aperçoit que des fissures verticales importantes se produisent. Sans aucun doute, un éboulement aura lieu tôt ou tard. Côté panorama : calme, austérité, collines dans lesquelles on devine quelques fermes en ruine.
Nous passons à côté d’une meule de moulin cassée puis à la fontaine aux oiseaux, lieu joliment renommé pour désigner l’impluvium d’un chantier d’extraction de meules, relié par une goulotte à un bassin supérieur carré.
Nous croisons le chemin communal de Monticelli qui menait à Augès, continuons jusqu’à l’extrémité nord du plateau : le pendage de la dalle est au plus fort : 70m de dénivelée entre le nord et le sud du plateau ; évidée naturellement, à son pied, elle pouvait abriter les troupeaux. Quelques mètres plus loin, nous arrivons devant Villevieille (castrum de Podio en 1206) et son très long rempart de pierres rectiligne (120 m), avec une tour circulaire et un donjon-porte. La grande salle adjacente au rempart ressemble à une chapelle : un ancien bénitier abandonné au sol peut le faire croire mais les archéologues la qualifient de salle des gardes (fin XIIè), les fenêtres sont d’ailleurs réduites à des meurtrières ; le village médiéval n’a été qu’éphémère : guerre de religion et peste ont fait fuir les habitants et les moines au XVIè siècle.
Nous passons derrière le mur ; deux autres personnes juchées sur les murs en ruine, visitent l’ancien village ; il s’agit du Père abbé, fier de faire connaître le site à son vieil ami chirurgien ; il nous raconte avoir quitté l’abbaye de Hautecombe pour Ganagobie il y a une vingtaine d’années et que depuis, il n’a cessé de travailler à sa restauration.
Nous rejoignons l’éperon rocheux au nord et ses dizaines d’habitations écroulées, disposées de manière orthogonale. Le village était équipé d’une tour ronde dont les vestiges ont presque totalement disparu. Au loin, estoublon me montre Augès et le Tourdeau où nous avions randonné dans la neige (la chapelle d’Augès et la ferme des Lioux).
Le chemin de l’intérieur du plateau, tantôt s’ouvre sur des clairières, tantôt est enserré entre les taillis ; nous avons bien du mal à identifier la fonction de certaines constructions en pierre sèche. La chapelle Saint-Martin au profil étiré, n’a plus que les murs sur le tiers de sa hauteur ; elle est coupée par un mur de refend qui détermine deux espaces différents ; une pette nécropole entourait le sanctuaire. Les écrits n’en parlent que sur l’inventaire des biens nationaux de 1791. Petite halte sur le banc de pierre (un évier de pierre plutôt…)
L’allée de Forcalquier, autrefois appelée le promenoir parce que les moines s’y promenaient après le repas, mène à une croix blanche dominant un spectaculaire point de vue sur des étendues vallonnées, les coupoles de Saint-Michel, le Luberon. Sur la droite, j’avais déjà visité la carrière de meules lors de la fête régionale de la randonnée de 2008. Il y en a trois sur le plateau : près de la fontaine aux oiseaux, près de la chapelle Saint-Martin, et la plus grande au bout de l’allée de Forcalquier ; Martel a recensé 150 extractions. Parfois, l’extraction a échoué et la meule est restée en place.
Quant aux pierres plantées le long de cette allée de Forcalquier, elles n’ont rien à voir avec des monuments mégalithiques. C’est la base de murs d’habitats anciens.
De retour vers l’église, petit arrêt au grand enclos de pierres sèches (regardez un peu la largeur du mur !) pour trouver le Monastère notre dame de Ganagobie, par patou30.
Au nord de l’église dont le portail en festons suffit à identifier Ganagobie parmi toutes les églises romanes de France, la surface calcaire a été propice au creusement des tombes rupestres avec une cavité pour la tête. Une seule dalle de couverture est encore sur le site. Ce cimetière rupestre prolonge le cimetière médiéval qui est particulièrement important.
De là, un chemin d’accès caladé descend régulièrement sous le plateau qui peut impressionner : la haute falaise parait ici bien fragile avec ses énormes blocs rocheux tombés en masse et qui nous entourent. Lorsque le pied de la falaise n’est pas recouvert d’éboulis ou de végétation, sa partie marneuse est facilement érodée d’où la grande baume sous laquelle passe le sentier menant au village.
Une source pérenne alimente un lavoir au nord-est du prieuré ; en période pluvieuse, l’intérieur des baumes suinte : la molasse calcaire aquifère emmagasine l’eau puis la restitue un peu plus bas. Vous vous en apercevrez car une végétation bien verte et de la mousse couvrent l’intérieur de la baume. Nous rebroussons chemin avant d’atteindre le village de Ganagobie.
Maintenant qu’il est passé 15h, nous pouvons visiter l’église Notre-Dame de Ganagobie. Sans le savoir, nous marchons sur le cimetière du parvis utilisé après l’achèvement de l’église : tombes rupestres, coffrages souvent réutilisés, ou même en pleine terre. Deux des sarcophages (vidés de leur squelette !) ont été maintenus en place près de l’angle de l’église.
Les mosaïques déposées, restaurées par un atelier spécialisé, remises en place après 10 années de travail, s’étalent sur le sol des trois absides de l’église du prieuré : animaux fabuleux, chevaliers combattant des monstres maléfiques ou figures géométriques constituent un décor somptueux et diversifié que l’on peut dater de 1125 (commandé par le prieur Bertrand et réalisé par le moine Pierre Trutbert).
Le cloître autour d’une cour à ciel ouvert n’est visible qu’au travers des vitres : impossible de voir l’unique chapiteau à têtes humaines ou d’animaux sur le pilier sud-ouest seulement les feuilles stylisées des colonnettes géminées.
Près de la sortie, le fameux sarcophage de Ganagobie à l’histoire mouvementée. Trois faces sont ornées d’un décor en faible relief : croix, arabesques, parallèles, rosaces, arcatures,… Daté par Fernand Benoit du VIIè-VIIIè siècle, il a été ramené au XIIè par Mme May Vieillard puis à la lumière d’une connaissance approfondie de histoire et de l’évolution du décor sur pierre, il pourrait dater des premiers temps du monastère (Xè).
Nous terminons par la visite du petit musée et de la librairie qui vend des articles religieux, des productions issues d’autres monastères, des livres. C’est le fruit de ces ventes qui permet aux moines de continuer la restauration et l’entretien du monastère. C’est là que j’acquerrai le livre qui me servira à écrire cet article Ganagobie, mille ans d’un monastère en Provence, Michel Fixot, J.P. Pelletier, Guy Barruol, les Alpes de Lumière, 2ème édition, 2004
Image de l’itinéraire 8km180, 2h40 dépl. 132m dénivelée
©copyright randomania.fr
Bonjour je suis allez voir les constructions en ruines de Caladaire à l’ouest du monastere de ganagobie. Auriez vous des informations sur ces bâtiments et sur l’étrange construction au centre de l’un d’eux ! Merci . Alain
[ndlr] réponse par mail