La chapelle Saint-Pancrace par le refuge d’art


Un vent glacial souffle aujourd’hui, 20 février 2010, sur Digne-les-Bains ; je ne monte pas très haut : j’espère ne pas rencontrer de neige. Il reste un emplacement de parking aménagé sur la droite, peu avant le panneau indiquant que le col Corobin est fermé, et des places le long de la route non loin du départ du sentier.

La météo à cet endroit, aujourd’hui et à 3 jours
avec le vent

IMG_3645r.JPGIMG_3643r.JPGJe longe le torrent des Eaux-Chaudes dont la couleur brune indique qu’il charrie de grandes quantités de boue depuis les intempéries des derniers jours. Sur quelques mètres je longe la route déserte avant d’obliquer à gauche dans un sentier bien repéré. Dès le premier virage vers l’est, le vent a rendu la neige verglaçante ; je dois passer au-dessus d’éboulements récents. Puis je passe le portillon retenu habilement par un gros ressort en spirale afin qu’il se referme automatiquement derrière les promeneurs. IMG_3695r.JPGAu carrefour suivant, changement de décor :  les marnes noires constituent un paysage en grosses bosses entre lesquelles coule parfois un filet d’eau et où se faufile le sentier. Impossible d’y placer un panneau peint de jaune : c’est une grosse flèche constituée de pierres accolées au sol qui me confirme le bon chemin. Ces robines caractéristiques ont donné leur nom au village de la Robine-sur-Galabre.

IMG_3653r.JPGIMG_3656r.JPGDans une ancienne cabane de berger, l’artiste anglais Andy Goldsworthy a sculpté une entrée de forme circulaire et y a construit un cairn en gros galets. Il a placé des bancs à l’intérieur comme à l’extérieur qui permettent de se reposer, regarder les robines ou… pratiquer l’introspection. C’est un des nombreux refuges d’art qui sillonnent les chemins de la Réserve géologique.

Les bains thermaux, refuge d’art d’Andy Goldsworthy, page 8

IMG_3661r.JPGIMG_3664r.JPGAprès l’oratoire sanglé dans du fil de fer, nouveau changement de paysage : je traverse un passage en forêt avant d’entamer la montée ; je croise un sportif en T-shirt qui dévale la pente à toute allure alors que je suis emmitouflée dans une écharpe et porte des gants ; une fois sur la crête, je peux reconnaitre la barre des Dourbes enneigée et le pic de Couard que m’a présenté estoublon de la veille. Je retrouve des passages verglacés. Des ânes sont passés par là : d’ailleurs, sous la chapelle, un ratelier est accroché à côté de la citerne qui se remplit d’eau de pluie.

IMG_3676r.JPGIMG_3679r.JPGIMG_3678r.JPGAu bout d’un sentier verglacé, une croix en fer forgé domine la ville de Digne. Avec beaucoup de précaution, je le parcours jusqu’au bout, passant à côté d’un panneau indicateur très explicite pour qui connait tant soit peu le provençal « cagadou ». Depuis la croix, la ville de Digne m’apparait coincée entre ses montagnes. Quel spectacle !

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La chapelle Saint-Michel de Cousson


IMG_0021.jpgIl n’y a pas un Cousson mais deux ! C’est la montagne des Dignois. Pour nous y rendre, nous  allons à Entrages annoncé fièrement par des buis taillés de chaque côté de la chaussée. Un « chateau », résidence campagnarde construite en 1782, dont les fenêtres de derrière ont toutes été murées, a dû avoir son heure de prospérité au XVIIIème siècle.

IMG_2744r.JPGA Entrages, le seul droit de péage ayant existé depuis le moyen-âge est le curieux et modique droit de pulvérage1 qui permettait aux seigneurs de percevoir une taxe chaque fois que des troupeaux de moutons traversaient leurs terres incultes pour rejoindre les pâturages d’été de Haute-Provence, ou dans l’autre sens, pour rejoindre la Basse-Provence en hiver.

Durant leur trajet, les transhumants étaient censés trouver de la nourriture sur les chemins qu’on avait tracés pour eux. C’est pour dédommager les seigneurs que fut instauré ce droit. Il était calculé en fonction du nombre de bêtes et de la distance parcourue sur les terres du seigneur. Annales des Basses-Alpes. Bulletin de la Société scientifique et littéraire des Basses-Alpes 1899-1900, T.9.

Les lettres patentes du 16 janvier 1764 maintiennent le statut de Provence concernant le droit de pulvérage et autorisent les seigneurs à lever ce droit sur les troupeaux d’averages ou de moutons brebis, chèvres et chevreaux passant par leurs terres gastes, à raison de 6 deniers par «trentenier2», sans qu’ils puissent rien exiger pour les boeufs, les vaches, les chevaux, mulets, ânes et cochons.  Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790, Bouches-du-Rhône…, M. Blancard, P. Dupont, Paris

IMG_0027.jpgLe parking au bout du village est déjà plein : le Cousson et sa chapelle attirent beaucoup de monde. Au delà, plus de route, seulement le GR qui monte au Cousson. Par une montée continue jusqu’à 1511m d’altitude, nous sommes le plus souvent en plein soleil. Dans la descente empierrée où les racines sont de véritables pièges, une équipe de VTTistes tentent de descendre sans mettre le pied à terre. Nous les laissons passer, appréciant leur sens de l’équilibre. L’un d’entre eux passe par-dessus son guidon et disparait dans le fossé. Plusieurs minutes plus tard, il émerge sans grand dommage.

Descriptif de la randonnée sur le site Haut-Vernet (boucle)

Au pas d’Entrages, nous quittons le GR pour le tracé jaune qui contourne la cuvette formée par les deux sommets du Cousson. Nous croisons une randonneuse partie à 8h du lieu-dit les Eaux-Chaudes. Ce nom vient du torrent d’eau chaude, sulfureuse et saline, jaillissant à des températures diverses, entre 42° et 45°, par neuf sources, au pied d’un immense rocher aux pentes nues : ce sont là les Thermes de Digne » ; un couple accompagné de son vieux chien qui tire la langue, tente de persuader ses enfants qu’ils sont bientôt arrivés.

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Enfin, au loin, la chapelle Saint-Michel apparait en bordure de falaise, défiant le vide. On ne voit qu’elle tant l’espace est dégagé. Elle est si proche du bord qu’il est impossible d’en faire le tour complet et si on le tente, mieux vaut ne pas avoir le vertige et avoir recommandé son âme à Saint-Michel…

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*** Les gorges de Trévans


IMG_1887.JPGJuste avant d’arriver au parking, nous reconnaissons avec étonnement, une vieille coupole d’observation astronomique.

La pureté du ciel provençal a inspiré bien des astronomes. Là où l’Estoublaïsse prend sa source, se dresse une coupole incongrue, isolée dans un monde minéral. Ancien observatoire du CNRS, Chiran, 1905m d’altitude, a depuis longtemps été abandonné par les scientifiques. Trop éloigné, trop difficile d’accès.

Départ du parking à droite avant le pont, bien avant le village abandonné de Trévans dont la visite complètera agréablement la journée. Les geocacheurs y chercheront la cache d’estoublon les gorges de Trévans.

tombe_cimetiere_trevans.jpgAutour des années 30, il ne restait à Trévans qu’une seule famille et 7 bêtes. Aujourd’hui le village construit autour de la chapelle, est abandonné : seul le cimetière – curiosité surprenante – semble toujours visité avec deux tombes fraichement fleuries. D’autres communes entre Asse et Verdon ont déjà disparu comme Bédéjun et Creisset. Il s’agit bien d’une région qui meurt (R. Blanchard, 1945). Trévans a été rattaché à Estoublon en 1973.

IMG_1886.JPGLe premier panneau annonce « Camp Josette maquis de Trévans avril 1943 avril 1944 » ; le camp Josette se situe au nord de l’entrée des gorges, sur la commune de Beynes. Comme souvent dans les Alpes de Haute Provence, les lieux de randonnée sont jalonnés de tels panneaux qui commémorent des faits de résistance.

Le maquis Fort de France voit le jour en février 44. Ses dirigeants proviennent de l’école des cadres de la Résistance […]. La vie au camp est rythmée par de l’instruction militaire avec formation aux techniques de guérilla, par les corvées de casernement et par l’entraînement physique . Le 19 mars 1944, le maquis, menacé par l’ennemi d’une opération de ratissage, quitte La Melle en pleine nuit pour se rendre au village de Majastre. Au petit matin, les allemands arrêtent dans la petite chapelle deux maquisards. En partant les Allemands incendient le hameau. Manfred ordonne alors le repli du maquis sur le camp Josette […]. Il meurt le 18 juillet 1944.

Basses-Alpes 39-45 une mémoire vivante

IMG_1889.JPGIMG_1893_1.JPGLe parcours est balisé par un symbole rouge non identifié (tête de faucon, selon Monique). Nous longeons d’abord l’Estoublaïsse, torrent invitant à la baignade, puis arrivons à un carrefour où un panneau d’information nous laisse perplexes « Sentier du pont de Tuf ; sentier escarpé encordement conseillé ».  Nous ne le trouvons pas sur le plan et sommes donc incapables de savoir si la randonnée préparée passe par là. Nous décidons de nous y engager quand même, aucun commentaire lu sur cette boucle n’ayant signalé un quelconque danger.

Photo CAIRN DigneEn voyant la photo du rocher portant en lettres d’or natura numquat errat1 (merci Annie pour l’information), j’ai de suite reconnu l’œuvre de l’artiste herman de Vries qui sème ça et là de telles traces dans la réserve géologique de Digne http://www.musee-gassendi.org/trouver-traces-territoire-dignois.html et dans le monde. J’avais déjà découvert de telles traces quand je suis montée à l’ermitage orthodoxe Saint-Jean. M. Balalas, grand amateur de langues, traduit ainsi cette phrase : la nature ne se trompe jamais.

IMG_0338.jpgIMG_1892.JPGNous commençons à grimper jusqu’à dominer les gorges de Trévans à en avoir le vertige ; les passages vertigineux sont tous sécurisés. Sur l’autre rive de la rivière, tout en haut d’une colline pointue, nous reconnaissons les ruines de la chapelle Saint-André que nous irons visiter l’après-midi. Nous montons et descendons sans arrêt, traversons des sous-bois ou longeons la falaise au soleil. Le sentier étroit longe le ravin, tourne et retourne, pas d’ennui.

IMG_1902.JPGIMG_1903.JPGValbonnette est un hameau ruiné, ensemble de deux grandes maisons le long du sentier. Dans l’une d’elle, les poutres de bois se sont écroulées ; dans l’autre le four à pain est encore en bon état. Mais de quoi pouvaient bien vivre ceux qui habitaient en pleine forêt ? Au carrefour suivant, nous comprenons enfin où se trouve le pont de tuf dont l’accès est interdit. Nous n’y allons pas, nous prenons la direction du refuge de Valbonnette.

Trévans évoque une personnalité bien connue des faïenciers de Moustiers : Pierre et son fils Antoine Clérissy. […] la noblesse n’était pas établie parmi ces derniers [les Clérissy], puisque l’un d’eux, Pierre, … reçut l’anoblissement et le titre de baron de Trévans, avant 1743, en récompense de ses signalés services dans l’art céramique.

Nouvelles archives de l’art français, M. Jules Guiffrey, Paris, 1876

Descriptif randonnée par le site eskapad

IMG_1914.JPGIMG_0351.jpgIMG_1906.JPGAprès la forêt de mélèzes, nous arrivons au gite qui est en bien mauvais état, sans porte. Le couchage en hauteur existe toujours. Non loin, des cris d’enfants heureux qui se baignent dans la rivière. D’autres se sont installés sur les rochers au milieu de l’eau pour le déjeuner. Les jardins de Valbonnette, voilà vraiment un endroit  idéal pour le pique-nique… et la sieste.

IMG_1912.JPGIMG_1909.JPGTraversée de la passerelle pour passer sur l’autre rive ; ne remontez surtout pas le pierrier en face mais tournez à gauche, escaladez le rocher en vous aidant de la balustrade de fer. Au croisement bien repéré, nous entamons la montée vers le monastère Saint-André du Désert. Que c’est dur une dénivelée de plus de 200m quand il fait chaud ! Les archives muncipales d’Estoublon possèdent des pièces concernant ces biens ecclésiastiques. Craignant que les protestants s’y réfugient durant les guerres de religion, il fut détruit par précaution par les catholiques en août 1575. J.-F. Cruvellier, Histoire de Barrême, Société scientifique et littéraire des Basses-Alpes, p 43. Devenu monastère des Carmes au XVe siècle, il est transféré à Estoublon au XVIe. Le marquis d’Estoublon aida également à la construction de l’église du couvent des Carmes à Arles.

Le monastère de Trévans sur randomania… Plus

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