* Cap Morgiou


Dès l’entrée dans le chemin de Morgiou, nous croisons des chasseurs. Au vu des traces de terre abondamment labourée, les sangliers ne sont pas loin. Mieux vaut sans doute les sangliers que la fameuse panthère noire de 2004 qui avait obligé la fermeture des calanques et la réquisition de l’armée ! N’empêche que nous avons cru en voir une, nous aussi, dans les carrières de Beaulieu au nord de Montpellier. Avis aux amateurs de sensations qui voudraient aller vérifier.

img_9581r.jpgDes touffes de globulaires bleus apportent une nuance printanière à cette randonnée d’automne. Après le chemin des crêtes de Morgiou, c’est la descente jusqu’au col du Renard qui est particulièrement difficile et risquée : un pierrier glissant de façon continue. Nous remontons ensuite jusqu’au fortin dont la longue muraille traverse presque totalement le cap dans sa largeur.

img_9578r.jpgimg_9585r.jpgimg_9591r.jpgCe fortin, construit en 1614, aurait été utilisé par les anglais appelés par la contre-révolution royaliste de 1793. En longeant le rempart construit directement sur le rocher, on s’aperçoit que l’enceinte devait veiller sur l’entrée des ennemis par la mer et leur accostage à partir de la calanque de Morgiou. A l’abri du vent derrière le mur de la batterie Est, un groupe de randonneurs déjeunent tout en discutant avec bonne humeur. Après la découverte de la cache Cap Morgiou : face à la mer de Bestioles, nous déjeunons plus loin, derrière un vestige de mur, près d’un énorme trou désormais comblé par des pierres : peut-être la carrière qui servit à construire le fort ?

Batteries du cap Morgiou

Calanque de Morgiou, histoire du fortin

grotte_cosquer_coupe.jpgA nos pieds, la calanque de la Triperie (mais pourquoi ce nom ? il semble avoir été donné récemment, peut-être par les militaires qui ont établi les cartes), bien à l’abri du vent, est étrangement calme et arrondie. L’entrée d’une vaste grotte sous-marine apparait dans la falaise verticale. reconstitution_cap_morgiou.jpgPlus à gauche, dans la pointe de la Voile, la célèbre grotte Cosquer s’ouvre sous 37 m d’eau. Henri Cosquer y découvre, en juillet 1991, des traces de mains, des peintures et des gravures. La datation au carbone 14 permet de faire remonter l’occupation de la grotte par l’homme entre 18500 et 27000 ans avant JC. » Elle est désormais murée pour être protégée. A gauche une tentative de reconstitution à l’époque où elle n’était pas envahie par la mer. La grotte Cosquer, site du ministère de la Culture

img_9601r.jpgimg_9603r.jpgimg_9615r.jpgimg_9620r.jpg

cap_morgiou_1.jpgJe pousse jusqu’au cap Morgiou, étroit et descendant jusqu’à 20m au-dessus de l’eau : à 2m des bords de la falaise, la sensation est grisante (1ère photo de gauche dans la série). Vu d’avion et inversé nord-sud, ne trouvez-vous pas qu’il a la forme d’un hyppocampe… ou d’un pélican ?
C’est l’heure de la descente vers la calanque de Morgiou et ses cabanons, presque tous construits en dur désormais, avec des installations sanitaires qui n’ont plus rien de rustiques. Nous reconnaissons sans difficulté, le torpilleur, îlot rocheux de la calanque de Sugiton ressemblant  à un navire de guerre (3ème photo de la série). Autrefois la pêche au thon se pratiquait à l’aide d’installations semi fixes, les madragues. Pour la madrague de Morgiou (1622-1853), voir la partie histoire des calanques sur le site du groupement d’intérêt public des calanques. En 1622, […], Louis XIII âgé de 21 ans, au cours de son passage à Marseille s’est vu offrir un divertissement organisé par la Prud’hommie des Pêcheurs de Marseille. Le jeu consistait à emprisonner des thons dans des seinches d’où ils ne pouvaient s’échapper. Cette pêche se pratiquait également sur la côte bleue ; elle a été interdite parce qu’elle n’était pas sélective. La calanque de Morgiou.

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Les pénitents des Mées


Album de la fête régionale randonnée 2008 (1)

Un week-end consacré à la randonnée, week-end organisé par la fédération régionale de la randonnée, à Volonne (04) pour sa seconde édition. On s’est raccroché au groupe à la dernière minute et nous ne l’avons pas regretté. L’hébergement en camping **** à Volonne (04) était à la hauteur de l’organisation.

penitents_wikipedia.jpgphoto wikipedia

Description de la randonnée, par le site saute-collines

 

IMG_0289.jpgIMG_0299.jpgLa première randonnée nous mène jusqu’aux fameux pénitents des Mées (itinéraire de 13.5km,  dénivelée 460m, 5h30 environ avec l’arrêt pique-nique) que tout le monde voit au loin en se rendant dans les Alpes mais que personne n’escalade jamais.

Ma météo aujourd’hui à cet endroit

Nous partons du village des Mées. Il a plu de la veille et le départ commence fort : se promener sur des galets mouillés compacts alors qu’on est si loin de  la mer, ça fait plutôt bizarre ! c’est un sentier en pente un peu raide, sur lequel la mairie décline toute responsabilité. Dans un virage en épingle, nous passons à proximité de la chapelle St-Roch, puis près d’une borne kilométrique (D101) et d’une fontaine moderne. Au XVIème siècle, cette chapelle prend ce vocable, certainement après les épidémies de peste de 1580 ou 1589, Saint-Roch étant habituellement invoqué lors de la peste et du choléra. J’en ai rencontré beaucoup dans la région, la peste de 1720 ayant débuté à Marseille, et s’étant propagé dans toute la Provence (voir La malédiction du grand Saint-Antoine dans ce blog). A la Révolution, elle est vendue comme bien national. Le 29 septembre 1984 M et Mme Jean-Marie Henry en font don à la ville des Mées. « L’Association a consacré exactement 20 chantiers de bénévoles […] soit pour monter les matériaux pour la toiture, soit pour rendre le chemin accessible et aménager l’intérieur de la chapelle et le parvis. » (extrait du site de l’association les Amis des Mées). C’était probablement l’église paroissiale primitive, lorsque le village était accroché au versant du rocher.

IMG_8132.JPGIMG_8143.JPGIMG_0310.jpgIMG_8135_galets.JPG
Marque de l’érosion sur les pénitents ; vue de près sur le poudingue

Bientôt, nous sommes sur la crête, dominant les pénitents qui semblent bien grands désormais. On les appelle ainsi en raison de leur silhouette ; d’après la légende, ils représentent les moines de la Montagne de Lure qui ont été pétrifiés par saint Donat au temps des invasions sarrasines pour s’être épris de belles jeunes femmes Mauresques qu’un seigneur avait ramenées d’une croisade. De là haut, je me rends mieux compte de leur composition et je vois que des morceaux de galets se détachent encore : l’érosion continue.
Schématiquement c’est le résultat de 3 phases essentielles (voir en détail Rochers et légendes, du site des Amis des Mées avec schémas):

  • 25 millions d’année : la faille de la Durance élève le côté ouest (Forcalquier, Manosque,…) ; contre cette élévation butent les anciennes rivières de nos rivières actuelles (la paléo Durance, par exemple) ; plus au nord naissent les Alpes aussitôt attaquées par l’érosion. Ces blocs arrachés, roulés et devenus galets s’accumulent dans un delta de 60 km de long et de 30 km de large (zone du plateau de Valensole), sur des épaisseurs considérables (Les Mées: 600 à 800 m.). Le calcaire dissout dans l’eau les cimente avec un grès très dur. La roche ainsi formée constitue le poudingue.
  • Ces dépôts s’arrêtent il y a environ 2 millions d’années. Au niveau des Mées, en profondeur, une couche épaisse de conglomérat accumulé, de plus de 100 mètres d’épaisseur et longue d’au moins un kilomètre, se trouve enfermée dans cette masse. Sont déjà pré-formés les futurs pénitents…
  • la Durance attaque le poudingue, le « rogne » sur une épaisseur d’environ 400 mètres. A chacun de ses passages puissants, elle arase le sol et crée une terrasse ; des vallons se forment, tel celui de la Combe.
    Quand elle atteint les Mées, elle butte contre cette partie très dure, racle la face nord-ouest et rabote ainsi une haute façade verticale. Nous retrouvons aujourd’hui, sur l’avant de nombreux rochers, cette face plane.
  • Lors des périodes glaciaires, le gel débite le poudingue en morceaux et laisse les matériaux sur place. Mais aux époques plus chaudes, les eaux sauvages venant du plateau emportent tous les matériaux instables qui vont s’engager dans les fissures existantes et ronger profondément le poudingue.

Sur le coté ouest, le poudingue, profondément travaillé dégage des monolithes. De cette double érosion, latérale et verticale, résultent ces formes coniques qui sont devenues des Pénitents. L’érosion continue toujours…
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Travaux et fouilles au prieuré de la Sainte-Victoire


img_7713r.jpgDépart 8h du parking des Cabassols. Avec une bonne dénivelée1 de 600m, et quelques rares plats, mieux vaut partir doucement sur le sentier des Venturiers, comme le faisaient sans doute les pèlerins de jadis venus de Pertuis (1h30 env.). On traverse la Cause. A la cote 710, c’est la fin du large chemin et autrefois le point de dépose des matériaux servant à la restauration du prieuré. Au bon cœur de chacun de se charger d’un sac de pierre jusqu’à l’édifice, en vue d’aider l’association Les Amis de Ste-Victoire à la remise en état. Mais aujourd’hui 8 mai, c’est en 4×4 que je parcours la partie la  plus difficile : je viens aider les Amis de Ste-Victoire dans leurs gros travaux de restauration et de fouilles au Prieuré.

La météo à cet endroit
avec prévisions à 3 jours

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tulipe-meridionaler.jpgUn sentier plus étroit serpente en larges lacets jusqu’au prieuré (photo aérienne extraite de geoportail 3D de l’IGN). On passe au-dessus de petites restanques le pré des Moines. Un de mes compagnons de route me présente les frêles tulipes sauvages tout juste sorties de terre et leurs couleurs ensoleillées. Au loin dans le ciel, le Prieuré et la Croix de Provence réunis en un coup d’œil, forment l’incontournable duo à visiter de la montagne Ste-Victoire.


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Je ne connais personne, à part le président que j’ai aperçu de loin le jour de la dernière assemblée générale. Dans le logis du prieur, l’accueil est simple et la discussion se noue facilement autour d’une tasse de café. La douzaine de bénévoles continuent le déblaiement de l’espace sous le logis d’Elzéard (dernier ermite ayant habité au prieuré), espace supposé être celui de l’ancienne chapelle du moyen-âge. De l’escalier provenant de img_7693r.JPGdessous ce logis, il ne reste que des traces d’assise enduite du côté du refuge. Beaucoup de poteries cassées (et autres déchets modernes…), entassées depuis plusieurs siècles, sont retrouvées, certains morceaux pouvant s’emboîter parfaitement comme dans un puzzle. En fin de matinée, nous échangeons les pioches contre des instruments plus fins tels que balayette ou petite truelle, et nous procédons à reculons pour ne pas endommager img_7676r.JPGle niveau d’occupation que nous venons de nettoyer. La résolution de l’énigme de la chapelle Venture peut commencer grâce à Liliane, l’archéologue qui nous accompagne…

img_7683r.JPGQuelques semaines auparavant, la passerelle a été héliportée en kit, sous la direction d’Hervé Béguin du Site Ste-Victoire-Concorce. Le mur de la brèche des moines a été élevé doucement. Aujourd’hui, j’ai l’impression de retrouver la gravure d’antan avec son panorama sur la face sud de la montagne. Des années qu’on ne l’avait pas vu ainsi.

img_7688r.JPGLa margelle de la citerne a été détruite pour retrouver les vestiges du XVIIe siècle. Les pierres de Bibémus ont été reposées tout autour.

Lors des fouilles dans le cloître et du dégagement des ouvertures au niveau des cellules des moines, Yves a trouvé 2-sols FRANÇOIS constitutionnels, monnaie à l’effigie de Louis XVI.

En raison de leur impressionnant tirage, elles sont assez faciles à trouver. Celle trouvée sur le site, en métal de cloche, provient d’un atelier provisoire, celui d’Arras, que l’on repère par le point placé sous le W. Le W seul aurait signifié qu’il s’agissait de l’atelier de Lille ; l’étoile sous le W qu’il s’agissait de l’atelier provisoire de St-Omer. Plus de 4.200.000 de ces pièces y ont été gravées.  Si elle portait par anticipation  la date ‘an V’ au lieu de ‘an IV’, elle aurait eu un peu plus de valeur…

J’adresse mes remerciements au webmaster de la Société Numismatique Héraldique et Sigillographique du Nord de La France, à Gilles Ricocé, son vice-président, Dominique Delgrange, secrétaire général, qui m’ont apporté des informations fiables au sujet de cette pièce.

Le Mercure des Monnaies Françaises, La Révolution 1791-1794, F. Droulers, Pontcarré, 1996
Argus des monnaies francaises de la revolution 1789-1794oeuvre collective, Chevau-Legers Eds, novembre 1999
Monnaies d’Artois et du Pas-De-Calais, Delgrange Dominique, D. Delgrange – Collection : Cercle De Bourgogne – janvier 1986
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