Le vallon de l’Eau Salée et le cabanon des vignes


Impossible de trouver ce site à Fontienne si l’on n’est pas introduit par un habitant ou par quelqu’un qui connait. Aménagé et modelé par l’homme pour l’exploitation agricole, il a été restauré par la communauté de communes du pays de Forcalquier et de la montagne de Lure avec l’aide de l’association Alpes de Lumière. Elle a adopté un concept original : en faire un site « réhabilité » conjuguant l’accueil des visiteurs, les promeneurs et l’activité traditionnelle de parcours des chèvres. Quelques membres passionnés nous ont fait visiter ce site lors des journées du patrimoine.
* Itinéraire jusqu’au cabanon

La météo aujourd’hui à cet endroit

Un sentier longeant de vastes terrasses cultivables soutenues par des murs perpendiculaires vous emmène jusqu’au ravin de la Longière que les villageois appellent vallon de l’Eau Salée, nom qui figure sur le cadastre napoléonien de 1836. Les éleveurs y font encore paitre leurs troupeaux.

Le long du sentier botanique qui descend doucement jusque dans le vallon, quelques végétaux, arbres et arbustes sont présentés : depuis le « poivre d’âne » jusqu’à la viorne en passant par l’alisier ou la lavande fine qui s’étend jusqu’aux crêtes de Lure.

img_2597.JPGimg_2601.JPGimg_2599.JPGLe cabanon Sube : il porte le nom de son propriétaire ; couvert de lauses à Photo du dépliant publicitairequatre pentes, sophistiqué, enduit et agrémenté d’une terrasse et d’une plaque d’envol pour les pigeons, à 3 niveaux (dont une cave), il avait plusieurs fonctions : stockage, élevage, séjour. La sauge officinale a survécu au long abandon du cabanon, sur le pas de la porte, à l’endroit de la terrassse d’agrément. Une citerne sous la cave a été déblayée lors de la restauration. Bref une cabane des vignes cossue comme il est rare d’en découvririmg_2603.JPGimg_2607.JPG en pleine nature.

Le cabanon du rocher, construit près des sources, directement sur un rocher, n’a pas de toit, personne au village ne se souvenant en quoi il était fabriqué. Il pouvait abriter temporairement des hommes et leurs bêtes.

Un spectacle Jean des Pierres, écrit par l’historien Jean-Yves Royer, nous est présenté en plein air. Récit en français  (Jean Marotta) et chants en provençal (René Sette, murailleur et caladeur) me permet de comprendre presque toute l’histoire de cet homme qui parlait aux pierres. « Il fut un temps où vous n’auriez trouvé personne, dans tout le pays, pour monter une muraille en pierre sèche, sans aller chercher Jean des pierres. Lui, et lui seul, comprenait ce que disent les pierres quand le vent leur souffle dans le dos… »

img_3020.miniature.gifA la fin de la visite, le maire de Fontienne et son conseiller, fiers de la réhabilitation de leur patrimoine rural, sont venus partager avec nous l’apéritif (j’ai goûté l’orange Colombo, fabriqué à la distillerie de Forcalquier : je ne vous en dis pas plus) et les spécialités du pays, dont un fromage de chèvre au goût unique, et croyez-moi, je m’y connais car je ne mange que du chèvre ! Un plaisir simple qui me laissera l’impression d’avoir été privilégiée.

Pour une visite accompagnée oti@forcalquier.com

*** En route vers la résurgence du Ragas


En route pour le Revest les Eaux (Var), la Suisse Varoise comme certains la surnomme. A 5km de Toulon. Ce village vient de fêter l’anniversaire de sa libération à la fin de la seconde guerre mondiale. Le vieux village, aux maisons de toits roses, se mire dans les eaux claires du Ragas dont les eaux sont retenues dans un lac aménagé. * Itinéraire vers le Ragas

Belles et grandes photos de Catherine dans son article sur le barrage de Dardennes, randonnée sur le tour du lac

img_2266.JPGEtant venue pour la résurgence (de type vauclusien), je rejoins le barrage des Dardennes et j’emprunte le GR51 près du panneau d’information sur les ponts du Colombier ; l’un d’eux, a été construit aux frais du propriétaire du moulin. Tous les habitants avaient le droit de l’utiliser pour traverser la rivière avec leurs bêtes, ou leur charrette, sans avoir à payer une quelconque redevance au sieur Artigues.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie et le vent

img_2292.JPG

La découverte du barrage (construit en 1912) et de ses eaux turquoises est une agréable surprise : un paysage de carte postale. Constater qu’il n’y a de l’eau que d’un côté du barrage en est une autre ! Je n’ai compris que plus tard en quoi il était différent : alimenté par 7 sources souterraines, il ne sert que de réservoir pour la commune de Toulon.

img_2273.JPGJe marche le long du lac. De nombreuses interdictions de se baigner jalonnent le parcours mais cela n’empêche pas les gens d’être dans l’eau. Je me pose la question du « pourquoi est-ce interdit ? » sans trouver de réponse satisfaisante puisqu’il ne peut y avoir de lâcher d’eau comme dans les barrages classiques. Pour rejoindre l’autre rive, je traverse d’anciennes restanques à sec en cette saison et sur lesquelles des cultures poussent encore de manière régulière. Je n’ai aucun mal à passer sur l’autre rive. Je vois l’embouchure du torrent à son arrivée dans le lac et par curiosité, j’y pénètre. D’énormes blocs de rochers, indisciplinés, rendent la marche quasi impossible ; c’est comme s’ils avaient été violemment bousculés jusqu’en bas.

img_2276.JPGLe chemin, de plus en plus étroit, m’offre sa fraicheur sous les arbres. Il n’y a plus personne désormais. Bientôt je me retrouve coincée, devant choisir entre un étroit chemin montant ou bien le cours du torrent. Je pressens que la découverte de la résurgence n’est pas loin. J’essaie le premier mais ne trouve pas le moyen de redescendre au pied de cette énorme falaise qui barre le passage. Je décide alors de remonter le lit du torrent. J’ai l’appareil photo dans la poche, pour être prête à capter un souvenir que je partagerai avec d’autres plus tard. Malheureusement, durant cette expédition où j’utilise les mains et fais le grand écart sur les blocs rocheux, je le cogne contre un rocher. Le boîtier en gardera une trace extérieure et le viseur une feuille d’arbuste à l’intérieur. Après quelques mètres pénibles, je lève les yeux : une vieille passerelle métallique traverse la rivière ; une énorme ouverture dans le rocher me prévient que la résurgence est là. Sera-t-elle impressionnante malgré l’absence d’eau ?

Ce syphon, visité par les plongeurs, est profond de 117m ; celui de Fontaine de Vaucluse img_2277.JPGest de 315m (le 3ème au monde pour sa profondeur).

Edouard Martel qui en a fait la première description en 1894, écrit : « … sa superbe entrée s’ouvre verticale et triangulaire (haute de 10 à 15m et large de 5 à 10m) dans une pittoresque falaise. Elle domine de 40m la source ordinaire de la Dardennes.[…] Il arrivait parfois qu’après de grandes pluies, l’eau souterraine, ne trouvant pas d’épanchement suffisant par la source, s’élevait jusqu’à la gueule du gouffre et s’en échappait en torrent furieux. Profitant de cette disposition, la municipalité de Toulon a fait creuser vers 1879 un tunnel horizontal qui va drainer la rivière souterraine. »

ragas3.jpgSi vous regardez les strates redressées presque à la verticale, vous constaterez que c’est dans le joint de deux strates que l’eau a foré cette cheminée. Je m’approche de l’ouverture : la forme en ogive du fond et les restes de branches encastrés, témoignent de la puissance des eaux hivernales. …puis comme elle franchit la grille, elle s’épand soudain au dehors en un tumulte d’écume et un fracas véritablement impressionnant. Zigzags dans le Var, j. henseling, 1947, pages 39-43. Vous ne la verrez ainsi qu’une ou deux fois par an. En attendant, regardez les très belles photos du blog de Fouchepate dont une prise en janvier 2006…

Ne manquez pas le film sur le système du Ragas extrait du film “L’eau de là” (France 2), réalisé par Philippe Maurel qui m’a aimablement communiqué l’adresse de la vidéo prise lors des crues de janvier 1999. Les crues de la Reppe font l’objet d’un autre reportage filmé http://www.aiga.name/news-janvier.htm.

Continuer la lecture de *** En route vers la résurgence du Ragas

La mine de cuivre de Saint-Véran


IMG_1996.jpgPremière randonnée dans le Queyras : une boucle de 14km entre 2000 et 2300m. La période d’accommodation à l’altitude a duré un peu plus d’une journée avec nausées, manque d’appétit, accélération de la respiration et du coeur lors des premières montées en montagne. J’en ai été surprise car je pensais que l’entrainement physique pouvait m’en prévenir. Mais cela n’a rien à voir.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie

* Télécharger l’itinéraire

IMG_2033.jpgLe village de Saint-Véran, découvert grâce au jeu de geocaching, m’a charmée et agréablement dépaysée. En partant à la recherche des cadrans solaires de ce village, j’ai traversé des petites ruelles bordées de maisons typiques : rez-de-chaussée construit en murs de pierres très épais (50 à 70 cms), la fuste (partie supérieure) faite de troncs d’arbres empilés et croisés aux angles qui servait autrefois à faire sécher puis à abriter la récolte de fourrage pour nourrir les bêtes durant les longs mois d’hiver. L’autre partie, destinée aux hommes (le caset) et orientée au Nord-Ouest, est accolée perpendiculairement au bâtiment réservé aux animaux. J’ai croisé quelques villageois qui ont continué leurs activités avec un naturel déconcertant. Le tourisme ne semble pas avoir beaucoup changé leurs habitudes de montagnards.

Les plus célèbres des cadrans ont été réalisés par un artiste piémontais, de 1840 à 1845 : Giovanni Francesco Zarbula. Le décalage horaire entre le cadran solaire et la montre est lié, hormis le décalage horaire décidé par l’Etat, à la situation de Saint-Véran par rapport au méridien de Greenwich : les cadrans donnant l’heure locale ont entre 30 minutes (l’hiver) et 1 heure 30 (l’été) de décalage par rapport à l’heure légale.

Dans chacun des cinq quartiers on trouve une fontaine composée de deux parties : une partie ronde qui servait d’abreuvoir pour les bêtes et une partie rectangulaire où les femmes lavaient le linge. Une des croix de mission véhicule un message mystique « nécessaire », témoin de la ferveur religieuse de nos ancêtres ; je la relis deux fois tant je suis étonnée de sa teneur ; nous devons : « …ou souffrir comme un saint, ou comme un pénitent, ou comme un révolté qui n’est jamais content »… Avec l’église réformée, les nombreux artisans qui travaillent sous nos yeux, ce village est bien l’un des plus typiques de France.

IMG_2002.jpgIMG_2004.jpgPartie du parking payant à l’entrée du village que j’ai traversé dans sa longueur, j’ai suivi le sentier de la navette de Clausis qui monte doucement de 250m sur 3,6km. Là, j’ai pris la direction du pic de Chateaurenard. Presque plus rien ne pousse : pas d’arbre, pas de fleurs. C’est comme dans un désert. Je suis tentée de couper les virages en lacet mais la fatigue m’engage à la prudence. Après la cabane de Labounnais, isolée et déserte, je tourne à droite sur un étroit sentier qui traverse à gué plusieurs canaux. Le sentier, grossièrement parallèle à la route de la mine, évolue en altitude. Il devient de plus en plus caillouteux et difficile. Puis, soudain, les rochers changent de couleur. Ils prennent des teintes irisées, bleutées, parfois en veines obliques que, malheureusement, les photos ne restituent pas. Je traverse la mine de cuivre à ciel ouvert à 2300m d’altitude. Sur le territoire de cette plus haute commune d’Europe, elles n’étaient exploitées que de manière saisonnière, le manteau neigeux pouvant atteindre plusieurs mètres en hiver.IMG_2008.JPGIMG_2007.JPG

La première étape du traitement des minerais sulfurés en vue de l’obtention de concentrés consiste en des opérations successives de tamisage, concassage, broyage et triage, qui les transforment en poudre grossière, sur laquelle on projette de l’eau. Par un traitement de flottation dans l’eau puis de décantation, qui consistent à faire remonter à la surface la partie la plus riche du minerai pour le séparer des boues qui restent au fond du bain, on obtient un concentré contenant ici jusqu’à 40 % de cuivre. C’est un site particulièrement riche.

J’ai descendu le torrent de Pinilière, non loin de la vieille cabane de mineur du même nom, pour visiter les installations modernes en contre-bas, descente un peu difficile mais aucun chemin à cet endroit ne permet de rejoindre l’entrée de la mine. « Les travaux du 20ème siècle comprennent 6 niveaux de galeries : les trois supérieures recoupent les travaux anciens. Les chambres d’abattage s’étagent sur 130m de dénivelé, desservies par des galeries. » L’exploitation s’est arrêtée en 1956. Les premières traces d’une exploitation du cuivre dateraient du chalchotique (âge du bronze ancien).

schéma extraction cuivre.jpg

La loi de 1941 en matière de protection archéologique a été appliquée […] récemment pour le site minier de Saint Véran (Jugement du TGI de Gap du 18 février 1999 – délibéré du 6 mai 1999) : le 18 février 1999, plusieurs minéralogistes sont pris en flagrant délit de fouilles dans les haldes de la mine afin d’y récupérer des minéraux. Les prévenus sont également munis de détecteurs à métaux. Le responsable,…, a été condamné à une amende de 20000 F dont 10000 avec sursis. De plus, le tribunal… ordonne aux frais du condamné la publication par extraits de la présente décision dans quelques journaux.

* L’incontournable site Tourisme et randonnée en Queyras avec superbes photos prises sur la route de la mine

Une exposition permanente gratuite dans le four banal du quartier des Forannes, retrace son histoire.

Je rejoins le village par le classique chemin de la mine empruntée par la navette d’été qui dépose les touristes à une demie-heure de la chapelle. La fatigue commence à se faire sentir et c’est avec plaisir que je retrouve ma petite auberge de Pierre-Grosse à Molines-en-Queyras.

bullet1.gif

Merci à Playwell.be d’avoir placé cette cache, probablement la plus haute de toute la France, difficile d’accès. Elle n’a été visitée que 5 fois, trouvée 2 fois, depuis sa création.

Barge H., Ancel B., Exploitation d’une mine de cuivre préhistorique : Les Clausis à saint-Véran, in : L’énigmatique civilisation campaniforme, Dijon, Faton, p. 46-49 (Archéologia – hors-série, 9)

Andrée Lantier, Vivre dans la plus haute commune d’Europe : Saint Véran 2040m, ed. Serre, 1983

J. Tivollier et P. Isnel, Le Queyras, ed. Lafitte Reprints, 1985 (1ère ed. 1938)

Richard Wacongne, Randonnées sur les sentiers du Queyras, Glénat, 2004