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Sur le chemin poissonnier à Eguilles et Coudoux


A partir du cadastre napoléonien, je me suis amusée à suivre le chemin poissonnier qui traverse Eguilles Coudoux section A5 1832 Archives dép. 13et Coudoux, repérant d’où il venait et où il allait. C’est le moins connu des chemins saliers qui reliaient Berre à Gontard, sur les bords de la Durance. J’avais eu occasion de le découvrir lors de la 4ème randonnée de la courge à Rognes, grâce aux traces de chariot dans le sol. La Région de Rognes, Tournefort et Beaulieu à travers l’histoire : un terroir provençal dans l’Antiquité et au Moyen âge, Maurice Coquet, D. Wapler, 1970
Il porte des noms différents selon les communes qu’il traverse et selon les époques : chemin salier (en Provence) ou saunier, chemin du sel, ou poissonnier car y étaient transportés le sel et les salaisons de poissons. Parfois les toponymes en ont gardé le souvenir. A Velaux par exemple, dans le recensement des routes et chemins, on parle de chemin vicinal n°6 dit « salier ». A Coudoux, le chemin poissonnier est toujours porté sur la carte IGN ; de nombreuses rues (du, des) poissonnier(s), à Paris ou bien ici, sont explicites. Dans sa Statistique du département des Bouches-du-Rhône: avec Atlas …, Volume 2, Christophe de Villeneuve écrit que

les salyens portaient le sel à ce marché [Pertuis] et en rapportaient du blé et les autres produits agricoles qui leur manquaient.

Ce chemin du sel est donc bien antérieur à l’époque romaine.

Recherches sur les voies préromaines de la Trévaresse et du plateau de Rognes vers la Durance - Maurice Coquet

Un chemin salier évite les obstacles naturels autant que possible, passe souvent près des lieux de vie : chapelles, tombeaux, fontaines (Fouen du Vabre à Rognes) ; le long de celui-ci, des débris antiques y ont souvent été délaissés ; il relie les oppidums comme Roquepertuse à Velaux, Pierredon à Eguilles, Entremont à Aix. Les Romains probablement en ont récupérés quelques uns pour leur propre trafic commercial. Sur les six chemins saliers de la Trévaresse, cinq se croisaient à Conil, près du château de Beaulieu, à Rognes. D’après Recherches sur les voies préromaines de la Trévaresse et du plateau de Rognes vers la Durance, Maurice Coquet, 1968

borne limite Eguilles (mairie)J’arrive sur les lieux par la voie aurélienne ; juste avant de tourner vers le ball-trap Artémis et la bastide du Loup, j’ai le temps d’apercevoir la borne-limite sculptée de la commune d’Eguilles, identique à celle située devant la mairie (ci-contre). Le chemin salier n°VI traverse la route ici, d’un côté menant à Saint-Cannat, de l’autre à Berre par Coudoux. Je me suis garée peu avant le pont de la ligne TGV : au delà, les voitures sont interdites.

sentier la Bourdonnièrevigie de VentabrenTrès proche du ball-trap Artemis, j’entends les nombreux coups de fusils ; je tourne vers la Bourdonnière sur un chemin moins impersonnel que la grande piste mais qui retentit tout autant des coups de fusils. point de vue chemin st HilaireA partir du quartier de Saint-Hilaire, je vais rester sur les hauteurs, non sans apprécier toutes les montagnes visibles que j’ai identifiées grâce à PeakFinder.org : la Sainte-Baume, le pilon du Roy et la chaîne de L’Etoile ; Point de vue depuis la vigieje vais dominer la plaine où se blottissent Ventabren et Coudoux qui ont poussé comme des champignons. Un petit détour par la vigie de Ventabren et son large point de vue s’impose.

La vigie de Ventabren, par theyoungstone

panneau de mise en garde

Je redescends sur la piste puis, 200m plus loin, je longe le gazoduc ponctué de bornes jaunes ou bleues qui matérialisent son tracé. « Tir au vol interdit sur pipe-line » peut-on lire sur un panneau cloué sur un arbre. En effet, à partir du 1er octobre, durant les périodes de passage, la chasse aux oiseaux migrateurs est autorisée, exclusivement au poste et au tir au vol sur le chemin de crête de la Cordière.

chemin poissonnier Coudouxzone de tir au vol ?Aux collets de Maroc, c’est la commune de Coudoux ; je ne vois pas le début du sentier de crête mais après quelques mètres dans les cailloux, il se dévoile, totalement à découvert ; en contre-bas, le filet bleu du canal de Marseille sinue. Le plateau de végétation basse, caillouteux est parsemé de zones d’épierrage ; sur le sentier, à intervalles réguliers, des blocs rocheux semblent barrer le passage ; je suppose qu’il s’agit de la délimitation de zones de tir au vol.
Le passage sous les nombreuses lignes à haute tension ne peut être évité ; c’est à cet endroit que sur la gauche, descendait épierragele classique chemin salier, tel qu’encore indiqué sur le cadastre napoléonien. Je n’ai pas tenté de l’emprunter. cabane de chasse camoufléePresque à l’extrémité ouest du sentier, une cabane de chasseur a été habilement camouflée par des branchages : sur la gauche, un sentier s’enfonce dans le vallon, probable itinéraire alternatif du chemin poissonnier ; au loin la tour de guet de Coudoux avec sa table d’orientation (détour de moins de 500m).

un immense champ de pierrescabaneLe retour commence sur le plateau, par une piste parallèle à celle de l’aller ; de très nombreux chemins de traverse la coupent ; quelle galère de marcher dans ce champ de pierres ! je passe par la cabane de pierre sèche que m’avait signalée André et qui garde des traces de vie, celle des chasseurs sans doute. Je repasse sous les lignes à haute tension, devant une citerne mirador sur le chemin poissonnierDFCI puis oblique vers le nord, par cette belle et large piste relativement ombragée ; c’est le chemin poissonnier, le long duquel des miradors de chasse fixes, pas très hauts, sont implantés à intervalles réguliers ; délimitent-ils une enceinte de chasse pour les battues ? en tous cas, de quoi satisfaire les enfants qui partiront en avant, grimperont sans difficulté pour jouer en attendant que les grands les rejoignent. Je comprends pourquoi ce vieux chemin est toujours utilisé et entretenu : direct entre Eguilles et Coudoux, ombragé, large.

Je retrouve le carrefour avec la Bourdonnière puis la ligne TGV ; quand un train passe, le sol tremble et le bruit masque les voix. La modernité est toute proche.

Une randonnée facile qui pourrait aussi bien se faire en VTT mais à éviter par les grosses chaleurs d’été ; du chemin poissonnier, je n’ai pas trouvé de témoins sur le terrain mais l’intérêt est plutôt dans sa connaissance historique.
Saviez-vous que ce quartier d’Eguilles est traversé par trois vieux chemins célèbres ? le GR65 de Compostelle, le chemin de transhumance des troupeaux d’Arles et le chemin salier ; faudra que que je concocte un jour un circuit inédit qui passe par les trois…

chemin poissonier EguillesItinéraire 11km800, 2h45 déplacement (3h au total), 49m dénivelée (+115m, -115m). La trace verte superposée à la trace du circuit est le sentier poissonnier d’après le cadastre napoléonien.

©copyright randomania.fr

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Une réflexion sur « Sur le chemin poissonnier à Eguilles et Coudoux »

  1. Dóu Martegue, qu’es la Veniso prouvençalo,
    De Touloun, de Frejus, lou pople pesco e salo;
    La Rèino Jano
    Frederi Mistral

    De Martigue, qui est la Venise provençale
    De Toulon, de Fréjus,le peuple pêche et sale.
    La Reine Jeanne
    Frédéric Mistral

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