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De la glacière à la chapelle Saint-Pancrace de Puyloubier


Tout a commencé lorsque, en étudiant le cadastre napoléonien de Puyloubier (= colline des loups), je repère un petit cercle marqué ‘glacière’ dans le bois de la Glacière ; je n’ai rien vu lorsque j’ai parcouru le sentier vigneron qui passe pourtant bien près. André m’envoie une photo aérienne sur laquelle il l’a repérée. J’en profite donc pour ajouter quelques points d’intérêt.

Nous partons de la cave des vignerons, passons devant le lavoir communal, le parking des Vertus et descendons le chemin un peu boueux menant au vieil oratoire Saint-Roch. Nous longeons le bois jusqu’à être à l’aplomb de la glacière dont on aperçoit les ruines depuis le chemin.

Une construction couverte en ogive pourrait être une ancienne source ; nous avons été surpris de l’humidité présente partout : beaucoup de puits, ruisseaux, citernes, lavoirs témoignent de ce passé hydraulique.

Bien que proche de celui-ci, la glacière n’est pas si facile d’accès : terrain embroussaillé, raide et glissant, bois mort au sol, il faut grimper tout en passant au dessus des obstacles. Murs épais, toiture écroulée, 5 m de diamètre intérieur ; on devine cependant l’entrée par laquelle on chargeait la glace à rafraîchir l’hiver ; l’intérieur est comblé et colonisé par une végétation humide. Où étaient le(s) bassin(s) de congélation ? devant la glacière ou près de la source du domaine la Tour ? A l’arrière côté vallon, à l’accès un peu risqué (c’est André qui a pris le risque !) se trouve probablement l’évacuation des eaux de fonte.

Une glacière est une construction souterraine, couverte, dans laquelle on accumule de la glace que l’on a fait geler l’hiver dans des bassins, pour la récupérer l’été ; au XVIIe, petit âge glaciaire selon Le Roy Ladurie, c’était encore possible même à faible altitude. La glace est transportée sur des charrettes jusqu’au lieu de débite. Ceux qui sont assez riches paient un impôt sur la parcelle où elle est construite.

Puyloubier n’est pas indiqué dans les actes notariés étudiés par Jean Proust dans Développement des glacières provençales au XVIIe siècle et la glacière de Pélissanne, Actes de la première rencontre internationale sur le commerce et l’artisanat de la glace, Brignoles, 1994, ce qui nous prive de sa datation. La majorité des actes concernent les bourgeois, marchands et hôteliers. Comme celle de Puyloubier est en ruine en 1826, on peut supposer qu’elle date du XVIIIe et qu’elle a été construite par le propriétaire précédant Louis Camoin, de Marseille.

Un semblant de sentier au pied de la glacière nous permet de redescendre sur le chemin vigneron pour rejoindre la route de Trets. Sous le pont des Graminières, à deux pas d’un ancien puits, en se penchant sur le ruisseau de Saint-Pancrace, je remarque le fond dallé, de grandes dalles plates… un aménagement dont je n’explique pas la fonction.

La suite est plus aléatoire : j’aimerais rejoindre le domaine de La Tour sans marcher sur la route de Trets ; nous commençons le long des vignes qui sont tellement boueuses que nous la rejoignons finalement. Les vignes ont enfin pris des couleurs d’automne ; au fond, sur fond de montagnes Aurélien et Olympe, un pré si vert qu’on dirait une pelouse de golf.

Début variante aller-retour à la chapelle Saint-Pancracesant Brancai : continuer sur le chemin départemental jusqu’à l’intersection avec le chemin de Saint-Pancrace ; se retourner pour voir les deux tours des anciens moulins à vent et l’ancien moulin à eau côté droit de la route… qui ne ressemble plus à un moulin depuis longtemps…

le moulin 2020
le moulin à eau en 1826

Le moulin à eau fonctionnait avec une écluse alimentée par un canal dérivé de la rivière dont le tracé est encore visible dans une vue aérienne. Une vanne de régulation permettait de réguler le débit d’eau arrivant au moulin ; un canal de fuite évacue l’eau vers la rivière au sud. Du fait du faible dénivelé entre la prise d’eau et le moulin, je suppose que l’eau passait en dessous de la roue. ; l’ancien moulin à eau est devenu habitation ; canaux et écluse ont été comblés.

Isolée au milieu d’un cadre champêtre accueillant, accessible par une route peu fréquentée, la chapelle Saint-Pancrace consacrée au Xe siècle a été entièrement rénovée : reconstruction des dix contreforts latéraux et d’une voûte intérieure, réfection des façades et des enduits intérieurs, réalisation d’une calade autour de l’édifice [peu visible], amélioration des abords. Selon Fréquence sud. Photos de l’intérieur sur le site dignois.fr
Elle a été bâtie sur les vestiges d’une villa gallo romaine dont quelques pierres d’époque se trouvent encore sur le site.

Lors du pèlerinage de mai, les pèlerins se rendent à pied à la chapelle depuis le centre du village. Le buste de saint Pancrace est porté par quatre jeunes pèlerins, qui le posent au bord de la vigne où le père Brice va procéder à la bénédiction du raisin, fruit du travail des hommes. Les chapelles Saint-Pancrace ne manquent pas en Provence : Digne-les-Bains, Manosque, Forcalquier, Oraison par exemple dans les Alpes-de-Haute-Provence.

LE RITE DE LA PIADE : Après la messe du pèlerinage, les enfants marchent autour d’un bloc de pierre de l’époque romaine [selon Gérin-Ricard, Les antiquités de la vallée de l’Arc, ce serait quatre trous de scellement d’un manège gallo-romain dont le pivot tournait dans l’excavation circulaire] creusé en son centre et disposant de quatre empreintes à l’entour, qui, selon la tradition, sont celles des pieds (les piades) de Saint Pancrace : chaque enfant fait trois tours et ensuite le prêtre lui enjoint de marcher droit dans la vie [ou raffermir les jambes selon d’autres].
Pancrace de Rome, serait selon la tradition né vers 290, d’une famille noble de Phrygie. Il meurt en martyr à l’âge de 14 ans, lors des persécutions de Dioclétien à Rome. C’est le deuxième saint de glace. Selon Les pélerinages de Provence, Puyloubier

Fin variante chapelle Saint-Pancrace : au retour, prendre le sentier à gauche juste après l’accès au domaine ; il longe le ruisseau puis nous mène à un spectaculaire réservoir enterré mais non couvert auquel on accède par quelques marches ; un ensemble de tuyaux sortent du réservoir, suivent un canal latéral qui alimentait peut-être un réservoir pour faire geler la glace transportée ensuite dans la glacière.

Quand le domaine a été mis en vente aux enchères en en 1862, le vieux jas de la Tour possédait bâtiment de maître et de fermier (le propriétaire est marseillais et confie son domaine à un fermier), écurie, étable, remise et cellier. Comme souvent au XIXe, quand un propriétaire terrien meurt, ses héritiers, qui ont un tout autre métier, vendent le domaine, démembré ici en trois parties à cette occasion (Le Mémorial d’Aix 17 mai 1863).

Benoît, Pierre, Gabriel Blanc dit Bénoni (1812-1887), artiste peintre, connu pour ses dessins géologiques et archéologiques documentés, a fait le don de ses œuvres à la société d’études historiques, artistiques des Hautes-Alpes qui en a fait l’inventaire en 1893. Certains dessins concernent Puyloubier et le domaine de La Tour. J’espère que les archives des Hautes-Alpes m’enverront une copie…

Au loin, côté ouest, les deux tours des moulins à vent du domaine La Tour ; au nord la Torque dans Sainte-Victoire. Des trois moulins du domaine, il ne reste aujourd’hui que ces deux tours de moulins à vent. Je n’ai rien trouvé de plus pour l’instant.

Nous tentons le retour par le bas de la colline ; d’abord bien dessiné au pied de gigantesques restanques, le sentier se perd sur une hauteur couverte de quelques pierres équarries. Nous redescendons pour trouver tant bien que mal un passage vers les vignes parmi les morceaux de bois morts et la garrigue hostile. Là, ça se passe plutôt en ‘mode sanglier’ ; nous retrouvons un sentier d’exploitation en haut des vignes de la Bastidette qui rejoint le sentier vigneron (attention partie probablement en terrain privé).

Direction l’ensemble restauré du lavoir de Lauvade que je vous ai présenté dans mon précédent article sur Le sentier vigneron de Puyloubier. Un puits juste à proximité tout comme à proximité du modeste lavoir de Dain restauré également et que j’ai enfin trouvé par un petit aller-retour en tournant à gauche au croisement du sentier charretier et de la route du Puits de Dain.

Retour au parking de la cave coopérative par la route du Puits de Dain et achat d’un AOP Côtes de Provence Sainte-Victoire rosé Palaéos… le plaisir qui suit la rando…

Un parcours inédit entre vignes, champs pour les plus curieux d’entre vous qui accepteront la marche sur de petites routes.

Image de l’itinéraire 8km290, 2h25 (4h10 avec pique-nique et visite), 72m (+136, -136).
Variante chapelle Saint-Pancrace A/R en violet, 2km490, 45mn, + 19m
Total : 10km780
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