Le viaduc de Chanteloube : dans l’eau !


Un viaduc de chemin de fer dans l’eau, oui, c’est bizarre mais ça existe dans les Hautes-Alpes, à Chorges. La construction d’un embranchement Chorges-Barcelonnette commence en 1909. La Première guerre mondiale ralentit les travaux. En 1935, alors que le premier tronçon de 27,7 km est pratiquement terminé, il est décidé d’abandonner la construction de la ligne. Puis la mise en eau du barrage de Serre-Ponçon le submerge ; le Grand-Pré est inondé, le torrent des Moulettes de 1900 devient l’anse des Moulettes sur la carte d’aujourd’hui.

Le plan Freycinet, voté par le Parlement en 1878, prévoyait que toutes les préfectures et sous-préfectures de France seraient reliées au réseau ferré national. Hélas, la desserte de la sous-préfecture de Barcelonnette ne sera jamais achevée. Bulletin PLM n° 39, Mai 1935, Direction de la Compagnie PLM1, Paris

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Direction des Hyvans, mais sans aller jusque là ; à l’embranchement, nous prenons la route la plus à gauche et stationnons à côté de la maison. On accède rapidement au lac par un sentier en sous-bois annoncé par un panneau « Le Lac ». Comme il pleut un peu, le sentier est glissant ; Lilou, 5 ans 1/2, trébuche mais ne se dépare pas de sa bonne humeur : première de cordée, elle mène la tribu des trois adultes jusqu’au bord du talus un peu haut pour elle. Le lacElle s’approche de l’eau : elle aimerait se mouiller et monter sur le pont sans rails comme les autres enfants mais nous ne sommes équipés que pour la pluie, pas pour le bain.

Le niveau de l’eau ayant remonté, une partie du viaduc de Chanteloube plonge sous l’eau. Il parait court sur pattes maintenant qu’il a les pieds dans l’eau et pourtant sa pile centrale est haute de 61m ; long de 300m, il comprend 6 voûtes de 27m d’ouverture. Tracé en S avec raccordements paraboliques, il cumule toutes les difficultés d’implantation. Il est en déclivité constante de 21mm/m de la rive gauche (côté Chorges) vers la rive droite (côté Hyvans). Aucune recherche esthétique particulière : ‘les moellons sont anonymes et de petit appareil’ ; tels sont les principes de Paul Séjourné2 pour ces sortes d’ouvrages.

SP09 Autour du lac : viaduc de Chanteloube par Ti’Mars…, trouvé sans la photo spoiler.

Itinéraire d’accès au lac (impossible cependant d’y aller avec une poussette) de 1km400 30mn A/R 72m dénivelée pour une baignade des plus originales aux abords du viaduc.

1P.L.M. : Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, l’un des ancêtres de la SNCF et de la ligne Paris-Lyon-Marseille
2Paul SEJOURNE (1851-1939) a dirigé le Service de la Construction du PLM de 1909 à 1926. A ce titre, il est aussi le concepteur de la ligne Miramas – l’Estaque

Belvédère de Cadarache


Départ du parking la Boulangère à Jouques (hameau de Bèdes) pour le belvédère de Cadarache. Sentier forestier classique fraîchement débroussaillé dans une forêt de chênes verts, royaume des sangliers. Sentier fleuri au printemps. Beaucoup de VTT mais peu de randonneurs.

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Nous quittons le sentier balisé pour le lieu-dit Camp de Mus ; Bob_13, un de nos amis, est persuadé d’y avoir repéré de loin des constructions ; à l’aller, nous ne trouvons rien ; me rappelant le sens du mot ‘camp’1 en ancien occitan, et que près d’un ‘camp’, des cabanes peuvent servir d’abri ou de remise à outils, je propose de longer le champ en contre-bas du chemin où des terres sont cultivées dans un étroit goulet entre deux zones boisées ; nous longeons donc ces terres jusqu’à repérer au loin une cabane de pierre sèche. Elle est de taille assez impressionnante, renforcée d’un second mur pour la soutenir ; elle devait autrefois être à l’intérieur d’un enclos de pierre sèche couronné, aujourd’hui à l’abandon. Mais c’est plutôt l’oppidum indigène de Mus que nous aurions aimé découvrir. Entre Antiquité et haut Moyen Age : traditions et renouveau de l’habitat de hauteur dans la Gaule du sud-est, L. Schneider, Actes du colloque de Fréjus, 7 et 8 avril 2001, Michel Fixot Ed., 2004

Au retour sur le sentier balisé, nous nous approchons d’une belle borne-limite  en granit (et non granite, la roche, terme de géologie) lisse et brillante ; plusieurs suivront à courte distance ; sans doute marquent-elles la limite des communes de Jouques et Saint-Paul. Les nombreux repères forestiers – rectangle blanc avec liseré rouge médian – délimitent quant à eux, la forêt communale de Jouques.

Au carrefour suivant, nous retrouvons le chemin balisé ; estoublon me fait remarquer la présence d’un impluvium – grande plaque de béton inclinée – qui permet à l’eau de pluie de s’écouler dans une citerne de protection contre les incendies ; il décode les informations que l’on trouve sur le pylône à haute tension juste à côté. Pylône 27 : Boutre-Tavel dériv tore-supra 400kv attache 27 ; Boutre-Plan d’Orgon 220kv attache 27.

Décodage: La fusion thermonucléaire vise à reproduire sur terre l’énergie des étoiles. Pour cela, il faut atteindre et maintenir des températures de l’ordre de 100 millions de degrés. Depuis 1988, date de sa mise en service, l’installation de recherche TORE SUPRA est le plus grand tokamak2 à aimant supraconducteur du monde. La ligne électrique de Boutre (près de Ginasservis) à Tavel (Vaucluse) a été déviée vers le poste de Plan d’Orgon ; elle sert donc à fournir l’énergie électrique nécessaire au fonctionnement de la région sud-est et à celui du tokamak. L’autoroute nouvelle puissance délivre 400 kV par l’intermédiaire de deux lignes électriques distinctes et redondantes. Traduit du site iter.org.

RTE a décidé de mettre en place des balises avifaunes  sur les 350 mètres de liaison aérienne entre les deux nouveaux pylônes ; ces mesures permettront entre autres espèces, de protéger un couple d’aigles de Bonelli récemment installé dans le secteur (dont seulement 25 couples sont recensés en France). Extrait du site Réseau de Transport d’Electricité, dépêche du 14 juin 2004

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** Découverte du plateau de Ganagobie


Après 4km de virages tout en montée, vous parvenez sur le parking du prieuré de Ganagobie. Après vous être garé, vous ne pouvez manquer la vue sur la vallée de la Durance qui « méandre dans le lit restreint que les hommes lui ont laissé ». Le parcours sur le plateau s’avère facile et plein de surprises ; aucun danger dans la zone centrale : les enfants pourront courir en toute liberté. Le seul risque se trouve sur le bord qui donne sur un a-pic. Si vous allez à l’aventure sans préparer votre circuit, il est probable que vous ne verrez pas tout. Je vous accompagne sur ce plateau dont les plus anciennes traces remontent au néolithique (2800 à 1800 av. J.C.).

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Nous longeons d’abord le bord du plateau le long de falaises abruptes que l’on ne peut franchir que par la route sinueuse qui entaille le roc. Nous marchons sur des dalles calcaires irrégulières, la sixième et dernière couche géologique. Si on s’approche du bord, on s’aperçoit que des fissures verticales  importantes se produisent. Sans aucun doute, un éboulement aura lieu tôt ou tard.  Côté panorama : calme, austérité, collines dans lesquelles on devine quelques fermes en ruine.

Nous passons à côté d’une meule de moulin cassée puis à la fontaine aux oiseaux, lieu joliment renommé pour désigner l’impluvium d’un chantier d’extraction de meules, relié par une goulotte à un bassin supérieur carré.

Nous croisons le chemin communal de Monticelli qui menait à Augès, continuons jusqu’à l’extrémité nord du plateau : le pendage de la dalle est au plus fort : 70m de dénivelée entre le nord et le sud du plateau ; évidée naturellement, à son pied, elle pouvait abriter les troupeaux. Quelques mètres plus loin, nous arrivons devant Villevieille (castrum de Podio en 1206) et son très long rempart de pierres rectiligne (120 m), avec une tour circulaire et un donjon-porte. La grande salle adjacente au rempart ressemble à une chapelle : un ancien bénitier abandonné au sol peut le faire croire mais les archéologues la qualifient de salle des gardes (fin XIIè), les fenêtres sont d’ailleurs réduites à des meurtrières ; le village médiéval n’a été qu’éphémère : guerre de religion et peste ont fait fuir les habitants et les moines au XVIè siècle.

Nous passons derrière le mur ; deux autres personnes  juchées sur les murs en ruine, visitent l’ancien village ; il s’agit du Père abbé, fier de faire connaître le site à son vieil ami chirurgien ; il nous raconte avoir quitté l’abbaye de Hautecombe pour Ganagobie il y a une vingtaine d’années et que depuis, il n’a cessé de travailler à sa restauration.

Nous rejoignons l’éperon rocheux au nord et ses dizaines d’habitations écroulées, disposées de manière orthogonale. Le village était équipé d’une tour ronde dont les vestiges ont presque totalement disparu. Au loin, estoublon me montre Augès et le Tourdeau où nous avions randonné dans la neige (la chapelle d’Augès et la ferme des Lioux).

Le chemin de l’intérieur du plateau, tantôt s’ouvre sur des clairières, tantôt est enserré entre les taillis ; nous avons bien du mal à identifier la fonction de certaines constructions en pierre sèche. La chapelle Saint-Martin au profil étiré, n’a plus que les murs sur le tiers de sa hauteur ; elle est coupée par un mur de refend qui détermine deux espaces différents ; une pette nécropole entourait le sanctuaire. Les écrits n’en parlent que sur l’inventaire des biens nationaux de 1791. Petite halte sur le banc de pierre (un évier de pierre plutôt…)

L’allée de Forcalquier, autrefois appelée le promenoir parce que les moines s’y promenaient après le repas, mène à une croix blanche dominant un spectaculaire point de vue  sur des étendues vallonnées, les coupoles de Saint-Michel, le Luberon. Sur la droite, j’avais déjà visité la carrière de meules lors de la fête régionale de la randonnée de 2008. Il y en a trois sur le plateau : près de la fontaine aux oiseaux, près de la chapelle Saint-Martin, et la plus grande au bout de l’allée de Forcalquier ; Martel a recensé 150 extractions. Parfois, l’extraction a échoué et la meule est restée en place.

Elle est détourée au pic. Si l’épaisseur de la meule correspond à l’épaisseur du lit rocheux, elle est extraite à l’emporte-pièce sinon il faut décoller sa face inférieure du sol ; une rainure est alors pratiquée à la base de la pierre dans laquelle on enfonce des coins de bois dont le gonflement, après arrosage, est théoriquement suffisant pour obtenir la séparation de la meule du sol. D’où le creusement d’un bassin muni d’une bonde d’écoulement juste à côté de la carrière. Les petites meules sont destinées à un usage domestique pour les céréales ou les sels. Les grandes (1m20 de diamètre), planes sur leurs deux faces, sont destinées plutôt à des moulins à huile. En effet, le matériau est trop médiocre pour une rotation rapide. Voir notice 20 page 241 du livre Ganagobie, mille ans d’un monastère en Provence, Michel Fixot, J.P. Pelletier, Guy Barruol, les Alpes de Lumière, 2ème édition, 2004

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