Le grand lac de l’Oule à partir du col du Granon


Trouver un lac pas trop difficile d’accès n’est pas évident du tout en montagne, mais pour ce troisième jour, nous avons trouvé le lac de l’Oule au départ du col du Granon ; pour y accéder, c’est 11 km de route étroite, repérés tous les kilomètres ; nous redoutons à chaque virage que surgisse un véhicule dans l’autre sens. De nombreux cyclistes le grimpent et nous sommes admiratives de leurs exploits. Juste avant d’arriver plusieurs baraquements dont certains bouchés par des parpaings. Peut-être faisaient-ils partie de l’ouvrage fortifié des Granons ? Depuis décembre 2009, le Centre national d’aguerrissement en montagne (Cnam) a fermé. Plus de chasseurs alpins  ici même s’ils existent toujours. En 2016 le 13e régiment de chasseurs alpins s’entraînaient encore au tir et franchissement au col de Granon.

Le 7e Bataillon de Chasseurs Alpins est l’un des trois bataillons de chasseurs alpins de l’infanterie de l’armée de Terre. Il regroupe 1200 hommes et femmes installés au quartier de REYNIES à VARCES, à une dizaine de kilomètres de GRENOBLE. Unité de la 27e Brigade d’Infanterie de Montagne, désignée brigade « d’urgence » depuis les réformes de la Défense, le  « 7 » est ainsi l’un des bataillons projetés sur les théâtres les plus complexes et exigeants du fait de ses capacités et qualités de soldats de montagne.  Eskapad.info

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A peine arrivées, nous repérons la buvette du Granon qui propose boissons et  tartelettes aux myrtilles… A 2400 m d’altitude, il fait frais et mieux vaut prévoir une polaire et un coupe-vent imperméable.

Nous continuons la route repérant le 12e km sur une vieille borne kilométrique. Au loin, sur la droite, émergeant du sol, le bloc d’entrée du fort du Granon ressemblant à un blockhaus. La piste continue mais nous obliquons dans le petit sentier bien marqué à gauche qui grimpe doucement. Arrivées dans les pâturages, c’est à vue que l’on se dirige vers le col tandis que d’autres arrivent par la piste de gauche.

L’adénostyle à feuilles blanches pousse dans les éboulis d’altitude des étages alpin et subalpin. Ses fleurs roses sont groupées par capitule d’une trentaine  de fleurs. Ses feuilles sont couvertes d’un épais duvet cotonneux. Dans un mini espace marécageux des linaigrettes montrent leur plumet blanc cotonneux. Majo dégote quelques gentianes des neiges. Des fleurs typiques des hautes Alpes.

200 m avant le col, nous guettons sur la droite l’arrivée du GR57 « Tour du mont Thabor » : pas de sentier visible, pas de balisage, personne n’arrive de là, Majo doute qu’arrive ici un GR… ne sont-ils pas toujours bien balisés ?

Les derniers mètres jusqu’au col sont difficiles. Un cairn bien visible le matérialise ; de là, le grand lac de l’Oule nous fait un clin d’œil. A droite le Rocher du Loup porte une langue de neige que quelques enfants sportifs iront toucher.
La descente caillouteuse est plutôt périlleuse. Majo fait une halte côté droit : elle a vu une marmotte ! Avant de rejoindre les lacs, elle propose d’aller découvrir les ‘tables de la Loi’ – tables en pierre sur lesquelles Dieu a gravé le Décalogue remis à Moïse – plantées dans le sol, sans doute tombées du Pic du Longet. Des traces d’oxydes de fer strient la pierre.

Beaucoup de promeneurs sont installés sur les abords du grand lac de l’Oule1 mais personne ne se baigne totalement (plus de 2400 m d’altitude). Eboulis et moraines glaciaires descendent jusque dans le lac, dominé à l’est par les crêtes de Pasquier, bien noires, comme du charbon : il y a bien du houiller2, donc un niveau charbonneux. Que des montagnes autour de nous.

A l’extrémité du lac, nous traversons sur des rochers pour rejoindre un sentier qui passe non loin du lac la Barre, en forme de cœur : personne ne s’intéresse à celui-ci ; de mamelon en mamelon, nous trouvons le dernier lac, sans nom, où nous nous installons sur une pierre plate pour déjeuner. Au-dessus de nous, nous suivons des marcheurs sur les crêtes mais au bord du plus petit lac, personne non plus. L’impression de tranquillité, de communion avec la nature est totale. Encore un cri de marmotte que je n’apercevrai jamais.

Vidéo par daubram05 Du lac de l’Oule à la Gardiole : les 4 premières minutes correspondent à notre parcours jusqu’aux deux lacs

de g a d : pic Thabor , Cheval Blanc, Tours du vallon, Roche Pertuse, Grande Chalanche, Roche Bernaude, Rocca Pompea

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Les cascades de Puy-Saint-Vincent


Deuxième jour : matinée avec les abeilles à la Maison du Miel à Puy Saint-Vincent. Juliana nous reçoit, déjà bien occupée dans la boutique. Comme j’ai parrainé une de ses ruches, j’ai droit à une visite du rucher tout proche en tenue de protection blanche, chaussettes au-dessus du pantalon car les abeilles adorent les chevilles ! C’est Jérémy qui explique avec des mots simples ;  il a enfumé les abeilles (selon les études, la fumée trompe et cache l’odeur des gardiennes qui se tiennent aux portes de la ruche) ; personne n’est effrayé d’être parmi elles : elles sont plutôt calmes ; au retour des ruches, il extrait en direct le miel et nous le fait goûter.
Juliana doit détenir un secret de fabrication car je n’ai jamais dégusté autant de miel que depuis que je connais celui de lavande (avec un yaourt au lait de chèvre ou sur une tartine beurrée). Ici pas d’importation des pays de l’est, pas de mélange de divers pays de l’U.E., du bio alpin. Elle le brasse longuement, il n’a donc pas la couleur habituelle du miel de lavande : je le trouve très fin au goût.
Le petit musée pédagogique à côté de la boutique est bien illustré et plait beaucoup : on y apprend qu’une abeille exerce plusieurs métiers au cours de sa vie et qu’elle fabrique plusieurs produits : nectar, propolis, cire, gelée royale.
Une ruche : 1 reine, 40 000 ouvrières, 3 000 mâles. Quelle famille !

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Après le repas en commun avec les apiculteurs et les parrains, sur les conseils de Juliana, nous décidons d’aller voir la cascade de Narreyroux : une étoile sur la carte IGN, au sud-ouest de Puy-Saint-Vincent ; pour s’épargner le trajet à pied jusqu’au hameau de Narreyroux, il nous faut donc emprunter une route étroite et sinueuse qualifiée de ‘brise-essieux sur 4km’, c’est tout dire : c’est là qu’on voit ceux qui savent conduire. Nous avons changé le programme du jour : il va donc falloir guetter les panneaux directionnels.

Nous stationnons le long de la route (1770 m d’altitude) qui se termine bientôt en cul de sac. Au  pont de Narreyroux, je consulte le panneau : pas d’indication de cascade. Nous continuons le sentier bien tracé en longeant le torrent fougueux et bruyant à notre gauche. Les prés sont d’un vert intense, les sapins hauts et nombreux. Quelques taches de couleur – les œillets roses, les marguerites blanches – dans les prés fleuris de jaune : voilà le décor de carte postale pour une photo de Majo assise sur un rocher.

Une mélitée aux ailes en damier déploie ses ailes tranquillement sur les rhinantes à fleurs jaunes (anthères poilues en forme de rein, extrémité de la corolle violacée visible au zoom sur certaines photos). Derrière Majo une première cascade semble sautiller de strate en strate. Une deuxième cascade sur la droite tombe d’encore plus haut.
La troisième que l’on ne verra que plus tard, descend en crabe le toboggan de pierres décrit Majo. Ce sont les Pissettes du ruisseau des Lauses, alimentées par plusieurs sources situées entre 2500 et 2800 m d’altitude. La cascade descend sans doute sur plusieurs centaines de mètres et alimente le torrent si bruyant que parfois on ne s’entend pas.

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Briançon : le fort des Têtes par le parc de la Schappe et le pont d’Asfeld


Installées pour 6 jours à Briançon, Majo et moi, les bagages tout juste déposés dans l’appartement loué en centre ville, nous partons pour une petite boucle sur les hauteurs du parc de la Schappe, à la découverte des fortifications de la place de Briançon qui ne manquent pas : le changement de tracé de la frontière entraîne, entre 1724 et 1734, la construction d’un système de forts permanents autour de la ville.

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Lien vers l’album photos

La rando commence dans le parc de la Schappe, la schappe désignant les déchets de la soie : 14 kg de déchets pour 12 kg de soie. La longue usine sans fenêtre est impressionnante. J’ai du mal à imaginer Briançon en ville industrielle et pourtant, pendant 90 années, de 1842 à 1932, l’usine de la Schappe a dominé le paysage économique et social de Briançon. Inaugurée en 1863 par les frères Chancel elle traitait les déchets de la soie.

Une fois filée, la schappe était le plus souvent utilisée comme trame dans les tissus unis et façonnés.  Deux groupes d’opération étaient faites à Briançon : la première concerne les cocons.
Il y a tout d’abord une macération des déchets […]
Le nappage a pour but d’ouvrir les cocons et de paralléliser les fibres afin de les mettre en nappe. Le cardage les démêle. Enfin, le peignage permet de séparer les fibres courtes des fibres longues. Le produit passe ensuite à l’étaleur-nappeur qui transforme le ruban obtenu en une nappe. Celle-ci sera  examinée à l’épluchage, […] Le travail consiste à retirer les éléments étrangers qui subsistent dans la soie, essentiellement des cheveux. Laissez vous conter l’usine de la Schappe

Vu la taille du bâtiment, nul doute que beaucoup d’ouvriers y ont travaillé : en 1845, ils sont 40, jusqu’à 700 en 1864. On a fait appel aux habitants des villages avoisinants et à l’immigration italienne. Mais la concurrence japonaise offre ses produits à des prix trois fois moins élevés qu’en Europe. L’entreprise licencie son personnel le 24 mai 1932.

Mal balisé, le sentier passe au-dessus de l’ancien aqueduc qui fournissait l’énergie nécessaire au fonctionnement des nombreuses machines. Un panneau nous renvoie vers la droite, à l’opposé de la direction du fort des Têtes. Nous décidons de monter à l’intuition : vers le haut et vers la gauche. Le sentier étroit et raide en croise plein d’autres et nous fait suer, au sens propre ; en descente, la terre poudreuse favorise sans doute les glissades. Les hauts arbres des bois nous protègent de la chaleur.

Quand nous débarquons sur un léger replat en bordure de falaise, je m’inquiète fortement : deux chaînes s’enchaînent au dessus du vide. Pas prévu. Forcément c’est une via ferrata. Finalement, après un dernier passage caillouteux et raide, nous retrouvons le sentier balisé, un petit ruisseau qui glougloute, des fleurs des champs. Histoire de se rassurer, nous questionnons un groupe qui arrive dans l’autre sens : A la communication Y (comme si tout le monde savait ce que c’était…), contourner le fort en suivant le mur de fortification nous explique-t-il.

D’après la description de la toiture de lauzes en V et les 200 m de longueur du bâtiment, nous repérons facilement la communication Y bastionnée (1732-1734) dont le but était d’empêcher l’invasion ennemie par le vallon de Fontchristiane et permettre la circulation des hommes et marchandises entre le fort des Têtes (1450 m) et celui de Randouillet (1604 m) grâce à une large galerie couverte.  Photos sur le site fortiffsere.fr. Des travaux de rénovation sont en cours : on ne peut la visiter librement. Autrefois, on y accédait par un chemin central et un pont levis. Je trouve que, vus en 3D, la galerie et son accès dessinent en effet une lettre Y aux bras élargis.

Ce bâtiment original cache une citerne d’eau de 55 m3 approvisionnée par des sources captées dans le vallon. En cas de tentative d’approche des forts, les soldats ennemis se trouvaient bloqués en amont comme en aval de l’ouvrage par une série de fossés et chemins couverts encadrés de demi-bastions. Il est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des fortifications de Vauban depuis 2008. Wikipedia

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